UN GUIDE RÉÉDITÉ

À quoi reconnait-on un bon livre ?
Réponse : au fait qu’il est réédité !
Il en est de même pour les guides et c’est le cas du « guide social du médecin ».
Il y a quelques années SOS hépatites avait dénoncé que face aux démarches sociales les médecins et les travailleurs sociaux étaient trop souvent perdus et ne parlaient pas toujours la même langue même s’ils tentaient d’aider la même personne.
Dans nos partenaires, c’est l’ANGREHC (Association Nationale des Généralistes pour la Recherche et l’Etude sur les Hépatopathies Chroniques) qui avait répondu à cette attente, en éditant un guide, avec le soutien de la caisse primaire de l’assurance maladie, du ministère de la santé et les laboratoires Reckitt Benckiser très investi dans  la lutte contre les addictions.
C’est toujours sous la direction de Sibel Bilal que ce guide vient d’être réédité avec toutes les mises à jour nécessaires. On y trouve plein d’adresses utiles mais aussi des lettres types ou des fiches techniques, bref beaucoup de réponses aux problèmes sociaux que les malades (ou pas) peuvent rencontrer, c’est en ayant recours à ce type d’ouvrage que l’on peut réduire le temps insupportable nécessaire pour obtenir une réponse face à un problème social pour lequel on s’adresse à des professionnels de santé.
SOS Hépatites va faire en sorte que ce guide puisse être en accès dans toutes nos associations régionales, mais au-delà de ça il faudrait qu’il puisse être également accessible dans toutes les consultations d’addictologie où d’hépatologie et auprès de toutes les équipes d’éducation thérapeutique.
SOS Hépatites remercie tout ceux qui ont participé à l’élaboration de ce guide et participera à le faire connaitre.

PRENDRE UN TRAITEMENT

Il n’est peut être pas aussi simple de prendre un comprimé tous les jours même si celui-ci a une parfaite tolérance. Si vous en doutez, il suffit d’interroger les femmes qui prennent chaque jour une pilule œstro-progestative.
Dans le VIH depuis plus de dix ans il a été montré que l’observance aux traitements est un facteur majeur de contrôle de l’infection, d’absence de développement de mutation, de résistance ou encore de complications liées à l’infection virale. Un auto-questionnaire a donc été mis au point et publié : Chesney MA et al. AIDS Care. 2000;12:255-66 & Carrieri P et al. J Acquir Immune Defic Syndr. 2001;28:232-9.
 
Une répartition en 3 classes a été ensuite effectué, dérivé également de celui publié pour le VIH (Carrieri P et al. J Acquir Immune Defic Syndr. 2001;28:232-9). Pour résumer : l’observance totale correspondait à une observance à 100 %, l’observance modérée à une observance comprise entre 80 et 100 % et la non-observance à une observance inférieure ou égale à 80 %.
L’équipe du Pr Sogni  a réalisé une enquête du 1 janvier au 15 juillet 2009 en utilisant ce même auto questionnaire validé dans le VIH afin d’évaluer l’observance des patients atteints d’une mono infection liée a l’hépatite B et traités depuis au moins 3 mois par analogues nucléotidiques (un comprimé par jour). Le traitement étant simple et sans effet secondaire la plupart des médecins pensaient que l’observance était proche de 100 %.
Et bien en fait… non !
Dans cette étude 190 patients ont étés suivis pendant une moyenne de 58 mois. Et des résultats assez inattendus ont étés retrouvés. Seule 61% des patients avaient une observance qualifiée de totale, 32 % une observance modérée et 7 % étaient non-observants et avaient de ce fait beaucoup mois de chances de contrôler leur maladie.
Il ne suffit pas qu’un traitement soit simple et bien toléré pour qu’il soit pris parfaitement bien. Depuis 10 ans SOS hépatites milite et réclame le développement de programmes d’éducation thérapeutique pour les traitements de l’hépatite B chronique.
Selon l’OMS, « L’éducation thérapeutique du patient devrait permettre aux patients d’acquérir et de conserver les capacités et les compétences qui les aident à vivre de manière optimale leur vie avec leur maladie. (…) Elle vise à aider les patients et leurs familles à comprendre la maladie et le traitement, coopérer avec les soignants, vivre plus sainement et maintenir ou améliorer leur qualité de vie. » 
Si l’éducation thérapeutique n’a pas pour finalité l’observance médicamenteuse, elle devrait être un processus intégré aux soins pour accompagner au mieux les personnes dans leur quotidien avec une maladie et de ce fait, faire des patients des partenaires à part entière dans toutes les décisions à prendre les concernant. « Comprendre » c’est mieux gérer son traitement, avoir le sentiment d’être entendu, c’est aussi être en confiance et oser exprimer son mal être et de ce fait, être aussi accompagné dans les rechutes quand on est tenté de baisser les bras devant certaines difficultés dont celle liée à prendre un médicament de façon optimale chaque jour.
Les demandes d’accès à des programmes d’éducation thérapeutique sont encore marginales chez les patients et pas toujours compris par les soignants. Pourtant depuis 2009, l’éducation thérapeutique est inscrite dans la loi HPST…
SOS hépatites va donc s’attaquer à cette nouvelle action et œuvrer pour le développement de tels programmes.

