AASLD 2015 : J3 UN INVENTAIRE À LA PREVERT…

Nous aurons l’occasion dans les semaines à venir de reprendre toutes les nouveautés découvertes lors de ce congrès. Alors pour avoir le maximum d’information, je vous propose les scoops sous forme d’un seule phrase sans entrer dans les détails des études ou des présentations.

1/ Les transplanteurs se demandent si chez certains patients au bout d’un certain temps après une greffe, on ne pourrait pas arrêter les traitements antirejet ?

2/ Enfin un espoir dans l’hépatite Delta : l’association d’un traitement par Interféron pegylé et REP 2139, testée sur 12 patients caucasiens porteurs d’hépatite Delta, s’avère efficace.

3/ Hépatite B et risque de cancer, on démontre qu’un traitement efficace contre le VHB réduit l’apparition du cancer et les chinois démontrent que l’échec thérapeutique est un facteur indépendant de survenue de cancer. Enfin, il semblerait que l’Ag HBcr puisse avoir une valeur prédictive d’apparition de cancer.

4/ Si 95 % des cancers du foie surviennent sur cirrhose quelles sont les causes des 5 % restant ? Cette étude multicentrique française montre comme facteurs associés le diabète, le syndrome métabolique, l’infection B et la consommation de tabac.

5/ Hépatite C : on ne compte plus les tentatives pour raccourcir les traitements à 8 semaines, les nouveaux antiviraux qui arrivent permettront de rendre cet objectif courant en dehors de cirrhose. Les vieux malades vont être jaloux.

6/ Hépatite C : on peut traiter les patients en attente de greffe et dans 16 % des cas cela permettrait de les « délister » (un verbe rare qu’on aime bien).

7/ Le café pris au moins à hauteur de 5 tasses par jour serait un agent antifibrosant objectif mais ne serait pas actif sur la cirrhose ! Mais a-t-on le droit de mettre du sucre ? Il semblerait également que le café protégerait les buveurs excessifs d’une hépatite alcoolique aigue. Voila pourquoi les débits de boisson s’appellent des cafés ! Ce sont les ancêtres de la réduction des risques !

8/ Les patients en attente de greffe seraient mal couverts pour les vaccinations contre l’hépatite B. Alors, cirrhotiques, pensez à vous vacciner suffisamment tôt.

9/ Hépatite B et transmission mère /enfant en cas de charge virale forte et chez les mères porteuses de l’Ag HBe, la sérovaccination laisse encore 18 % de transmission alors que son association au Ténofovir, la réduit à 5,2 %.

10/ Les nouveaux TIPS couverts améliorent la survie des patients sans transplantation hépatique en cas d’ascite réfractaire.

11/ La classification de Child qui était en fait la classification de Child – Turcotte – Pugh a été proposée il y a plus de 40 ans. Jusque là, on n’a pas réussi à faire mieux mais ça devrait changer. Il n’y a pas que le record du 100 m qui peut évoluer notre vieille classification de Child aussi !

12/ Pour les hépatites auto-immunes, on propose aussi  des traitements de deuxième ligne comme le Tacrolimus ou le Mycophènolate (utilisés en transplantation) mais aussi  le Méthotrexate, à manier avec prudence devant son hépatotoxicité.

13/ Cirrhose virale C guérie virologiquement, le risque de cancer reste présent. A partir de la cohorte des vétérans traités, les modèles mathématiques ont permis d’évaluer le risque à 0,32 % de survenue d’un cancer du foie par an, plus en cas de diabète ou d’âge avancé.

14/ Quand l’alcool garde mauvaise presse. Etude réalisée à partir des données PMSI françaises, il s’avère que les patients avec cirrhose virale C sont mieux pris en charge que ceux porteur d’une cirrhose alcoolique. Etude à poursuivre, on espère que ce n’est pas un délit de facies. Y aurait-il des différences entre les patients abstinents ou non ?

15/ Le dépistage régulier par échographie du cancer du foie sur cirrhose est particulièrement difficile chez des patients précaires. L’envoie de lettres de rappel et d’invitation au dépistage améliorent significativement les choses. On attend les mails et les textos.

16/ La cirrhose biliaire primitive n’est pas en reste et on vous annonce la naissance de l’acide obéticholique, nouveau traitement porteur d’espoir.

17/ Syndrome métabolique, oui, la vitamine E a sa place. En attendant, des nouvelles classes thérapeutiques montrent des pistes intéressantes comme le GFT505 très prometteur.

18/ On pourrait aussi évoquer l’effet des radiations à Fukushima  sur la dysfonction hépatique …

19/ Un exposé très technique avec schéma à l’appui et une étude sur les transmissions de l’hépatite C par les fluides rectaux chez les hommes VIH ayant des rapports avec d’autres hommes, où l’on découvre le concept de charge virale rectale …

20/ Une marmotte et deux ratons laveurs …

Demain pour la dernière journée, nous évoquerons les communications orales de dernières minutes, les scoops seront au rendez-vous …

Pascal Mélin

Défis associés aux cas difficiles VHB

Dimanche le post-graduate a démarré avec un regard sur les options de traitement pour les cas difficiles d’hépatite B impliquant les grossesses, les risques de réactivation chez les patients recevant un traitement immunosuppresseur, et l’importance des rappels de vaccination chez les jeunes patients en âge d’aller à l’université.

Anna S.F Lok, Pr en hépatologie et directeur de recherche clinique au département de médecine interne à l’université du Michigan Health System à Ann Arbor a ouvert la présentation avec les cas VHB difficiles.

