HÉPATITE C : RETOUR SUR UN RATIONNEMENT

 A l’occasion de la journée nationale de lutte contre les hépatites à venir (2 juin), nous vous proposons un point récapitulatif concernant les enjeux actuels et la mobilisation de SOS Hépatites concernant l’accès aux nouveaux traitements contre l’hépatite C.

L’arrivée d’agents antiviraux directs actifs sur l’hépatite C a modifié de façon radicale la prise en charge de la maladie avec des traitements plus efficaces et mieux tolérés. Les malades attendaient depuis longtemps ces traitements sans interféron, mais l’espoir de pouvoir traiter toutes les personnes vivant avec une hépatite C s’est rapidement envolé devant les prix des traitements exigés par les laboratoires. L’année 2014 a été un temps fort de mobilisation associative pour alerter les pouvoirs publics sur les conséquences du prix des traitements sur l’accès aux soins. Dans la poursuite de ce travail, le forum national de l’association SOS Hépatites Fédération du mois de mars a constitué un temps fort entre malades et professionnels pour réagir au rationnement mis en place par le Ministère de la Santé et proposer de nécessaires améliorations à la prise en charge de l’hépatite C.

Chronologie d’un rationnement organisé

 Le 19 mai 2014, le 1er rapport d’experts sur les hépatites virales (Rapport Dhumeaux), a établi   des recommandations médicales fortes et innovantes sur l’accès aux nouveaux traitements contre l’hépatite C. Ces recommandations, basées sur des bénéfices individuels et collectifs,  visaient notamment à éviter les complications et l’évolution vers un stade de cirrhose des personnes atteintes et à enclencher l’éradication de la maladie en ciblant prioritairement des populations spécifiques.

Le 22 Juin 2014, le collège de la Haute Autorité de Santé, saisi exceptionnellement par le Ministère de la Santé en raison du risque que faisait peser le coût de ces traitements sur l’équilibre de l’assurance maladie est revenu sur ces recommandations en proposant l’accès aux traitements aux seules personnes à un stade avancé de la maladie. Les malades doivent désormais attendre que l’état de leur foie et de leur santé se dégrade pour avoir accès aux traitements, les perspectives d’éradication de la maladie s’éloignent à grand pas.

L’arrêté du 18 novembre 2014 relatif aux conditions de prise en charge du Sovaldi (Sofosbuvir ®) commercialisé par le laboratoire Gilead vient définitivement doucher l’espoir des malades, balayant les recommandations des experts, validant officiellement l’avis de la Haute Autorité de Santé.

 Le 29 décembre, le Ministère des Finances et le Ministère de la Santé organisent le rationnement par lettre d’instruction. Les prescriptions de ces nouveaux traitements sont désormais conditionnées à l’avis de réunion de concertation pluridisciplinaire, organisées dans des centres experts dont le nombre est limité. Ces centres de référence sont parfois à plus d’une centaine de kilomètres du lieu de vie des personnes et de leurs médecins. Ces mêmes professionnels, qui assuraient le suivi au long cours des malades touchés par les effets indésirables lourds des anciens traitements sont désormais mis sous tutelle.

Le 29 avril 2015, les pouvoirs publics confirment le rationnement des soins par une nouvelle lettre d’instruction.

Les demandes des malades

Les 27 et 28 mars, les militants de SOS hépatites ont organisé un temps d’échange avec l’ensemble des professionnels, réaffirmant le souhait des personnes concernées de participer à la gestion et l’organisation de notre système de santé, en application directe des principes de démocratie sanitaire hautement portés par nos autorités.

Nos échanges, alimentés par les témoignages de personnes concernées et les situations rencontrées par les professionnels ont permis de structurer nos demandes auprès des décideurs et servira de feuille de route pour porter la parole des malades et des soignants et nourrir les actions de plaidoyer de SOS Hépatites Fédération.

Nous avons-entre autres -retenu la nécessité de faire évoluer l’accompagnement des malades pour maintenir dans le soin les personnes désormais en attente d’accéder à ces traitements prometteurs et alerter sur le nécessaire suivi après la guérison virologique espérée. Si les traitements permettent de terrasser le virus, les complications persistent, le cancer du foie doit continuer à être dépisté précocement pour éviter une issue fatale.

L’organisation actuelle des prescriptions des nouveaux traitements contre l’hépatite C, constitue potentiellement une perte de chance pour les malades en opposition à nos principes mêmes d’accès à la santé. Nous alertons les pouvoirs publics sur le nécessaire contrôle du dispositif pour éviter toute discrimination. Les malades doivent être également correctement  informés sur les modalités de décisions de ces prescriptions. Le dispositif doit être contrôlé  pour éviter toute discrimination. Les modalités actuelles d’échanges d’information doivent évoluées pour garantir le secret médical.