TRISTE OU VIVANT ?

C’est quoi être malade ?  Est-on obligé d’être triste ou perdu ?  Est-il possible d’être heureux avec une maladie ?
Très souvent, je me pose ces questions et la plupart du temps, je suis tenté de dire oui et puis non…
Finalement, je me retiens de répondre par l’affirmative à cette question par peur de choquer mon voisin ou d’affoler mon entourage.
Parfois il m’arrive de dire haut et fort que l’on peut transformer sa vie, « retourner la crêpe » comme disait un mec qui possédait l’art de modeler les faits les plus terribles ou absurdes en des choses acceptables, vivables et parfois même drôles !
Sa préoccupation était de toujours opposer un événement positif et gai quand un autre, triste ou dévastateur se présentait et je ne vous étonnerai donc guère si je vous dis qu’un de ses films préférés était Docteur Patch réalisé par Tom Shadyac, avec Robin William dans le rôle du médecin.
En France, il en existe quelques spécimens de Patch mais en général on ne les prend pas au sérieux, on les prendrait même pour des fous…
Pourtant dans les services de pédiatrie, on fait intervenir des clowns, toutes les semaines. Riez les enfants, c’est vous qui avez raison, d’autant qu’on vous en donne le droit ! Parce que quand on arrive à l’âge adulte, on ne rit plus dans les hôpitaux… le personnel se fait même rudement remonter les bretelles quand des éclats de rire sortent de la tisanerie pour se répandre dans le couloir. Il est même arrivé que l’on remette en cause les décorations de Noël dans certains services au motif qu’une fête comme celle-ci à l’hôpital c’est triste ! Ben voyons… même si c’est un peu vrai ce n’est pas une raison pour la rendre encore plus triste ! Et dans le même registre, on plonge un mourant dans l’obscurité alors qu’il aimerait probablement profiter de la lumière jusqu’au bout de sa vie…
Tout ceci ne résout pas mon questionnement de départ : est-il possible d’être heureux quand on a un problème de santé et pourquoi se sent-on obligé d’être triste même si l’on a envie de ne pas l’être ?
Quelqu’un peut-il répondre à cette question ici maintenant tout de suite ou plus tard ?
Probablement que tout faire pour rester dans la vraie vie, si on la considère comme étant de continuer de travailler, de plaisanter, de voyager, de sortir, de rire, de câliner, d’aimer plus que tout, ou d’être parfois triste comme tout un chacun, nécessite d’être inventif, créatif et « d’oser »,  alors que tout le monde, famille et soignants, insistent pour vous mettre sous cloche.
Oser les challenges et les défis, oser continuer d’avancer coûte que coûte, oser terminer ce que l’on a entrepris, oser aimer encore et toujours sans se poser la question de savoir si l’on en a le droit, oser avancer sans se retourner… même si l’on sait que l’on est en sursis, parce que finalement tout le monde l’est.
Ça fait comment quand on est à deux doigts de mourir ?
Et que se dit-on quand on ne meurt pas, parce que ce jour là on a eu de la chance… C’est quoi la chance au juste ?
Finalement, je vais oser écrire qu’on peut se sentir heureux alors que le pilulier fait parti du décor de la cuisine comme la série de casserole suspendue au dessus de la cuisinière, oser écrire que l’on n’est pas obligé de s’empêcher de vivre, parce que des gens autour de nous ne sont plus là, même quand on a perdu ce que l’on avait de plus précieux près de soi et en soi.
Parce que c’est la vie et qu’on n’en a qu’une.
Parce que parfois, le seul choix qui nous reste c’est de vivre coûte que coûte pour faire un joli pied de nez à tous ceux qui voudraient nous voir triste, à tous ceux que la maladie ou le malheur effraie comme une chose contagieuse.
Et on a aussi le droit de refuser le nom de « malade » qui sonne comme une assignation identitaire, pour plutôt « faire avec », s’en dépatouiller, faire au mieux, faire des choix dans le prendre soin de soi.
Faites comme vous voulez, pensez ce que vous voulez, peut-être vais-je choquer mais… je veux vivre et je vivrai, même avec des genoux bien écorchés…

