LA CIRCULAIRE DU 23 DECEMBRE 2009

Il y a des circulaires qu’il vaut mieux connaitre, que l’on soit malade ou soignant… C’est le cas de cette circulaire publiée en 2009 et vraisemblablement passée inaperçue ou presque. Pourtant il est important de la dépoussiérer et de lui rendre sa juste place dans l’arsenal des mesures favorisant l’accès aux soins.

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Si vous êtes assuré social, les différents examens prescrits sont pris en charge par la sécurité sociale et par l’assurance complémentaire. Pourtant si des examens ne sont pas inscrits dans la nomenclature, cela signifie qu’ils ne sont pas encore reconnus par l’assurance maladie et donc non remboursés. La mise au point de nouveaux examens biologiques nécessite en moyenne 2 à 3 ans avant qu’ils ne soient enregistrés à la nomenclature mais sont néanmoins prescrits à juste titre par le corps médical.
C’est le cas pour des pathologies rapidement évolutives comme les hépatites et les maladies du foie et l’on peut citer par exemple les tests non invasifs de fibrose, le génotypage de l’hépatite B, la charge virale de l’hépatite delta, le dosage de ribavirine , le génotypage de l’IL28B ou encore les recherches génétiques de l’hémochromatose.

Certains d’entre vous se souviennent peut-être avoir reçu à leur domicile une facture avec parfois même des menaces de poursuite, de mise en recouvrement ou encore avoir été dans l’obligation de faire l’avance avant l’examen.

La circulaire N°DHOS/F4/2009/387( cliquez sur le lien en gras) du 23 décembre 2009 relative aux règles de facturation des actes de biologie et d’anatomo-pathologie non inscrits à la nomenclature des actes de biologie médicale est venu poser certaines règles concernant leur facturation. A la lecture de cette circulaire vous apprendrez que des modalités de prises en charge très précises existent, à la seule condition que vous soyez assuré social.

Il s’agit là d’une petite révolution qui va dans le sens des usagers et de l’accès aux soins pour tous et l’on comprend mieux qu’il n’en ait point été fait de publicité ! Il est cependant important que professionnels de santé et malades aient lu cette circulaire afin de la faire valoir même si certaines zones d’ombre subsistent quant au remboursement en fonction de certains prescripteurs.

Malgré tout, n’hésitez plus, lorsqu’on vous annoncera la non prise en charge d’actes de biologie ou d’anatomo-pathologie hors nomenclature par la sécurité sociale à faire valoir vos droits en invoquant cette circulaire et pourquoi pas à boycotter les laboratoires tentés de fractionner les ordonnances en pratiquant les seuls examens remboursés par la sécurité sociale et laissant au voisin le soin de réaliser les autres…

Il peut arriver que chacun ait une lecture différente de l’accès aux soins… il n’empêche que la loi est la même pour tous.

Pascal Mélin

JE SUIS CONTRE LES SALLES DE SHOOT !

Je suis contre les salles de shoot, car ces mots sont juste… inacceptables.
Par le simple fait que l’expression « salle de shoot » est démagogique et ne laisse pas celui qui écoute, réfléchir et se faire sa propre idée. L’image d’une « salle de shoot » contient en son sein le refus et le blocage.

Le shoot résume à lui seul ce que la population rejette, à savoir l’injection de drogues et non la personne qui a ce comportement. Mais si l’on vous dit Salle de Consommation à Moindre risque (SCMR), cela ouvre au débat et à la discussion non ? On parle alors d’un comportement et d’un usager, et d’un usager que l’on peut éduquer aux risques. Vous voyez bien que le concept de Réduction Des Risques (RDR) se situe alors dans le prolongement de cette réflexion.

