LA MORT ET L’ÉMOTION…

DEUILUn triste sujet dans notre actualité.

Pourquoi la plupart d’entre nous ne s’émeut pas lorsqu’on évoque 1,4 millions de personnes qui meurent chaque année à cause des hépatites virales, alors que l’émotion submerge le pays pour 84 personnes tuées à Nice.

Un de mes professeurs nous avait dit un jour que : « L’émotion liée à la mort est fonction du nombre de morts par mètre carré, par unité de temps, multiplié par la distance qui vous sépare de cet accident, pondéré du lien affectif qui vous unit aux décédés et de leurs âges ».

Pourquoi la plupart d’entre nous ne s’émeut pas lorsqu’on évoque 1,4 millions de personnes qui meurent chaque année à cause des hépatites virales, alors que l’émotion submerge le pays pour 84 personnes tuées à Nice. Mon voisin meurt, je suis donc très touché par contre la mort de quelqu’un qui habite à l’autre bout de la ville me touche moins. 4 000 morts liés aux hépatites virales et répartis sur l’année ont moins de poids émotionnel que le crash d’un avion de 450 places dans le sud de la France. Et cet avion a plus d’importance s’il s’écrase en France plutôt qu’en Égypte, à moins qu’il s’agisse d’un avion d’une compagnie française ou qui contenait des ressortissants français. On parle plus des inondations en France que des dégâts qui sont faits en Chine, à moins qu’il génère 400 morts pour que cela nous touchent alors. Il faut un tsunami à l’autre bout du monde, ou une centrale nucléaire en difficulté pour générer de l’émotion.
Le décès de Michael Jackson est plus émotionnant que les décès liés à une guerre civile en Afrique. Il est normal de mourir quand on est une personne âgée sauf quand ce sont vos parents. L’atteinte des enfants génère à coup sûr de l’émotion. Pour que les décès de personnes âgées nous touchent, il faut alors que cela soit sur une période courte comme l’effet d’une canicule.
L’émotion liée à la mort est fonction du nombre de morts par mètre carré par unité de temps multiplié par la distance qui vous sépare de cet accident pondéré du lien affectif qui vous unit aux décédés et de leurs âges.

À la veille du 28 juillet et de la Journée mondiale de lutte contre les hépatites virales, il faut se souvenir de tels concepts pour améliorer la communication, car tout le monde connaît autour de lui une personne infectée par une hépatite B ou C.

Pascal Mélin

DERRIÈRE LE RELAIS MÉTHADONE IL Y A QUOI ?

La semaine dernière, lors de la consultation d’addictologie, j’accueillais une jeune femme pour un relais méthadone. En effet, elle était venue dans notre région pour un travail saisonnier. Mais comme tout patient sous traitement par méthadone, les ordonnances doivent être refaites tous les 14 jours dans le cadre d’une consultation médicale. C’est ainsi que je faisais connaissance avec Martine.

L’ordonnance faite et les papiers habituels remplis, je lui demandais comment elle allait, elle m’expliqua alors que le travail était dur et qu’elle se sentait fatiguée et n’arrivait pas à récupérer. Je lui demandais alors si elle avait été dépistée contre l’hépatite B et C ainsi que le VIH. Elle m’expliqua que tout était négatif, mais qu’elle n’avait pas été vaccinée contre l’hépatite B. Je continuais dans les questions en lui demandant si elle avait déjà injecté des produits… Elle hésita avant de me répondre oui, il n’y a pas longtemps…

En reprenant l’histoire, Martine avait bien injecté des drogues 3 semaines avant de venir faire sa saison. Mais comme beaucoup d’usagers, elle ne savait pas s’injecter. C’est donc un ancien (porteur d’hépatite C) qui lui a réalisé son premier shoot. Mais Martine a fait attention d’utiliser du matériel propre et stérile comme on lui avait expliqué lors des ateliers RDR du centre méthadone…
Mais aujourd’hui, ce qu’elle me décrivait avait toute ressemblance avec une hépatite C aigue : fatigue nouvelle, perte d’appétit, vomissement, amaigrissement… Nous avons rapidement réalisé un bilan biologique et virologique, mais je ne serai pas surpris que Martine vienne de se contaminer par le virus de l’hépatite C.