De poignants témoignages montrent que le périmètre des prescriptions doit apprécier les situations particulières des malades. Force est de constater qu’il n’existe aucun rationnel (économique, éthique) pour tenir des malades à l’écart du soin. Tout doit être mis en œuvre pour éviter des complications menant à la cirrhose ou au cancer du foie. L’accès aux traitements des personnes en échecs de traitements antérieurs et souffrant de manifestations invalidantes doit d’ores et déjà être apprécié. De nouvelles études ont également montré une perte de chance accentuée pour certains malades avec un accès tardif au traitement. Nous avons également exprimé nos réserves sur les potentielles baisses de coût de ces traitements à venir, actuellement mises en avant pour entretenir l’espoir de futures prescriptions plus équitables.

La vigilance de tous est donc essentielle pour garantir un accès équitable aux soins, à ces nouveaux traitements et nos principes mêmes d’accès à la santé. Les arguments sur les capacités d’absorption de notre système de santé et les évolutions possibles des prescriptions ne viendront répondre à l’ensemble des questions sociétales qui nous sont aujourd’hui posées.

 

 

 

 

 

 

 

 

LES HÉPATITES VIRALES : SE FAIRE DÉPISTER C’EST ÊTRE ACTEUR DE SA SANTÉ, POUVOIR CONTRÔLER OU GUÉRIR DE SA MALADIE.

CARTE ALSACELe 2 juin 2015 aura lieu la

Journée Nationale de lutte contre les Hépatites Virales.

LES HÉPATITES VIRALES :

SE FAIRE DÉPISTER C’EST ÊTRE ACTEUR DE SA SANTÉ, POUVOIR CONTRÔLER OU GUÉRIR DE SA MALADIE

Pour cette occasion, nous vous invitons à nous rejoindre sur les différents stands d’informations que nous organisons à Strasbourg et à Mulhouse.

Vous aurez également la possibilité de vous faire dépister gratuitement (par FibroScan) lors des actions qui se dérouleront au Nouvel Hôpital Civil et à l’Hôpital de Hautepierre de Strasbourg.

Venez nombreux !

Pour toutes les informations cliquez sur ce lien:

http://alsace.soshepatites.fr/2015/05/22/journee-nationale-de-lutte-contre-les-hepatites-virales-2015/

HÉPATITE C, SE DÉPISTER POUR QUOI FAIRE ?

C’est une question que nous avons entendu lors du dernier forum de SOS Hépatites. Cette question peut s’entendre différemment à l’aube de la présentation du rapport d’experts sur la prise en charge de l’hépatite C en 2015.

Depuis 25 ans, dès la découverte du virus de l’hépatite C et la mise au point d’un test de dépistage, la France s’est lancée dans une campagne de dépistage des populations à risque. La progression du dépistage c’est fait parallèlement à celle de l’efficacité des traitements. Mais en 2015, les traitements ne sont accessibles que pour les personnes présentant des lésions hépatiques sévères ou très sévères. Les patients porteurs d’hépatites sévères sont la partie visible et immergé de l’iceberg, ils ont largement été dépistés depuis 20 ans. Aujourd’hui, quand une personne accepte de se faire dépister, si elle est retrouvée porteuse du virus de l’hépatite C, elle n’a qu’une chance sur trois d’être suffisamment atteinte au niveau hépatique pour pouvoir accéder au traitement. Mais peut-on dire qu’accéder au traitement soit une chance ? Il n’est déjà pas simple de se faire dépister du cancer du sein, du colon ou de la prostate alors que les traitements existent et sont accessibles, mais accepteriez-vous de vous faire dépister de l’hépatite C alors que vous avez deux chances sur trois de vous entendre dire que vous n’êtes pas suffisamment malade pour être traité ? Se dépister pour se voir proposer une simple surveillance est-ce un non choix possible ? Pourtant savoir c’est déjà pouvoir et c’est probablement un axe fort pour les programmes d’éducation thérapeutique, organiser et accompagner. En attendant que les prix des traitements baissent pour pouvoir traiter un plus grand nombre de malades.

Alors faut-il faire une pause dans la politique de dépistage ?

La santé publique est-elle dictée non par la science médicale et épidémiologique mais par des contraintes financières ?

L’économie est-elle devenue la seule règle de l’accès aux soins ?

Que devons-nous répondre à cette femme qui nous a dit « J’ai accepté de me faire dépister, et maintenant je sais que suis infectée et contagieuse et l’on ose me dire que les traitements ne sont pas pour moi, je ne vis plus. »

Un dépistage efficace des traitements performants.