Alors comprenez ma colère quand des journalistes affirment ouvrir le débat en titrant sur les salles de shoot car c’est tout le contraire qu’ils réalisent. Parler de salle de shoot c’est prendre parti et stériliser à la fois l’information et le débat. Il n y a alors pas de place pour les infections virales ni même pour décrire un parcours et proposer une rencontre avec des soignants pour des soins. Et que dire du mot expérimentation que l’on oublie, les SCMR rentre dans le cadre d’un processus expérimental qui permettra de prendre une décision politique à la fin de se programme.

Autre exemple d’actualité, le « Mariage gay » avec son cortège de mots traduisant tant de représentations qui opposent et provoquent les affrontements. Pourtant, si l’on parle de « Mariage pour tous », le débat peut s’ouvrir alors naturellement, sans parti pris car notre inconscient n’est pas pollué par des représentations préétablies.

Vous l’avez compris, les mots influencent les débats qu’ils ouvrent. Si l’on vous qualifie de « non répondeurs au traitement » de votre hépatite C alors que votre charge virale est passée de 1 million à 100 000 virus, le technicien dira qu’en trois mois, votre virémie n’a perdu qu’un log, et pourtant l’optimiste pourrait souligner que 90% des virus ont disparu ! Combien de personnes atteignent 90% de leurs objectifs dans d’autres champs ? Celles qui ne les atteignent pas sont-elles pour autant qualifiées de non répondeurs ? Diriez vous que des soldes à 90% ne répondent pas à votre attente ?

Alors restons vigilants pour ne pas laisser le germe du non débat s’immiscer en nous. La maladie doit nous inciter à conserver un esprit critique même si chacun est en droit de garder son libre arbitre au sujet des SCMR, du mariage pour tous, ou bien encore sur la réponse au traitement, ou les soldes.

Et le vrai non répondeur ne pourrait-il pas être le professionnel de santé qui ne prend pas le temps de répondre aux questions que lui pose le patient ? Toutes ces questions, si l’on accepte le débat sans parti pris, sont passionnantes et c’est ce que SOS hépatites a tenté de faire à travers cette dernière campagne et l’ouverture d’un forum de discussion sur doctissimo.

Plus j’y pense, plus je suis favorable à l’ouverture et à la généralisation des SCMR dont j’attends l’évaluation. Mais viscéralement je reste contre les salles de shoot !

Pascal Mélin

POURQUOI FAUT-IL TRAITER LES USAGERS DE DROGUES ?

Traiter l’hépatite C chez les patients usagers de drogues reste fondamental.
En 2011, l’équipe du Dr Martin a publié dans the JOURNAL of HEPATHLOGY (j.hépatol), une modélisation sur la transmission de l’hépatite C chez les usagers de drogues en Ecosse. Cette équipe démontrait ainsi que traiter chaque année 10 usagers de drogues sur 1000 infectés, permettait 10 ans après de faire baisser la proportion d’usagers de drogues infectés d’au moins 13 voire 31%. Ces résultats prenaient en compte les possibilités de réinfection. Cette modélisation est intéressante car elle part d’un accès aux soins très modeste et nous rappelle que « faire peu » c’est déjà « faire ». En effet, en termes d’hépatite C chez les usagers de drogues, tordre le cou à certaines idées reçues doit rester un combat de tous les jours si l’on veut continuer de faire baisser le taux de prévalence de cette infection dans cette population pour laquelle on continue de croire et de véhiculer l’idée que traiter les usagers de drogues n’a pas d’intérêt à cause des réinfections.