A.T.U.

ATU pourrait signifier Attendre Toujours Ultérieurement si cela ne voulait pas déjà signifier Autorisation Temporaire d’Utilisation.
Cette disposition sanitaire autorise le corps médical à prescrire une molécule ayant fait la preuve de son efficacité mais en attente d’autorisation de mise sur le marché (AMM) afin de traiter, prévenir ou diagnostiquer des maladies graves ou rares, notamment lorsqu’il n’existe plus de traitement approprié.
Dans l’histoire du SIDA  toutes les nouvelles molécules sont passées par un accès en ATU et ce, le plus souvent à la demande des patients ainsi qu’à grand renfort de communication et de transparence de la part des laboratoires pharmaceutiques.
Actuellement trois molécules, Sofosbuvir, Daclatasvir, Asunéprévir, sont dans la situation de reconnaissance scientifique et dans les arcanes des autorisations administratives.
À ce jour, des patients en échec de traitements conventionnels avec l’interféron et la ribavirine auraient besoin de bénéficier, lorsqu’il existe des lésions graves, d’un accès en ATU à ces molécules.
Certaines ATU ont déjà été demandées mais les prescripteurs ayant sollicité ce dispositif s’entendent dire qu’il y a très peu de demande !
Nous pouvons nous interroger sur les raisons qui font que ce dispositif est peu utilisé alors qu’il a été établi qu’un certain nombre de patients sont en échec thérapeutique.
Les patients seraient-ils trop dociles,  trop « patients » ou tout simplement mal informés ?
Ou bien encore, certains médecins ne connaitraient-ils pas ou mal la possibilité d’accès à certains traitements en ATU ?
Notre législation ne permet pas aux laboratoires pharmaceutiques de communiquer autour de ces molécules tant que celles-ci n’ont pas reçu d’autorisation de mise sur le marché.
N’est-ce pas là le rôle d’une association de patients que de diffuser ces informations ?
Car ces médicaments sont nécessaires dès maintenant et doivent s’accompagner d’une communication la plus large possible au sujet de leur existence, de leurs modalités d’accès et de la nécessité d’imaginer des programmes d’éducation thérapeutiques adéquats les concernant.
N’attendons plus, demandons dès maintenant l’accès à ces nouveaux traitements.
Ne soyons plus seulement patients mais aussi impatients et osons entamer le dialogue à ce sujet avec les médecins qui nous suivent pour que la maladie ne nous rattrape pas.