Nous devons

SOS BLOG 5

 

 

 

 

Pascal Mélin

MOI, JE VEUX BIEN D’UN FOIE ET DE 2EME CHOIX…

La journée du 29 mai 2015 sera la Journée de présentation du rapport d’experts concernant la prise en charge de l’hépatite C, elle sera suivie le 2 juin par la Journée Nationale de Lutte contre les Hépatites Virales.

Depuis deux semaines, nous vous proposons des témoignages ou des éclairages sur des situations qui risquent bien de ne pas être abordées dans ce rapport d’experts. Nous avons abordé les hépatites aiguës, la situation des adolescents infectés, et celle des rechuteurs.

Je vous propose maintenant de nous pencher sur la situation particulière du don d’organe. En effet à ce jour, lors d’un prélèvement d’organe, il est systématiquement recherché si le donneur est porteur de maladies transmissibles et si cela est le cas, le prélèvement d’organe est refusé, car la transplantation d’organe ne saurait être responsable de la transmission d’une maladie infectieuse. C’est éthique, c’est la loi et un don d’organe doit être absent de toute infection connue. Cela semble évident et pourtant voilà l’histoire d’Hector.

Hector a 69 ans. Il se définit lui-même comme un miraculé. À l’âge de 20 ans, il survit à un accident de voiture grâce aux transfusions. En 1992, on le découvre porteur d’une cirrhose virale C infectée par un génotype 1, et là, deuxième miracle, il guérit avec un an d’interféron uniquement, alors que les chances d’obtenir ce résultat ne dépassaient pas 15%. Pendant 20 ans, il sera suivi régulièrement pour surveiller cette cirrhose que l’on qualifiait de « froide », le processus  de destruction hépatique, le virus C, ayant disparu. Mais Hector se sentait incassable, il se permettait de mettre de l’huile sur le feu que l’on avait éteint. Pour dire les choses clairement, Hector était un buveur excessif, jouant avec le feu qui couvait. Ce qui arriva au bout de 20 ans ce fut la découverte, lors d’un bilan de surveillance, d’un nodule qui s’avérera cancéreux. Hector accepta les traitements de son cancer et il déclara, suite à une proposition de greffe.

« Je suis conscient de la gravité de ma maladie et de mon cancer du foie, mais je refuse une greffe du foie. Comprenez bien, si j’en suis là aujourd’hui, c’est parce que je ne suis pas mort il y a 50 ans grâce aux transfusions et il y a 20 ans grâce à votre traitement. Mais j’ai continué de trop bien vivre, ne respectant pas vos consignes de tolérance vis-à-vis de l’alcool. Alors maintenant, je sais pourquoi j’en suis là, je ne regrette rien. Je sais que je vais mourir dans quelques mois mais par contre, si vous avez un foie de deuxième choix dont personne ne veux, moi je veux bien essayer. »

Stupéfié je demandais à Hector de m’expliquer le fond de sa pensée.

« Et  bien parmi les gens en coma dépassé, qui deviennent donneurs d’organe il doit bien y avoir des gens qui sont porteurs d’hépatite C, et si j’ai bien compris on ne réalise alors pas de prélèvement. Moi, le virus ne me fait pas peur, plutôt que de mourir dans quelques mois je veux bien un foie avec un virus. Car moi, je sais qu’on peut en guérir et je reprendrais un traitement, faites-moi confiance docteur, alors avez-vous un foie de deuxième choix ? »

La démarche était impossible et malheureusement Hector décéda quelques mois plus tard. Le courage et la clairvoyance de cet homme m’ont marqués. Je repense souvent à lui et lorsqu’au dernier congrès, on nous présente les résultats des greffes de foie chez les porteurs d’hépatite C, qui reçoivent un foie sain et le recontamine. Il est maintenant admis que la guérison virologique, malgré la greffe, peut être obtenue dans 90% des cas. Alors, Hector n’avait-il pas raison ?

Ne pourrait-on pas greffer des foies même s’ils contiennent un virus C ?

Et pourquoi pas B ou VIH ?

La question ne vous semble pas éthique ?

Mais qu’en disent les malades ?

Le cytomégalovirus (CMV) est un virus que l’on garde de façon chronique dans notre organisme et qui peut donner des problèmes graves en cas de greffe et d’immunodépression avec un traitement anti rejet. Les équipes de greffes sont toujours vigilantes, si elles doivent  greffer un organe issu d’un patient CMV positif à un patient CMV négatif.

Le risque de transmettre un virus via une greffe est connu et raisonnablement envisagé par les équipes de transplantation, mais ne devons-nous pas revoir nos positions par rapport au foie de deuxième choix comme le disait Hector ?

Et que feront nous des organes d’une personne guérie de l’hépatite C et malheureusement en coma dépassé ?