Il ne serait donc pas éthique de ne pas traiter les usagers de drogue et c’est ce que SOS hépatites dénonce depuis 15 ans. Mais l’équipe du Dr Martin va plus loin encore. Toujours à partir d’une population écossaise et en considérant que le taux de patients usagers de drogue infectés pourrait varier de 20 à 40%, le rapport coût-efficacité a été modélisé. Pour cela, un modèle de transmission dynamique du virus de l’hépatite C a été développé. Trois groupes ont été comparés : les usagers de drogue actifs par voie intraveineuse, les ex-usagers de drogue ou les non usagers. Il ressort de cette étude que malgré les réinfections possibles, le traitement des usagers de drogue actif est l’option la plus coût-efficace avec des ratios coût-efficacité par année de vie gagnée allant de 521 à 2539 £.
Le traitement de cette population dite « particulière » reste donc un choix épidémiologique prioritaire et nécessite le développement de prises en charge spécifiques autour des lieux de vie. Aujourd’hui il est nécessaire de développer des programmes d’accès aux soins et d’éducation pour les usagers ainsi que des programme de réductions des risques pour éviter tout risque de recontamination.

C’est la encore une revendication de SOS hépatites de longue date.

Pascal Mélin

Pour en savoir plus :
Martin, et collaborateurs : Can antiviral thérapy for hépatitis C réduce the prevalence of HCV among injecting drug user populations ? A modeling analysisof its prevention utility. J Hepatol. 2011 Jun ;54(6) :1137-44.
Cost-effectiveness of hépatitis C virus antiviral treatement for injection drug user populations. Martin nk and all. Hepatology. 2012 Jan;55(1):49-57.

Le SIDA DOIT BEAUCOUP A L’HEPATITE B…

Le Sidaction 2013 se termine, vous pouvez continuer à faire un don par internet mais n’oubliez pas les malades atteints d’hépatites. Je ne prêche pas pour un hepat-action mais pour un vir-action sans mauvais jeu de mot.

Cette année et ce malgré la crise, les dons ont augmenté, la solidarité a donc toujours sa place et fonctionne encore en France. Merci.

Pour clore cette action de lutte contre le virus du SIDA, connu depuis 31 ans, il est intéressant pour nous tous de faire le lien entre les virus des hépatites et le VIH.

Reprenons l’histoire de la ville de San-Francisco. Cette grande agglomération de la côte ouest des Etats Unis a toujours abrité une grande communauté d’homosexuels masculins parfaitement intégrés.

Cette particularité est à la fois culturelle et historique. Grâce à un niveau socio culturel élevé les homosexuels de San-Francisco se sont régulièrement interrogés sur leur état de santé. C’est dans ce contexte qu’en 1970 une épidémie d’hépatite B fait son apparition à San-Francisco. Les représentants des usagers ont alors interrogés les médecins hospitaliers pour travailler aux messages de prévention et à la surveillance de la maladie. C’est ainsi qu’en 1976 usagers et médecins créent la cohorte d’homosexuel de San Francisco et proposent à tous les patients de la communauté qui le souhaitent de venir se faire dépister par un bilan biologique tous les 6 mois et de garder leur sérum dans des congélateurs.

Qu’avons-nous tiré de la mise en place de cette cohorte ?

Premièrement, ayant compris l’importance de cette cohorte, les homosexuels se sont présentés par centaine pour demander à être dépistés et suivis.

Deuxièmement, cette cohorte a montré que les messages de préventions prodigués et diffusés par les pairs permettaient de contrôler une épidémie.

Troisièmement, et ce n’était pas prévu, comprendre l’épidémie du VIH jusqu’alors inconnue. Le VIH a été découvert en 1981 et dans les années qui ont suivi, des tests sérologiques ont été mis au point.

Au milieu des années 80, le SIDA était la maladie des 4 H (hémophiles, haïtiens, héroïnomanes et homosexuels).

A cette époque, la communauté homosexuelle de San-Francisco se découvre largement touchée par le SIDA. Spontanément, dès 1984 les usagers et les médecins ressortent les sérums des congélateurs pour comprendre et retrouver quand avaient eu lieu les contaminations et évaluer le temps de latence entre la contamination et le passage en stade SIDA. Et c’est grâce à cette cohorte VHB que l’on découvre que 30% des patients passent en stade SIDA au bout de 7 ans et qu’en moyenne il s’écoulait 10 ans.