ÉPIDEMIE COMMUNAUTAIRE D’HÉPATITE A DANS LE DÉPARTEMENT DU NORD, FRANCE, 2008-2009

Épidémie communautaire d’hépatite A dans le département du Nord, France, 2008-2009

Héloïse Lecocq et al. Sylvie Haeghebaert; Cire Nord, Institut de veille sanitaire, Lille, France

En 2008 et 2009, une épidémie communautaire d’hépatite A s’est propagée dans le département du Nord. Un suivi épidémiologique a permis d’identifier les facteurs favorisant la transmission et d’adapter les mesures de contrôle.
Au total, 492 cas confirmés ont été notifiés, dont 157 en 2008 et 335 en 2009. Cinq foyers épidémiques ont été observés. L’âge médian des cas était de 9,5 ans [min – max : 1,5-87] et le taux d’hospitalisation était de 28%.
L’origine de la contamination était liée à une transmission active de personne à personne dans les familles ou l’entourage proche (45%), dans des communautés vivant en situation d’hygiène précaire (26%), au sein de collectivités d’enfants (17%). L’enquête virologique a mis en évidence la circulation intriquée, durant l’épidémie, de souches de génotype IA appartenant à 3 regroupements phylogénétiques.
Outre le renforcement des mesures d’hygiène, le contrôle de l’épidémie a nécessité la mise en oeuvre de stratégies collectives (campagnes de vaccination dans les populations vivant en situation d’hygiène précaire) et individuelles (vaccination de l’entourage familial des cas), suivant les recommandations du Haut Conseil de la santé publique du 13 février 2009.

Cet épisode illustre le risque épidémique du virus et l’intérêt de la vaccination autour des cas.

 

 

FINIR SON TRAITEMENT

Gilles est un patient que j’ai soigné de son hépatite C il y a plusieurs années et il nous est arrivé une aventure qui nous fait rire encore à chaque fois nous nous retrouvons en consultation de suivi…

Gilles est en bithérapie interféron et ribavirine depuis plus de 10 mois. Le traitement est lourd et difficile mais il arrive à son terme dans 3 semaines.

Comme le virus n’a disparu qu’après cinq mois de traitements nous ne savons pas encore si nous nous orientons vers une guérison ou vers une rechute.

Un jour, un médecin du service des urgences m’appelle pour me prévenir que Gilles y a été admis, fatigué, dénutri et que son état nécessite une hospitalisation. Je donne mon accord pour que Gilles soit orienté dans le service où j’interviens avant de me rendre à son chevet.

Arrivé près de lui, je constate sa grande fatigue, une tension artérielle basse, qu’il ne s’alimente plus depuis quelques jours et je comprends très vite que son moral est au plus bas.

Après l’avoir examiné longuement je ne retrouve rien qui puisse expliquer son état : rien à l’examen clinique, les premiers résultats de laboratoire sont normaux et pourtant il n’est vraiment pas en forme le garçon !

Après avoir passé en revue mentalement toutes les complications possibles liées au traitement, j’offre à Gilles ma plus belle réplique dans le rôle du médecin très rassurant en lui expliquant d’une voix qui se veut absolument convaincue, qu’une perfusion va l’aider à passer au mieux les quelques semaines de traitement qui restent.
Je quitte la chambre et retourne en salle de soins prescrire auprès des infirmières la surveillance de paramètres médicaux, les perfusions et son traitement, sans oublier l’interféron et la ribavirine pour quelques jours encore.

Les jours suivant je retrouve Gilles prostré dans son lit, fuyant les échanges. Je renouvelle son traitement jusqu’à ce qu’une infirmière m’interpelle pour m’apprendre que Gilles, fatigué de son traitement, a en fait pris toute la dose des trois semaines restantes ! Je reste stupéfait car c’est la première fois que je suis confronté à une telle situation. Gilles épuisé par la bithérapie a voulu respecter son engagement et aller jusqu’au bout du traitement mais en choisissant de s’en débarrasser plus vite. Je comprends mieux son désarroi quand il a constaté, une fois hospitalisé, que la première prescription que j’avais mise en place était de reprendre la bithérapie !