Nous y réfléchissons…

Pascal Mélin

HÉPATITE C : QUAND LES ANCIENS TRAITEMENTS EMPECHENT L’ACCÈS AUX SOINS…

Voici l’histoire d’un patient plongé dans le monde de l’absurdité hépatologique. J’avais fait la connaissance de Monsieur Durand il y a 20 ans, il était alors porteur d’une hépatite C de génotype 1 et avait 45 ans. À cette époque, nous avions réalisé une biopsie hépatique qui montrait que le patient était pré-cirrhotique. Un traitement par interféron–ribavirine lui avait été proposé mais le patient était effrayé devant les effets secondaires du traitement et ce, d’autant qu’il avait déjà présenté une dépression. Après une préparation de plusieurs mois avec le psychologue et l’infirmière d’éducation thérapeutique, le traitement débutait. Dès la fin du premier mois, le virus était indétectable mais la tolérance était médiocre, nécessitant un arrêt de travail prolongé. Malgré toutes les embûches du parcours, Monsieur Durand s’accrochait et nous espérions avec lui sa guérison. Malheureusement, dès la fin du premier mois de surveillance post traitement le virus était réapparu signant la rechute.

Monsieur Durand a eu énormément de mal à accepter cette rechute, nous accusant de lui avoir fait tout perdre, sa famille l’avait abandonné et ses collègues de travail, informés de sa maladie, le rejetaient. Je ne le reverrai pas pendant 10 ans en consultation. Je pensais à lui à chaque fois que l’on évoquait en congrès les malades perdus de vue.

Il y a quelques mois, son nom était sur la liste des consultants de l’après-midi. J’étais tendu, ne sachant si je devais me réjouir ou être inquiet ? Les rechuteurs étaient de très bons candidats aux nouveaux traitements sans interféron et on pouvait presque être sûr d’obtenir une guérison, mais quel serait son état d’esprit ?

J’arrivais dans la salle d’attente, Monsieur Durand était là.

– Bonjour, Monsieur.
– Bonjour, Docteur.
– Je suis content de vous revoir, cela fait déjà quelques années que nous ne nous étions pas vus, comment allez-vous ?
– Je viens pour le nouveau traitement de mon hépatite C, il parait qu’il y a eu de gros progrès ? Mais je vous préviens je ne veux plus de biopsie.
– Ne vous inquiétez pas, il n’y plus besoin de biopsie, nous avons d’autres techniques. Et oui, les traitements sont maintenant sans interféron, uniquement des comprimés et ne durent que quelques mois. Mais nous allons d’abord refaire le point sur vos lésions.

Nous avons refait un bilan complet à Monsieur Durand et là on découvrait une élastométrie hépatique évaluée à 5,8 Kpa au FibroScan et une fibrose F1 à l’évaluation par des tests biologiques. Un nouveau rendez-vous de consultation était fixé avec le patient pour faire une synthèse de tout son bilan et définir ensemble une conduite à tenir. Le jour était venu…

– Bonjour, Docteur. Depuis notre dernière rencontre j’ai réfléchi et je suis prêt et ma femme également, le plus tôt sera le mieux.
– Très bien, Monsieur Durand. Et bien, j’ai une bonne et une moins bonne nouvelle pour vous. Commençons donc par la bonne. Avant votre premier traitement vous étiez pré-cirrhotique en stade F3 et maintenant plus de 15 ans après, vous êtes F1. C’est grâce à l’interféron que votre fibrose a régressée de façon importante et les règles d’hygiène de vie que vous vous êtes fixées, perte de poids et vigilance sur la consommation d’alcool ont été payants. Par contre, la mauvaise nouvelle c’est que nous ne pouvons pas actuellement vous proposer un traitement. En effet, les nouvelles séquences thérapeutiques sont pour l’instant  réservée aux malades en stade F3 ou F4. Je vous propose donc une surveillance et de mettre le traitement en route dès que cela sera possible.
– Docteur, je ne comprends pas et je suis très déçu. Pour le coup c’est vous qui êtes un non répondeur, vous ne répondez pas à mes attentes. Cela m’a coûté de revenir vers vous et je comptais bien me débarrasser définitivement de ce virus et vous me répondez que je ne suis pas prioritaire. Je ne serai pas assez malade ! Et vous appelez ça une bonne nouvelle ? Pourquoi n’y ai-je pas droit, ça coûte trop cher, c’est inadmissible car j’ai cotisé toute ma vie ? Toutes ces années, où j’ai fait attention non servi qu’à m’empêcher d’accéder au traitement qui pourrait me guérir aujourd’hui. Alors non, je ne veux pas attendre car pour moi, dans ma vie c’est maintenant. Dans 2 ans, je serai trop vieux et je ne suis pas sûr que j’en aurais encore envie si je dois de nouveau me mettre en attente, mieux vous oublier que d’accepter l’anxiété de vivre avec…

Que dire ? Bien sûr les patients rechuteurs à un premier traitement devraient être prioritaires quel que soit leur score de fibrose, il devrait en être de même pour les non répondeurs. Il faut absolument tenir compte du parcours des patients et pas uniquement de leur stade de fibrose.