Ces résultats furent publiés dès 1986 et ont permis de comprendre l’histoire naturelle du VIH bien avant le suivi prospectif des cohortes européennes qui se mettront en place après.

Pour ce Sidaction 2013, il faut rappeler que 40 millions de personnes vivent avec le VIH en 2013 et que 70 à 80 millions de personnes sont déjà mortes.

Pour ce Sidaction 2013, souvenons nous que la rencontre des malades et des médecins pour travailler ensemble est une source de progrès.

Pour ce Sidaction 2013, souvenons que les patients sont des acteurs primordiaux d’accès aux soins, d’accès à la prévention, de la recherche et de la surveillance épidémiologique.

Il n’y a pas de barrière entre les virus, ne mettons pas de frontières qui n’ont aucun sens. D’un virus à l’autre nous avons tous à apprendre les uns des autres.

Pascal MELIN

Président de SOS Hépatites Fédération.

ÉRIC ABIDAL, FOOTBALLEUR HÉPATANT

Eric Abidal est un joueur de football hépatant.

En effet il y a un an, ou plutôt 352 jours, on apprenait de façon stupéfiante qu’il était atteint d’une tumeur hépatique qui nécessitait une transplantation en urgence en Espagne. Ce brillant footballeur français épousait depuis plusieurs années une carrière internationale qui l’avait amené à être recruté par la célèbre équipe de Barcelone. Il y a un an on disait sa carrière terminée car il semblait impossible, après une greffe du foie et tous les traitements antirejet, qu’Eric Abidal revienne à son meilleur niveau international. C’est pourtant ce à quoi s’est préparé notre footballeur hépatant dans le cadre du championnat national espagnol en jouant les 20 dernières minutes du Barça contre Majorque samedi dernier. Et il a été plutôt convaincant, comme en témoigne le résultat 5:0 ! Dans quelques jours, dans le cadre de la coupe d’Europe, le club de Barcelone rencontrera celui du PSG et nous espérons tous revoir Eric dans un match international.

Ce retour en moins d’un an n’est certes pas habituel après une greffe mais quel formidable d’espoir pour tout ceux qui sont ou doivent être greffés ! Ce « miracle » est en partie dû à la condition physique de ce joueur, ce qui nous amène à dire que quelque soit le stade d’une maladie il est important de maintenir au mieux son capital physique. Lors de ses dernières interviews, Eric Abidal avouait être heureux de reprendre les matchs en compétition tout en ajoutant vouloir venir en aide à d’autres personnes comme lui.
Je ne pense pas qu’il veuille mettre en place un groupe de parole pour les joueurs de foot…
En revanche, s’il souhaite venir en aide aux hépatants ayant les maladies les plus graves c’est avec beaucoup de plaisir que nous l’accueillerons à SOS Hépatites…

Pascal Mélin

RAPPORT D’EXPERTS

SOS Hépatites le réclamait depuis 6 ans déjà ! Et ça y est nous y sommes… la ministre de la santé nous a entendue et a commandé un rapport d’experts sur la prise en charge des hépatites virales B et C.

Depuis plus de 15 ans pour le VIH est publié, tous les deux ans, un rapport d’experts qui a changé de nom au fur et à mesure des coordonnateurs de ce travail, s’appelant rapport DELFRAISSY ou encore rapport YENI. Ces rapports écrits ne remplaceront ni les congrès ou autres réunions et pourront encore moins se substituer aux rencontres entre médecins et malades. Toutefois, ils ont comme principal mérite de fixer à un moment donné les connaissances mais aussi les doutes et les hypothèses permettant aux soignants comme aux soignés de pouvoir exprimer ou échanger sur la base de données nouvelles.

Nous avons eu plusieurs conférences de consensus sur l’hépatite C dont la dernière date de 2002 ainsi qu’une conférence européenne sur la co-infection, mais aucune sur l’hépatite B. Il est dommage qu’il ait fallu attendre l’annonce de la non reconduction du plan de lutte contre les hépatites virales pour s’entendre annoncer la commande d’un rapport d’experts pour les hépatites B et C sous la direction du Pr DELFRAISSY de l’ANRS et confié dans sa réalisation au Pr DHUMEAUX. SOS Hépatites avait pourtant demandé un quatrième plan, un rapport d’experts ainsi qu’une conférence de consensus, représentant à eux trois, des modes de réflexions et d’actions minimales, différentes et nécessaire.

Alors bien évidemment, ce rapport d’experts a pour nous un goût amer et ressemblerait même à un lot de consolation. Tous les malades experts de SOS et militants vont néanmoins se répartir dans les différents groupes de travail pour y porter une parole collective.

Nous voulions un rapport, mais un rapport protégé… par les malades.

Pascal Mélin

TU M’AS FAIT RIRE FABRICE…

Pardonne-moi mais je voudrais partager nos éclats de rire avec nos lecteurs Hépatants.

Nous avions fait connaissance il y a quelques années. Tu t’étais égaré dans des paradis artificiels et te protégeais dans un monde d’alcool. Bien évidemment, cela ne faisait pas bon ménage avec l’hépatite C que tu avais ramenée de ces paradis. Grâce aux traitements de substitution et à la buprénorphine nous avions réussi ensemble à stabiliser ta pathologie addictive, pour toi comme pour ta compagne. Tous les deux vous aviez même accepté de témoigner devant une caméra. Quel courage !

Puis la question s’était posée de savoir qui de vous deux commencerait le premier son traitement contre l’hépatite C mais la gravité de ta cirrhose allait te laisser l’honneur de cette découverte. Le traitement fut dur, effrayant pour ta compagne et malheureusement la rechute arriva dès l’arrêt de ce traitement. Il en a fallu des arguments pour convaincre ta femme de se lancer dans l’aventure d’une nouvelle thérapie ! Pourtant, elle en est sortie gagnante et guérie. Pendant ce temps ta maladie s’aggravait avec plusieurs décompensations de cirrhose et apparition d’ascite. Ensemble nous avions évoqué la possibilité d’accéder à une greffe du foie et tu avais donc pris rendez-vous auprès d’une équipe parisienne même si l’affaire ne semblait pas gagnée au vu de ton parcours. Aussi m’étais-je permis de te donner quelques conseils en te demandant de « te faire beau » et « d’assurer » à cette consultation tout en restant honnête. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je recevais le courrier qui relatait cette consultation : « Cher ami, je te confirme au vu du dossier de ton patient qu’il y a bien là une indication de transplantation hépatique. Toutefois il faudrait retenter auparavant une nouvelle séquence antivirale si cela est possible. Je suis malgré tout inquiet car ton patient a refusé de se laisser examiner. Je reste à ta disposition et te remercie par avance de me tenir au courant… »

Lors de la consultation suivante je te montrais le courrier et t’interpelais sur ce qui c’était passé et la raison pour laquelle tu avais refusé de te laisser examiner. Tu fis alors la réponse suivante: « Effectivement, il ne m’a pas examiné mais c’est de ta faute… Tu m’avais dit de me faire beau pour la consultation et quand je suis arrivé on m’a demandé de me déshabiller et là j’ai refusé catégoriquement car j’étais habillé en cow-boy avec mon chapeau, ma veste à franges, mon jean moulant et mes santiags. Avec l’ambulancier nous étions partis à 4h du matin ; alors à midi si j’avais enlevé mes santiags, mes jambes auraient gonflées et je n’aurais jamais pu les remettre ! C’est la raison pour laquelle je lui ai dit non ! En revanche, il ne m’a pas demandé pourquoi… »

Nous étions alors partis tous les deux dans un fou-rire qui avait fini par inquiéter la secrétaire qui était venue aux nouvelles devant une telle tranche de rigolade.