Je me suis rendu dans la chambre de Gilles pour lui dire que l’infirmière venait de me mettre au courant de la situation et que je comprenais. J’ai donc repris avec lui le concept du « 80×3 » développé et publié par Mac Hutchinson. Selon cette étude qui concerne la bithérapie interféron pégylé et ribavirine il n y a pas de différence entre les personnes ayant pris la totalité de leur traitement et ceux ayant pris 80% de la dose théorique d’interféron avec 80% de la dose théorique de ribavirine, pendant au moins 80% du temps prévu initialement.
À l’issu de cet exposé, nous avons donc conclu ensemble, que le traitement pouvait être arrêté avec trois semaines d’avance sans que cela n’ait d’impact sur son efficacité. Et j’insistais sur le fait que si le virus devait réapparaitre cela n’aurait rien à voir avec la fin du traitement qui même mené à son terme, aurait donné un résultat identique.
Gilles, soulagé de cette décision, s’est redressé dans son lit et le sourire a réapparu sur son visage.

Gilles est encore resté quelques jours en hospitalisation le temps que son organisme élimine les doses colossales prises en une seule fois. L’histoire s’est terminée sans complication, il a quitté le service et j’ai pu constater au fil des consultations, l’amélioration de son état général. Six mois plus tard les résultats des analyses sanguines montraient que « virologiquement », Gilles était guéri.

Depuis  je le vois en consultation chaque année, il va bien et il se demande parfois quel a été l’impact de son geste final. Je l’ai entendu dire en souriant que c’était peut être ce geste qui l’avait guéri.

Cette histoire si elle nous fait rire tous les deux maintenant nous a fait progresser dans notre rapport médecin-malade à travers l’interprétation différente de la notion d’engagement, le respect de chacun, la volonté de communiquer efficacement ensemble…

Les livres et mes maitres ont bien tenté de m’enseigner tout cela mais ce sont les malades qui me font comprendre à quel point tout ceci est essentiel.

SUIS-JE PROPRIÉTAIRE DE MON VIRUS ?

La question peut sembler surprenante et saugrenue, pourtant je l’ai entendue à l’occasion d’une de mes consultations.
La loi française qui tente de protéger les patients, stipule qu’en cas d’analyse génétique le médecin a l’obligation d’informer loyalement les malades et de leur faire signer une autorisation avant toute analyse d’une partie de leur patrimoine génétique. C’est donc ce qui doit être réalisé à l’occasion d’un génotypage de l’IL 28B et ce que j’explique à un patient venu en consultation.
Jusque là, tout va bien, tout le monde suit… rien d’anormal.
Quelques tubes de sang plus loin cependant, nous passons au génotypage du virus, et ce même patient me fait alors remarquer qu’il n’a pas signé d’autorisation écrite ! Souhaitant avoir réponse à tout, ce qui est normal puisque le docteur… c’est moi,  je réponds que « le virus ce n’est pas lui ! ».
Ce jour là c’est pourtant bien le patient qui aura le dernier mot à travers une réponse sans appel : «  Si ce virus est dans mon corps, c’est que j’en suis propriétaire et qu’il fait partie de moi. En conséquence, vous devriez me demander l’autorisation… »
Suis-je propriétaire de mon virus ? Pas facile à dire puisqu’il ne fait pas partie du patrimoine génétique d’une personne.
Toutefois lorsqu’on est infecté par le virus de l’hépatite B le chromosome de ce dernier s’intègre dans les chromosomes des cellules hépatiques ce qui pourrait laisser à penser qu’on en devient propriétaire par fusion/acquisition…
La chose n’est pas simple et en tous les cas pas si anodine que cela puisque tout un flot de questionnements débarquent dans ma tête : « Si mon virus est moi, cela signifie-t-il que je me soigne contre moi-même ? »… « Et si je me soigne contre moi-même, vais-je perdre mon identité ?… « Serais-je alors plus virus ou plus homme ?»
Vous suivez toujours ? Oui ? Alors poursuivons…
 « Si je considère que je fabrique chaque jour plus de particules virales que de cellules dans mon organisme, qui est alors de trop dans l’histoire ? Moi-même ou mon virus ? »
« En fonction de la réponse à cette question, le traitement m’amputerait-il d’une partie de moi ? »
« Mais alors que d’auto agressivité ! »
Euh… je ne suis plus vraiment certain que vous suiviez encore car cela devient vertigineux et puisfinalement je n’ai plus très envie d’avoir réponse à tout !
« Suis-je propriétaire de mon virus ? »
Je vous laisse répondre à cette interrogation à moins qu’on ne finisse par trouver un notaire et un psychiatre désireux de résoudre ensemble la question du titre de propriété du virus…