C’est une revendication que SOS Hépatites porte aujourd’hui.

Pascal Mélin

HÉPATITE C AIGUË : QUE FAIRE ?

En 2015, il y aura 3 000 à 4 000 nouvelles contaminations par le virus de l’hépatite C. Il y aura certes quelques contaminations nosocomiales mais 80% de ces nouvelles contaminations seront dues à l’usage de drogue. L’hépatite C chronique fait la une de l’actualité médicale. N’y aurait-il plus d’enjeu de santé publique à trouver et prendre en charge les personnes atteintes d’hépatite C aigüe ? Cela est-il acceptable ou non ?

Lors d’une hépatite aigüe, moment du contact de l’organisme avec le virus de l’hépatite, dans 30% des cas le patient présente une guérison spontanée et dans 70% des cas le virus reste présent au-delà de 6 mois, on parle alors d’hépatite chronique. Les études sont formelles, un traitement par interféron pégylé et ribavirine permet d’obtenir 90% de guérison en phase aigüe alors que les résultats chutent à moins de 50% (en moyenne) si on attendait le passage en chronicité. Il y avait donc un intérêt à découvrir et traiter les hépatites aigües.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui ! Puisque les nouveaux traitements permettent d’obtenir 90% de guérison. Il n’y a donc plus de perte de chance à attendre ! Traquer les hépatites aigües ne serait plus un enjeu de santé publique ? Et majoritairement, ce ne sont que des usagers de drogue, non ? Les hépatologues ont d’autres chats à fouetter.

Les personnes face à une situation d’hépatite aigue, doivent-elles attendre ou pourraient-elles bénéficier de traitement hyper court ?

Nous espérons que cette question sera abordée lors des recommandations de l’AFEF ce 29 mai : faut-il être toujours à l’affût des hépatites aigües ? Comment les dépister et comment les prendre en charge?

Pascal Mélin

HÉPATITE C & LES ENFANTS ?

Le 29 mai prochain se tiendra une conférence d’experts sur le thème comment traiter l’hépatite C en 2015 ? SOS Hépatites sera vigilante et présente à cette réunion, mais pour la préparer nous vous proposerons plusieurs témoignages de malades qui risquent d’être oubliés.

Commençons par évoquer la situation des enfants contaminés par le virus de l’hépatite C. Historiquement, il y avait des enfants contaminés par des transfusions rendues nécessaires par des gestes chirurgicaux dans les premiers mois de vie. Pourtant en 2015, (grâce à la sécurité transfusionnelle) les enfants porteurs d’hépatite C sont essentiellement contaminés à leur naissance et infectés par leur mère, car l’hépatite C se transmet de la mère à l’enfant. Une femme porteuse chronique du VHC a 3% de risques de  contaminer son enfant à la naissance.

Dans les années interféron/ribavirine, les enfants n’accédaient pas aux traitements car l’interféron ralentissait la croissance. Il fallait donc attendre la fin de l’adolescence pour faire un bilan et éventuellement traiter les enfants et le tout, avec l’autorisation de soins parentale.

Il y a quelques jours, j’ai rencontré Céline 13 ans, porteuse d’une hépatite C, contaminée par sa mère à sa naissance. Il y a 11 ans, j’avais fait connaissance de sa maman en cours de grossesse, j’avais largement insisté sur le faible risque de contamination, 3 %, elle m’avait répondu que ce risque lui avait semblé important et énorme. Je lui avais alors promis que même en cas de contamination nous pourrions traiter son enfant dans les années à venir. Avais-je été rassurant ? Malheureusement, Céline s’est contaminée et a grandi avec le virus de l’hépatite C. Pendant que la petite Céline grandissait, j’avais revu sa maman que nous avions alors traitée dans le cadre du programme d’éducation thérapeutique et, heureusement, elle avait pu guérir.