Tranquillement nous avons repris une nouvelle combinaison thérapeutique que nous avons optimisée car tu savais où tu allais. De plus, ta femme ayant suivi un traitement auparavant te comprenait mieux et était beaucoup plus présente. Et puis le miracle s’était produit : la guérison était là, permettant ainsi à ton foie de se stabiliser et à nous, les médecins, d’abandonner le projet de greffe.

La vie a alors repris le dessus, nous avons pu arrêter le traitement de substitution et tu n’as jamais repris de produit. Avec un comportement stabilisé tu as retrouvé progressivement ta place de père et ta passion, la moto. Tu avais même validé ta formation de moniteur moto école. BRAVO Fabrice !

Mais ta passion dévorante t’a dévorée … au cours d’un été un accident de moto qui t’a emporté bien loin de nous tous.

« Quel gâchis après tout ce qu’il avait fait… », se sont exclamés certains soignants du service. Moi j’ai pensé : « Quels pied de nez et en même temps magnifique gratification à la médecine a-t-il fait ! ».

En effet, n’est ce pas le véritable enjeu de l’éducation thérapeutique que de permettre à un usager de vivre avec sa maladie puis d’en guérir afin d’avoir le droit de mourir non malade voire de sa passion ?

Même si ta mort nous a surpris et laissés dans le chagrin, même si on aurait bien aimé te voir encore dans ton habit de cow-boy avec ton chapeau, ta veste à franges, ton jean moulant et tes santiags, quelle leçon tu nous as donnée !

Merci Fabrice de m’avoir offert ce mémorable fou-rire à ton retour de Paris.

J’aimerais te dire que tu n’es jamais très loin car avec toi j’ai appris.

Pascal Mélin

CO-INFECTION VIH-VHC

En France,  30 000 personnes  sont co-infectées VIH-VHC  même si historiquement ces co-infections étaient liées à l’usage de drogue. On trouve de plus en plus de nouvelles contaminations dans le milieu homosexuel masculin avec une augmentation des infections par un génotype 4.

Les études montrent que nous sommes quasiment  à  1 patient sur 2 présentant un état pré-cirrhotique ou cirrhotique et les cancers du foie explosent ces dernières années.

Il y a donc une urgence à prendre en charge les co-infections VIH-VHC.

Malheureusement les bithérapies (interféron  et ribavirine) avaient déjà beaucoup de mal à s’adjoindre aux trithérapies VIH. Alors comment se passe l’arrivée des anti-protéases  pour l’hépatite C chez les Co infectés ? Il faut se rendre à l’évidence peu de patient co-infecté et infecté par une hépatite C de génotype 1 se sont vus proposer une tri thérapie pour leur hépatite C. Les médecins étaient hésitants et avaient peur des interactions et de perdre l’efficacité sur le VIH.

L’AFEF (Association Française pour l’Etude du Foie) avait dès la mise à disposition du Télaprévir et du Bocéprévir émis des recommandations pour l’accès aux soins des mono infectés par le VHC de génotype 1, à l’époque devant le faible nombre d’étude sur les co- infectés il s’était abstenu de recommandation estimant qu’il ne pouvait se prononcer.

Aujourd’hui les sociétés savantes regroupant l’hépatologie, la médecine interne et l’infectiologie se sont regroupées pour émettre des recommandations sur  les traitements des co-infectés pour leur permettre une double –TRI.

Aujourd’hui la diffusion de ce rapport va permettre d’ouvrir les traitements et leurs accès de façon plus large. SOS Hépatites  se félicite de ces nouvelles recommandations qu’il faut diffuser le plus largement possible et c’est pourquoi nous  les mettons sur notre site. Nous espérons ainsi que tant les malades que les professionnels pourront ainsi venir mettre en doute leurs idées. On ne peut se satisfaire de quelques centres spécialisés dans le traitement des co-infectés avec des co-infectiologues … Il faut que les traitements  dans leur mise en route et leur  suivi  puissent être accessible au plus prêt de chez soi.