JAMAIS SANS MA FILLE

« Jamais sans ma fille »… vous vous souvenez sans doute de ce livre devenu un best-seller puis un film au début des années 90. C’est une histoire similaire que j’ai vécue à l’occasion d’une de mes consultations d’hépatologie.
Il y a quelques années une jeune femme est venue consulter suite au diagnostic d’hépatite C fait par son médecin traitant.
Nous avons alors réalisé le bilan de son atteinte hépatique et en fin de consultation je préconise qu’un test à sa fille de 5 ans soit fait puisque dans environ 3% des cas ce virus est susceptible d’être transmis au bébé lors de l’accouchement quand la mère en est porteuse.
Je vois alors la peur et l’angoisse passer dans ses yeux et marquer son visage : visiblement, elle ne semblait pas avoir envisagé que sa fille puisse avoir été contaminée ! Et mes tentatives de la rassurer reste vaines, elle ne m’entend déjà plus.
À la consultation suivante j’ai entre les mains les résultats de l’analyse de l’enfant, résultats dont la maman a déjà pris connaissance puisqu’un double est arrivé à son domicile : sa fille est atteinte et ce virus est bel et bien présent dans son sang. J’ai alors essayé d’expliquer qu’une contamination chez l’enfant ne posait en général pas de problème et que l’on se contentait d’une simple surveillance, repoussant le traitement jusqu’à l’âge adulte compte-tenu du retentissement de l’interféron sur la croissance osseuse.
Mes phrases n’ont cependant jamais réussi à faire disparaitre la culpabilité de cette jeune femme d’avoir contaminé son enfant même si cette adorable petite fille était en parfaite santé.
Nous avons laissé passer une année et l’accompagnement psychologique proposé fut refusé par la patiente.
L’année suivante la maladie avait progressé jusqu’à un état pré-cirrhotique et il a donc fallu envisager un traitement antiviral sans trop attendre.
Le bilan éducatif et thérapeutique fut réalisé et le traitement débuté.
La tolérance se montra médiocre mais la patiente courageuse et décidée poursuivit le traitement.
À un mois la quantité de virus retrouvé dans le sang était divisée par trois et au troisième trimestre la charge virale – négative.
Lors de la consultation suivante je me réjouissais de partager ces bonnes nouvelles avec la patiente, mais contrairement aux autres malades qui manifestent une certaine joie devant de tels résultats, la jeune femme resta taciturne.
Quelques semaines plus tard, elle demande à me voir d’urgence pour m’expliquer qu’elle avait décidé d’arrêter le traitement.
Je me souviens de ma stupéfaction en entendant ses mots qui résonnent encore dans ma tête : « Je culpabilise toujours d’avoir contaminé ma fille, mais c’est encore plus dur d’imaginer guérir sans elle ; ne m’en voulez pas docteur, vous m’avez rassurée et je sais aujourd’hui que je peux guérir. Mais je ne peux pas laisser ma fille seule avec la maladie que je lui ai transmise en lui donnant la vie. Quand elle sera grande je me traiterai avec elle et nous guérirons ensemble. J’espère que vous me comprenez. »
Passée la stupéfaction, je réussis à répondre que j’entendais et comprenais son choix et pu négocier qu’elle prenne soin d’elle en venant chaque année réaliser un bilan de surveillance.
Cet engagement fut tenu et depuis trois ans j’ai pu constater que son atteinte hépatique avait régressé bien que le virus de l’hépatite C soit toujours présent.
Cette jeune femme vient désormais en consultation accompagnée de sa fille et ensemble nous apprivoisons leur maladie et leur virus en attendant de pouvoir les traiter toutes les deux et donc de les guérir ensemble.
« Jamais sans ma fille », a été une expérience qui m’a semblée « hépatante » car le médecin et la mère ont appris l’un de l’autre. Grâce à cette femme, j’ai compris que les contaminations mère-enfant étaient fortes de conséquences psychologiques et sociales.
Ne pas entendre la culpabilité, la souffrance de cette maman mais aussi son choix de différer le traitement, c’était prendre le risque de perdre sa confiance et de ne pas poursuivre la surveillance hépatique mais aussi de ne pas aider cette mère à se réconcilier avec elle-même.
Les choix des patients, même s’ils provoquent parfois notre stupéfaction devraient toujours être force de réflexion…