VHB et grossesse : Le premier cas concerne une femme enceinte HBeAg avec une forte charge virale (CV). La patiente est asymptomatique, âgée de 29 ans, primipare (première grossesse), HbsAg+, HbeAg+ avec ALAT à 21 et un ADN circulant de 257 000 000 IU/ml. Les données montrent que le traitement des patients dans la phase d’immuno-tolérance du VHB manque d’efficacité pour contrôler le virus. Mais le Dr Lok dit que les exceptions sont les patients nécessitant un traitement immunosuppresseur, les patients de plus de 40 ans, ceux avec un antécédent de cancer du foie dans la famille ou les femmes enceintes. Dans la mise à jour des préconisations pour l’hépatite B publiées vendredi, on nous recommande d’envisager un traitement antiviral à la mère pendant la fin du 2eme trimestre ou début du 3ème. Le but du traitement est de réduire la transmission mère-enfant. Les nourrissons qui reçoivent des immunoglobulines VHB et démarrent le processus de vaccination comme prévu dans l’agenda vaccinal sont tout de même à risque de contamination si la mère a une charge virale élevée. Le traitement est recommandé si la CV de la mère est supérieur à 1 million IU/ml, à partir de la 28ème-30ème semaine, et stoppé à l’accouchement si le but est de prévenir la transmission. Le Ténofovir est préférable mais les essais cliniques (registre des grossesses sous antirétroviraux) ont montré l’innocuité du Tenofovir, Lamivudine, Telbivudine. Il est préférable de ne pas allaiter avec le Tenofovir.

Cancer et réactivation : Le traitement prophylactique antiviral montre son efficacité dans la prévention de la réactivation du virus B pendant un traitement immunosuppresseur. Le cas étudié est un homme de 56 ans, HbsAg/anti Hbc récemment diagnostiqué, avec un lymphome qui doit démarrer une chimiothérapie contenant du Rituximab. Avant la chimio, le patient avait une charge virale indétectable. La réactivation peut se produire chez des patients cancéreux, lymphomes et aussi tumeurs solides, recevant une chimiothérapie systémique, les patients greffés avec des cellules souches hématopoïetiques, les patients HCC ayant subi un TACE, et tout patient ayant reçu un anti TNF, un traitement stéroïde à long terme ou tout autre agent immunosuppresseur. Les patients HbsAg sont plus suceptibles d’une réactivation mais elle peut se produire aussi chez des patients HbsAg et anti Hbc. Une analyse systématique des 14 études impliquant 275 patients utilisant la Lamivudine à titre prophylactique pendant leur chimiothérapie et 475 sujets témoins a montré que l’utilisation prophylactique diminue la réactivation de l’hépatite B entre 79 et 100 % et les décès liés au VHB entre 80 et 100 %. Les résultats sont encore meilleurs avec l’Entécavir par rapport à la Lamivudine. Un essai contrôlé randomisé sur 121 patients HbsAg+ (61 Entecavir 60 Lamivudine) recevant une chimiothérapie contenant du Rituximab pour un lymphome montre la supériorité d’Entecavir à prévenir une réactivation du VHB (4 évènements Entécavir vs 18 Lamivudine), l’hépatite reliée au VHB (0 Entecavir vs 8 Lamivudine), et l’interruption des chimiothérapie (1 Entécavir vs 11 Lamivudine). La prophylaxie est recommandée pour les traitements immunosuppresseurs à haut risque comme le Rituximab par exemple. Alors, le traitement antiviral doit être poursuivi 12 mois après l’arrêt du rituximab. Surveillance et antiviral sur demande doivent suffire pour les risques modérés d’immunosuppression. On peut recommander que tout patient qui doit démarrer un traitement immunosuppresseur, soit dépisté pour l’hépatite B et que l’hépatologue soit consulté avant de débuter tout traitement.

Rappel vaccination VHB : le dernier défi du Dr Lock concerne l’efficacité d’une dose de rappel du vaccin VHB chez de jeunes adultes au travers d’un cas d’un jeune homme de 18 ans qui a reçu sa première dose de vaccination à la naissance complétée des 3 doses en accord avec le calendrier vaccinal. Il n’y a pas d’antécédent familiaux de VHB, l’apparition d’anti-HBs n’a pas été vérifié après la série de vaccinations, son anti-HBs a été considéré comme tel. La Méta-analyse de protection vaccinale à long terme impliquait 22 études, 42 cohortes indépendantes et 11 090 participants, parmi laquelle 42 % de jeunes de moins de 20 ans, pas de VHB chronique détecté et 8 sujets transitoirement HBSAg+. Les limites de l’étude sont : un taux de décrochage élevé, certaines études ont exclu les non répondeurs primaires, et informations limitées au delà de 15 ans. Une étude Taiwanaise a conclu que près de 25 % des personnes vaccinées à la naissance ont perdu la mémoire immunitaire du vaccin VHB au moment où ils atteignent l’âge du collège traditionnel et que deux doses de vaccin doivent être pratiquées pour assurer une séroconversion anti HBs à 90 %. Le Dr Lock indique que ces données doivent être validées, peut-être une seule dose suffirait. Le statut anti Hbs diminue avec le temps donc il peut y avoir une infection par le VHB transitoire en cas d’exposition mais le Dr Lock dit qu’il n’y a pas de cas documenté d’évolution vers une forme chronique ou symptomatique.

Pascal Mélin

Partager l'article

19270

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *