C’est la question à laquelle l’équipe de Cousien a tenté de répondre, grâce une modélisation qui a été publié dans Hépatology en 2015 et qui tenait compte de l’arrivée des nouveaux traitements.
Scénario 1 :
Si on s’en tient à la stratégie de dépistage et de traitement actuelle (2015) des usagers de drogue(UD) on comptera encore 24 % des usagers de drogue contaminés par l’hépatite C. On doit pouvoir faire mieux, mais quelle stratégie adopter ?
Scénario numéro 2 :
En plus de la stratégie actuelle, on réduit le temps entre la contamination et le dépistage. L’objectif est de le ramener à 6 mois contre 15 à 18 mois actuellement. Cela nécessite de dépister plus régulièrement. Cette stratégie n’aurait aucun effet avec toujours 24 % UD contaminés dans 10 ans.
Scénario numéro 3 :
Autre hypothèse en plus de la stratégie actuelle, on tente de réduire le temps d’accès aux soins à 6 mois contre 2,6 ans actuellement, ce qui devrait limiter les malades perdus de vue à 5 % par an, contre 13,8 % par an actuellement. Cette stratégie ne serait guère efficace, car on compterait encore 24 % d’UD encore contaminé à 10 ans.
Scénario numéro 4 :
Vous allez me dire la bonne stratégie, c’est 1+2+3. À la stratégie actuelle, on réduit le temps de dépistage et le temps d’accès aux soins. Et bien non ! Cette étude prédit qu’il y aura toujours dans 10 ans 24 % UD infectés
Scénario numéro 5 :
Il faut donc envisager d’autres hypothèses qui ne soient plus basées sur le temps. On propose alors simplement une amélioration de l’adhérence conformément aux études actuelles. Cela encore n’a que peu d’influence 22 % des UD resteraient contaminés à 10 ans.
Scénario numéro 6 :
On reprend la stratégie actuelle et on étend les traitements à tous les malades indépendamment de leur score de fibrose. C’est le principe de l’accès universel, qui n’était pas acquis en 2015. Et là, on voit enfin un effet significatif avec une chute à 11 % des UD infectés à 10 ans. De telles études de modélisation ont surement pesé lourd dans les choix politiques de 2016. En effet, c’est bien l’accès aux soins pour tous qui est les plus efficace pour faire diminuer l’épidémie d’hépatite C chez les usagers de drogue.
Scénario numéro 7 :
Quel serait le résultat de l’accumulation des différentes stratégies ? On s’attendrait à ce que les trois premières hypothèses qui étaient inefficaces n’apportent rien… Et bien non! L’élargissement des indications, la réduction du temps de dépistage, l’amélioration de l’accès aux soins, l’amélioration de l’adhérence permettent tous ensemble de passer de 11 % à 7 % d’UD infectés a 10 ans.
Il semble bien que le traitement universel soit l’étape fondamentale pour rendre les autres actions opérantes. Mais au-delà de cette étude il y a bien un message de santé publique et de politique sanitaire. L’accès au traitement universel est 0 portée de main… Mais, il faudra continuer. L’accès aux soins universel était une décision politique, mais l’amélioration du dépistage, l’accès rapide ou bien encore l’adhérence sont des choix d’organisation sanitaire qu’il nous faut maintenant prendre. Cette organisation des soins incombe un travail réfléchi et commun entre professionnels de santé et association de malades pour validation politique.
Remontons les manches pour faire mieux que mieux.