VACCINATION INCOMPLÈTE CONTRE L’HÉPATITE B : INTERȆT D’UN RATTRAPAGE TARDIF ?

Christophe HOMMEL, Centre de vaccinations internationales, Centre hospitalier régional universitaire, Strasbourg, France

Objectif – Évaluer l’efficacité d’un rattrapage tardif chez les patients n’ayant pas terminé la vaccination contre le virus de l’hépatite B

Conclusion – Malgré un délai de retard pour la 3e dose de plus de 6 ans en moyenne, plus de 90% des patients mis à jour de leur vaccination contre l’hépatite B et contrôlés sérologiquement obtenaient un résultat positif en anticorps anti-HBs. Le sexe masculin, le délai de retard ainsi que l’âge au début de la vaccination semblent jouer sur la réponse immunitaire. L’absence de rappel semble principalement liée à la polémique qui a suivi, en France, l’importante campagne de vaccinations de 1994-1998.

L’ANNIVERSAIRE DES TRITHÉRAPIES

Cela fait un an que deux nouvelles antiprotéases (Telaprévir et Boceprevir) sont à notre disposition dans la lutte contre l’hépatite C. Ces deux molécules doivent être évaluées : ont-elles modifié le « paysage » hépatologique comme on nous l’annonçait ?
À regarder certains chiffres, oui… mais pas comme on l’imaginait !
Alors que les nouveaux traitements permettent d’obtenir 30% de guérisons supplémentaires, l’année 2012 a vu le nombre de patients traités baisser de 30% par rapport à l’année précédente.
De plus, bon nombre de ces patients étaient des malades en « multi-échec » thérapeutique et ont donc présenté une moins bonne réponse au traitement que celle attendue.
En résumé, malgré l’arrivée de nouveaux traitements plus puissants, le nombre de malades guéris de leurs virus en 2012 est en baisse par rapport à celui de 2011 mais pour un coût plus élevé.
Lorsqu’on interroge les hépatologues sur ce paradoxe, le caractère chronophage du suivi lié à ces nouveaux traitements est fréquemment évoqué, notamment à cause d’effets secondaires importants nécessitant des consultations plus rapprochées, ce qui peut se résumer par : « trithérapie, trois fois plus de temps ! ».
Alors qu’on imaginait passer les 20 000 traitements par an contre les 14 000 ou 15 000 antérieurement, le nombre de traitements instaurés en 2012 se situerait autour des 12 000.
Le compte n’y est pas et les centres de référence ou encore les équipes universitaires réclament plus de moyens et plus de bras pour prendre en charge ces patients mis en attente.
À SOS Hépatites, nous avons cependant fait un constat supplémentaire que nous déplorons : les petites équipes qui traitaient quelques patients par an, se sont souvent rétractées expliquant que ces nouvelles molécules nécessitaient du temps et des compétences qu’elle n’avait pas ou plus !
Face à ces constats et malgré les progrès en matières de nouveaux traitements mis sur le marché, nous pouvons craindre de voir s’aggraver les inégalités de santé en région. En effet, le progrès ne vaut que s’il est partagé par tous et chaque patient devrait pouvoir être suivi à moins de 100 kilomètres de chez lui sans avoir à parcourir 300 km pour accéder à une équipe susceptible de lui prescrire le traitement dont il a besoin.
Toute maladie chronique n’est « accompagnable » que dans la proximité, même si l’on tente de développer les suivis téléphoniques ou les « visio-accompagnement » qui ne restent pour l’instant qu’à l’état expérimental.
Nous demandons  que l’année 2013 soit l’année de la publication d’un rapport d’experts afin de travailler sur les bonnes pratiques de prise en charge des patients atteints d’hépatite C avec mise en place d’une stratégie régionale d’acquisition de compétences et d’obtention de moyens visant à démultiplier les lieux de prise en charge de qualité.