Pascal Mélin.

 

L’UTILISATION DES INHIBITEURS DE PROTEASE DU VHC DE PREMIERE GENERATION CHEZ LES PATIENTS CO-INFECTES PAR LE VIH ET LE VHC, DE GENOTYPE 1 ( Cliquez sur le lien)

 

 

LIVRET D’ACCUEIL SOS HÉPATITES

Voici notre livret d’accueil: vous y trouverez un bulletin d’adhésion et de soutien à notre association, une présentation de nos activités ainsi que les coordonnées des associations régionales.

LES SÉRINGUES

Les seringues, à usage médical ou à usage de drogues, sont une cause majeure de l’infection par les hépatites virales. Mais quel est le sens du mot « seringue » ?

Étymologiquement, le mot seringue est lié à la syrinx, autre nom de la flûte de Pan. Mais il désigne aussi le larynx des oiseaux pour les zoologistes. Pour les Grecs, syrinx signifie un roseau taillé et évidé pour en faire une petite flûte. La médecine moderne en garde la syringomyélie, maladie de la moelle épinière dont le canal central se creuse et se dilate pour devenir pathologique.

C’est donc naturellement qu’on gardera le mot syrinx pour désigner un objet qui sert à compresser et à diriger de l’air ou des liquides (les clystères s’administraient avec des seringues).

Mais c’est à Charles Gabriel Pravaz, médecin français orthopédiste (1791-1853) que l’on doit son adaptation a l’injection médicale ; d’abord par voie sous-cutanée pour traiter les plaies, puis par voie intraveineuse ou musculaire pour l’administration de médicaments. Mais si les seringues sauvent des vies, elles peuvent parfois aussi tuer. Les militaires et les truands en ont d’ailleurs fait un verbe « seringuer » qui désigne toute rafale lié d’arme à feu capable de tirer vite et a répétition.

La seringue doit être à usage unique, stérile, utilisée de façon hygiénique et éliminée spécifiquement, sans risque d’accident après son utilisation. Vecteur de contamination chez les usagers de drogues, elle fait l’objet, dans certains pays, de lois qui rendent son accès facile pour éviter les trafics ; mais qui favorisent aussi les programmes d’échange de seringues pour lutter contre les épidémies d’hépatites virales ou VIH, dont elles sont le support de transmission.

Malheureusement en médecine aussi, dans bon nombre de pays, les seringues sont réutilisées sans toujours être décontaminées et stérilisées, devenant des vecteurs de contamination. Dans un rapport de l’Organisation mondiale de la santé datant de 1999, Kane et ses collaborateurs dénonçaient l’estimation des contaminations annuelles pour le VIH, le VHB et le VHC, liées à l’utilisation médicale de seringues dans de mauvaises conditions, à respectivement  80 000 à 160 000 transmissions pour le VIH, 8 à 16 millions pour le VHB et 2,3 à 4,7 millions pour l’hépatite C.

20 millions de personnes sont infectées chaque année par l’un de ces trois virus, faute d’avoir accès à des seringues propres, seringues médicales en nombre suffisant et à usage unique !

De la toxicomanie à l’aide humanitaire, voilà un cri et une revendication forte pour l’accès aux seringues propres. Je n’ai peut être pas le syrinx des oiseaux pour chanter, mais je continuerai de m’égosiller pour faire entendre la voix des hépatants : la seringue ne doit pas peut être un objet de mort – je rêve de de faire disparaitre les dernières seringues donneuses de mort en faisant abolir la peine de mort – qui transmette des maladies. L’accès universel aux seringues stériles et à usage unique est un acte pour la vie !