Il y a quelques jours, Céline est revenue en consultation avec sa grand-mère pour refaire son bilan. Pourquoi sa mère n’était pas là ? Etait-ce trop dur pour elle ? Ou simplement les aléas de la vie ? Lorsque je demandais à Céline comment elle vivait avec son virus, elle répondait qu’elle avait depuis son plus jeune âge appris à se méfier de son propre sang en mettant des pansements en cas de blessures et à ne le dire à personne, mais elle me racontait que récemment, elle s’était présentée à l’infirmerie de son collège et avait dû dévoilé son hépatite C, et là surprise ! L’infirmière lui avait alors reproché de ne pas l’avoir dit plutôt ! « Était-elle consciente des risques qu’elle faisait courir aux autres ? » Mais oui bien sûr, car elle a grandi avec cette interrogation.

Nous avons bien sûr réalisé un bilan complet et une évaluation de son atteinte hépatique mais que vais-je lui dire ? Céline est maintenant une jolie adolescente mais elle garde des souvenirs effrayés de l’année de traitement de sa mère. Vais-je lui dire que si elle a de la chance elle pourra être traitée c’est-à-dire avoir une atteinte hépatique sévère (supérieure à F2) ou bien avoir une hépatite minime et attendre encore car elle ne sera alors pas dans les indications de traitement ?! Mais que dire alors à cette jeune fille avant son entrée en sexualité ? Quid des transmissions sexuelles « exceptionnelles » ? Comment dire à un compagnon que l’on est porteuse du VHC ? Comment projeter une grossesse ? Ai-je le droit de lui dire que ce n’est pas grave de contaminer son bébé ?

ET SI LES ADOLESCENTES INFECTÉES ETAIENT PRIORITAIRES DANS L’ACCES AUX TRAITEMENTS INDEPENDAMMENT DE LA SÉVÉRITÉ DE L’INFECTION ?

Cette situation est exceptionnelle ? NON ! Avec plus de 100 000 naissances par an et avec 1% des mamans infectées par le VHC cela fait entre 800 et 1000 mères infectées et donc en situation à risque de transmission. Avec 3% de risques, ce sont donc chaque année 20 à 30 enfants qui vont être contaminés !

Nous appelons de nos vœux les études d’accès aux soins des adolescents et des enfants puisque les nouveaux traitements semblent le permettre. Le rapport d’experts du 29 mai en parlera-t-il ?

Pascal Mélin

Pour  en savoir plus, vous pouvez relire le blog « Jamais sans ma fille », car rien n’est simple.

JOURNÉE MONDIALE POUR LES ORPHELINS DU SIDA…

Le 7 mai sera cette journée ! Le SIDA continue de tuer un papa ou une maman chaque minute sur la planète. De nombreuses actions sont menées pour soutenir les malades, promouvoir le dépistage et favoriser l’accès aux soins. Mais qui se préoccupe des enfants orphelins par le SIDA avec parfois, comme seul souvenir de leur mère, le VIH ?

C’est à la fin des années 80 que la communauté internationale prend conscience que l’épidémie de SIDA fait des millions d’enfants des orphelins du SIDA. Actuellement, ce sont encore 250 000 enfants qui se contaminent en naissant chaque année et, c’est toutes les minutes qu’un enfant est orphelin du SIDA. On a l’impression qu’on a fait de gros progrès dans la mondialisation de l’accès au traitement, mais cela n’est vrai que pour une personne sur trois vivants avec le VIH.

Albina du Boisrouvray, Fondatrice de FXB & Présidente d’honneur (Photo officielle du site FXB)

Dans les années 80, plusieurs personnes se sont engagées contre la pauvreté et les ravages du SIDA. On n’a retenu que les gens célèbres mais connaissez-vous Francois Xavier Bagnoud ? Il souhaitait parcourir le monde pour redonner aux enfants futur et dignité en retissant des liens sociaux. Malheureusement, il est décédé dans un accident d’hélicoptère au Mali. Mais ces parents, Albina du Boisrouvray et Bruno Bagnout fondent en 1989 l’association Francois-Xavier Bagnout (FXB) qui reprendra la défense et l’accompagnement des enfants orphelins du SIDA.

Cette mission est noble et respectable, elle est même reconnue par la journée du 7 mai qui est la Journée mondiale des orphelins du SIDA. Mais pourquoi ne pas être allé au bout de la réflexion en considérant aussi les hépatites B et C ? Avec plus d’un million de décès par an pour chacun de ces deux virus, ils sont responsables de milliers d’orphelins chaque année.

À l’heure où les associations luttant contre le VIH voient leur mission s’étendre aux hépatites virales, il faut penser à tout et à tous. Ebola, hépatites, SIDA et toute infection virale ne doivent plus être une cause pour devenir orphelin en 2015.

Pascal Mélin

SOS HÉPATITES SERA LA SEULE ASSOCIATION À FȆTER LES 40 ANS DU VACCIN CONTRE L’HÉPATITE B ET À RENDRE HOMMAGE A SON DECOUVREUR : LE PR PHILIPPE MAUPAS.