ALEXANDRE JOLLlEN

Un livre pour faire réfléchir…

Voila comment je présenterais Le petit traité de l’abandon d’Alexandre JOLLIEN, 14,5 euros aux éditions du Seuil 2012.

Alexandre JOLLIEN est un philosophe qui, handicapé de naissance a vécu 17 ans en institution spécialisée avant que l’on ne découvre qu’il pouvait « apprendre » et qu’il était même plutôt brillant.

Il a rattrapé tout son retard scolaire, décroché brillamment une agrégation de philosophie et a depuis écrit plusieurs livres : L’éloge de la faiblesse (1999), Le métier d’homme (2002), La construction de soi (2006) et Le philosophe nu (2010).

Dans son dernier livre, très facile de lecture et vendu avec un CD audio, Alexandre JOLLIEN nous invite à vivre tout ce que la vie nous offre et redémontre à tous les matérialistes qui l’ont oublié, que le bonheur n’est pas « accumulation » mais « dépouillement ».

Il nous invite à faire un chemin en chacun de nous. La lecture de ce livre ou son écoute est susceptible d’amener chaque Hépatant à revoir la place de sa maladie dans son parcours de vie.

Je vous offre cette phrase pour méditation si vous le voulez bien : « Le mot bienveillance vient du latin bene volens. Le bénévolat, c’est d’abord le bien des autres. On ne fait pas de bénévolat pour se redorer le blason mais parce que l’on veut le bien de l’autre ». 

Voila une maxime pour les bénévoles et militants de SOS hépatites.

Osez ce livre, lisez-le, offrez-le, ce n’est que du bonheur et validé philo !

PESTE ET CHOLÉRA

Connaissez-vous Alexandre YERSIN ?
Son nom est pourtant passé à la postérité après qu’il eut découvert le bacille de la peste en 1894 et que la communauté scientifique ne donne à ce bacille celui de Yersinia pestis en hommage à celui qui l’avait découvert.
L’automne dernier, Patrick DEVILLE a obtenu à le prix Fémina pour son roman Peste & Choléra, roman à mi-chemin entre le récit d’aventure et la biographie.
On y apprend que le Dr Yersin était un élève de Pasteur et qu’il fut l’un des premiers à exporter à travers le monde l’expérience et l’expertise pasteurienne contribuant ainsi à la création d’Instituts du même nom. L’intelligence de Yersin fut également de découvrir l’arbre à quinquina, de développer la culture de l’hévéa et sa transformation en caoutchouc et d’utiliser les fonds ainsi levés à la recherche médicale en bactériologie.
Ce livre évoque également les luttes de pouvoir entre médecins, démontre qu’il faut parfois partir très loin pour être reconnu un jour en France et nous fait redécouvrir la citation de Christophe Colomb selon laquelle « il n’y pas d’homme qui va aussi loin que celui qui ne sait pas où il va ».
Patrick DEVILLE  rappelle aussi dans ce livre que « ce n’est pas une vie que de ne pas bouger ».
Peut-être peut-on y voir là l’aventure de chaque Hépatant avec sa maladie ou bien encore l’aventure de SOS Hépatites qui tente de nouer des liens à travers le monde entre Hépatants.
Ce livre, publié aux éditions du seuil, compte 228 pages que l’on le dévore sans faim !