Pascal Mélin

TU PEUX LE FAIRE ISMAËL

Ismaël est un toxicomane suivi depuis plus de douze ans dans un centre d’addictologie. Depuis plusieurs années, les professionnels de santé savent qu’Ismaël est porteur d’une hépatite C mais seules quelques personnes semblent s’en inquiéter. La plupart tente de le « suivre » mais sans jamais le rattraper.

Son parcours a le chaos d’un usager de drogues passant de la prison à des larcins divers, jouant au chat et à la souris ou essayant peut être tout simplement de jouer à la vie. Il ne « deale »  pas, il dépanne. Il ne se cache pas, il se fait discret. Il ne rechute pas il craque juste un peu. Quand on le prend en flagrant délit de « mensonge »  il sourit et rétorque qu’il a compris qu’on obtient plus souvent ce que l’on veut en mentant plutôt qu’en disant la vérité et que c’est pour nous épargner sa vérité qu’il la modifie.

De faux pas en glissades, l’ensemble de l’équipe est restée disponible, l’accueillant encore et encore en tentant de bâtir de nouveaux projets avec lui.

Et puis un jour Ismaël accepte de faire le bilan de cette maladie du foie qui lui semble si étrangère. En prononçant le mot de cirrhose j’ai alors provoqué un « je ne bois pas je suis musulman, ce n’est pas possible », réponse habituelle et conforme aux représentations individuelles et collectives traduisant que seul l’alcool peut être à l’origine de cette maladie. Il a donc fallu réexpliquer les liens entre cirrhose du foie et hépatite C et, pour la première fois, ce mot d’hépatite a semblé prendre sens et résonner en lui. Puis Ismaël est retourné en prison où il a été  mis en isolement … à cause de ton hépatite C. Les représentations peuvent avoir la vie dure, y compris chez les professionnels de santé !

À sa sortie nous avons repris le relais de son traitement de substitution et Ismaël a alors demandé si nous pouvions tenter de le guérir de cette hépatite. La majeure partie de l’équipe y était opposée compte-tenu de son parcours de vie plutôt chaotique mais deux d’entre-nous étaient prêts à saisir cette « opportunité de soin » puisqu’elle résultait de sa demande.

Le traitement a duré une année, avec des hauts et des bas faits de périodes de reprise de produits interprétées par Ismaël comme étant liées aux effets secondaires du traitement. Mais tous se sont accrochés, le patient comme l’équipe soignante, et 6 mois plus tard le virus était indétectable. Une sacrée revanche après toutes ces années de galère ! À l’annonce de sa guérison, Ismaël nous a confié n’avoir fait que deux choses de bien dans sa vie : guérir de son hépatite et… sa fille. Fort de cette réussite, nous l’avons incité à entreprendre des démarches auprès de l’AFPA (Association nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes) et de reprendre contact avec cette petite fille qu’il n’avait pas vu depuis 6 ans, en insistant sur le fait que finalement tout ceci n’était pas vraiment plus difficile à faire que de guérir de l’hépatite C !

Ismaël a relevé ces nouveaux défis. À ce jour, il ne prend plus de produit, tente de rattraper avec sa fille tout le temps égaré et va de formations en stages, même s’il n’a pas pour autant trouvé un emploi. En attendant, il semble avoir réussi là où tout le monde le pensait perdu.

Pourquoi avoir raconté cette histoire ?

Tout simplement pour insister sur le fait que nous n’avons pas à prédire des combats de l’autre. Du reste, nous pouvons nous demander quel est l’impact de nos prédictions sur les projets, ou tranches de vie des personnes que nous rencontrons, d’autant qu’au fil du temps, la maladie peut prendre sens et devenir une chance pour changer sa vie. Nous ne pouvons donc qu’accompagner, sans céder au découragement, que l’on soit soignant ou encore responsable associatif.

Cet accompagnement démontre qu’il faut réapprendre ou apprendre à prendre soin de soi pour pouvoir accéder aux soins.

Merci Ismaël. Toi aussi tu as plaqué l’hépatite C.

Pascal Mélin