Monsieur le Président vous vous êtes trompé…

Le vaccin contre l’hépatite B, premier vaccin contre le cancer.

Lors de la présentation du troisième plan cancer, mardi 4 février 2014, François Hollande déclarait devant la presse :

« Le cancer du col de l’utérus est le seul – je dis bien le seul – pour lequel il existe un vaccin, et pourtant, en France, ce vaccin n’est administré qu’à 30 % des jeunes filles. C’est une source nouvelle d’inégalités. Certes, je connais les réserves que suscitent des campagnes mal conçues de vaccination mais ce vaccin a fait la preuve de son efficacité. Aussi, d’ici cinq ans, nous doublerons la couverture vaccinale contre le cancer du col de l’utérus, ce qui permettra son éradication à terme ».

Cette déclaration a été passée sous silence. Les vaccins contre le papillomavirus sont certes efficaces et protègent contre le cancer du col de l’utérus, qui est le plus souvent induit par ces virus. Cependant, le premier vaccin qui permet de protéger contre un cancer, le cancer du foie, est celui contre le virus de l’hépatite B. De surcroit, il s’agit d’une découverte française du Professeur Philippe Maupas, virologue, en 1976. Il y a donc presque 40 ans que nous avons un vaccin qui protège contre le cancer.

Philippe Maupas, inventeur du premier vaccin contre l’hépatite B, a un parcours atypique. Il a toujours été un admirateur de Pasteur et il commence ses études par une école vétérinaire. Il devient ensuite microbiologiste à l’institut Louis Pasteur à Paris. Il poursuit par un doctorat de pharmacie et passe également un doctorat en science. En 1974, il effectue un stage de 6 mois aux USA dans le service du Dr Baruch Samuel Blumberg, lauréat du prix Nobel de médecine en 1976 pour son identification du virus de l’hépatite B. Cette découverte de Blumberg ouvre la voie à la réalisation d’un vaccin. De retour en France, Philippe Maupas se lance sur la piste d’un vaccin et entreprend des études de médecine. Il est certain qu’un vaccin peut être produit et il a prouvé que le vaccin permettrait d’éviter bon nombre de cancer du foie. Sa thèse porte sur un sujet qui le passionne : « Hépatite B et cancer primitif du foie ». En 1975, le vaccin est découvert et son innocuité démontrée. Dès le mois d’octobre il s’inocule le vaccin et le propose au personnel médical. Il rencontre l’OMS et demande la mondialisation du vaccin. Dès 1977, il devient doyen de la faculté de pharmacie de Tour. En 1978, il entreprend un programme de vaccination au Sénégal où il trouve la mort dans un accident de la route le 4 février 1981 à l’âge de 41 ans. Avec quatre doctorats, une invention historique et plus de 150 publications internationales, il a permis de sauver des millions de vie et aurait tout naturellement dû recevoir le prix Nobel de médecine.

Merci monsieur Maupas, les Hépatants n’oublient pas ce qu’ils vous doivent : vous avez fait le lien entre l’hépatite B et le cancer primitif du foie et êtes le premier à avoir mis au point le vaccin contre les deux.

Les semaines, européenne (20 au 25 avril 2015) et mondiale (24 au 30 avril 2015) de la vaccination doivent être le temps de rappeler notre attachement à la vaccination. Le vaccin est une protection individuelle pour un bénéfice collectif.

Mais en 2015, l’individualisme sanitaire prévaut. Il est loin le temps de la variole ou l’état rendait obligatoire et légale la vaccination en assumant toutes les conséquences pour faire disparaitre ce fléau. Plus aucun politique n’oserait défendre une telle thèse. Les derniers vaccins obligatoires sont même remis en cause. Des parents s’opposent à la vaccination de leurs enfants. Le conseil constitutionnel a réaffirmé récemment le caractère légal et obligatoire de certains vaccins en rappelant que personne ne pouvait s’y soustraire. La seule saisie du conseil sur ce sujet pose cependant question.

A l’image d’autres pays européens, nous devons reprendre notre bâton de pèlerin et être pédagogiques auprès du grand public pour expliquer le bien fondé des vaccins.

Pascal Mélin, Président de SOS hépatites Fédération

Nous regrettons qu’aucun journal n’est voulu faire paraitre cette tribune-hommage.

PRÉVENTION ALCOOL : IL Y A ENCORE DES PROGRÈS À FAIRE…

L’alcool fait de plus en plus de ravage depuis la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, tous les élèves reçoivent pendant leur scolarité une information sur le risque alcool.

C’est ce que ma fille de 15 ans vient de vivre dans son collège. Une séance de prévention lui a été proposée. Et comme toutes les équipes de prévention, elles cherchent comment capter l’attention des adolescents et comment faire passer au mieux les messages de prévention. Le dernier outil utilisé consiste en des lunettes déformantes qui sont censées retracer la vision perçue lorsqu’on est en état d’imprégnation alcoolique.

De retour de l’école ma fille m’a appelée pour me demander si c’était bien comme ça qu’on voyait le monde quand on avait bu. Depuis, elle souhaite expérimenter une ivresse pour confirmer ou infirmer ce qu’on lui a dit. Une telle action est-elle réellement une action de prévention ? Nous devons mettre en place des programmes de réduction des risques alcool mais il y a encore du chemin…

Pascal Mélin

L’HÉPATITE B EST LA MALADIE SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLE LA PLUS REPANDUE AU MONDE.

 

AFFICHE HBTout étre humain devrait étre vacciné avant son entré en sexualité et donc avant de s’exposer a ce virus 100 fois plus contagieux et transmissible que le VIH.

SOS Hépatites le rappelle avec une affiche

« Contre l’hépatite B, y a pas de plan B : vaccinez-vous ! »

Une bonne raison de se dépister ?

Si votre enfant a par contre été vacciné contre l’hépatite B, l’adolescence est le bon moment pour refaire le point sur les IST (infection sexuellement transmissible) en favorisant le débat avec un médecin par exemple ou en lui donnant des documents compréhensibles et adaptés à son âge, sans l’effrayer non plus. Il sera alors intéressant de faire contrôler par une simple prise de sang que le vaccin est efficace et protecteur. En cas de réponse négative le médecin pourra alors reprendre une nouvelle séance de vaccination. Attention il n’y a rien de pire de se croire protégé alors que l’on ne l’est pas !

Hépatite B : s’informer c’est déjà se protéger, se vacciner c’est la sécurité.

Pascal Mélin

 

 

LES PROGRAMMES DE VACCINATION EN AFRIQUE DE L’OUEST…

Une  réunion exceptionnelle s’est tenue en mars dernier à Lomé sous l’égide de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en partenariat avec UNICE, GAVI Alliance, la fondation Bill et Melinda Gates. Cette réunion était ouverte par le Premier Ministre togolais Monsieur Séléagodji Ahoomey-Zunu. Des représentants de toute l’Afrique de l’ouest et de l’Algérie étaient plus de 150  à échanger et débattre sur les résultats de l’année 2014.

Il existe à l’échelon de l’Afrique de l’ouest un plan stratégique régional qui se déroule de 2014 à 2020 qui se fixe  comme objectif ambitieux de pouvoir à l’horizon 2020 assurer une couverture vaccinale universelle. Pourtant ce sont encore 2,5 millions d’enfants de moins de 5 ans qui meurent chaque année d’une maladie qui aurait pu être évitée par vaccination. Dans les dernières années, on a vu des foyers de poliomyélite ressurgirent en Afrique par défaut de couverture vaccinale. La représentante de l’OMS au Togo le docteur Lucile Imboua a déclaré :

« La vaccination a permis d’éradiquer la variole, de réduire de 99% l’incidence mondiale de la poliomyélite depuis 1988 et de faire reculer de façon spectaculaire des maladies comme la rougeole, la diphtérie, la coqueluche, le tétanos, l’hépatite B et dernièrement enfin et pas des moindres, la méningite à méningocoque A »

Les pays riches semblent bien des enfants gâtés de la vaccination en la remettant en cause. Trop de personnes en 2015 rechignent à vacciner leurs enfants. On est choqué lorsqu’on met en parallèle la semaine européenne de la vaccination avec la semaine mondiale. Comparons leurs objectifs : l’accès à la vaccination contre la réalisation des rappels ?

La vaccination est un droit essentiel qui devrait être ajouté à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen.

Ils persistent de nombreux problèmes à surmonter, respect de la chaine du froid, traçabilité, priorisation sanitaire nationale, budget …les épidémies du virus ébola ont remis l’accent sur ces difficultés .Le premier ministre togolais a déclaré :

« La vaccination constitue une composante essentielle du droit humain à la santé et une responsabilité individuelle, collective et gouvernementale. Le rôle essentiel de la vaccination dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement est largement reconnu au sein de la communauté mondiale. Aussi les bénéficiaires de la vaccination sont-ils de plus en plus nombreux. L’accès et le recours aux vaccins parmi des tranches d’âge autres que les nourrissons, pour leur part, se développement actuellement »

Il faut pourtant donner un coup de chapeau à l’Algérie qui à l’échelon africain se présente comme un pays riche avec une politique sanitaire exemplaire. Les représentants algériens ont participé à ces travaux pour aider au mieux les autres pays.

Pascal Mélin