C’est souvent lors des premiers shoots initiatiques que les usagers de drogue se contaminent même s’il n’y a pas de véritables échanges de matériels, l’initiateur peut avoir du sang infecté sur les mains et ainsi transmettre le virus lors de l’injection.

L’éducation préventive à la première injection est un concept et un programme difficile à tenir…

Il est peut-être plus simple de traiter tous les usagers porteurs du VHC pour éviter sa dissémination…

Pascal Mélin

SAUVEZ-MOI, JE SUIS PORTEUR D’UNE HÉPATITE B ET INFECTÉ PAR UN MUTANT PRESSÉ…

CVIRUS MUTANTS’était une consultation qui s’est déroulée il y a quelques années. C’était un homme d’une cinquantaine d’années qui s’est présenté à ma consultation en me déclarant : « Docteur, il faut me sauver. Il faut absolument me donner un traitement car mon hépatite B est grave et va me tuer… Le précédent docteur que j’ai vu n’a pas voulu me traiter et m’a indiqué que j’étais infecté par un mutant pressé ». C’est alors que j’ai compris l’angoisse de celui qui était en face de moi. Le corps médical lui avait dit qu’il était porteur d’une hépatite B chronique avec un mutation en situation pré-C. Et le malade avait compris lui en phonétique qu’il était infecté par un virus mutant pré-C. Vous pensez que c’est là une histoire de chasse, et bien non, car c’est histoire qui s’est répétée de multiples fois ? Interrogez les hépatologues, ils vous diront l’avoir déjà vécu.

Un mutant, ça vous évoque quoi ?

Un monstre sorti directement d’un film de science-fiction ? Et un virus mutant, encore plus fou non ? Un virus mutant est dans l’inconscient collectif un virus plus agressif, plus transmissible et plus contagieux. On n’imagine pas qu’un virus mutant puisse s’être simplement adapté en se multipliant certes, mais dans de moins bonnes conditions. Le génome du virus (son chromosome) comporte une partie que l’on nomme C. On parle de virus mutant pré-C quand une mutation acquise dans cette région permet au virus de se multiplier et ce malgré la production d’anticorps. Le virus mute pour s’adapter ! Pour s’adapter à la pression immunitaire de son hôte.

Il est donc surprenant drôle et triste à la fois que les mêmes mots ne raisonnent pas de la même façon dans la tête d’un malade ou d’un médecin. D’autres malades ont entendu qu’ils étaient infectés par un virus pré-C. Ils sont donc venus voir leur médecin et leur ont demandé de vérifier par prise de sang si leur virus de l’hépatite B ne s’était pas encore transformé en virus de l’hépatite C.

Nous n’entendons décidément pas les mêmes choses… Mais plus que jamais il faut se parler…

Pascal Mélin

CÔTÉ VO, IL Y A DU NOUVEAU ?

BOUCHON CIRCULATIONJ’étais alors un jeune étudiant en médecine et je participais à la réunion hebdomadaire du service quand le patron me demanda : « Côté VO, il y a du nouveau ?». Je réfléchissais à toute vitesse, de quoi parlait-il ? Impossible qu’il me parle de la dernière affiche au cinéma d’art et d’essai en VO ! Décidemment, je détestais les acronymes de la médecine que je ne connaissais pas bien ! C’est alors que l’interne du service me sauva la mise en me tendant une feuille sur laquelle était notée VO = VARICES OESOPHAGIENNES. Je répondais alors au patron : « Monsieur, les varices sont stables depuis 2 ans et sont toujours de grade 2/3 ».

Les VO (varices œsophagiennes) sont le parfait sujet lors des départs en vacances, car les VO ne sont ni plus ni moins que les itinéraires de délestage, les itinéraires verts de bison futé (paix à son âme, il va disparaître).

Tentons d’expliquer les VO…

Le haut du corps et le bas sont séparés par le diaphragme et le foie est un des moyens de faire passer le sang de la partie basse du corps vers le dessus en passant à travers le diaphragme via ses veines sus-hépatiques. Comme nous le savons tous, le sang doit revenir au cœur pour être à nouveau envoyé dans les poumons, être oxygéné et repartir dans la grande circulation… Mais quand le foie est fibrosé et surtout quand il est atteint d’une cirrhose, le sang ne peut plus passer à travers le foie pour rejoindre le cœur de l’autre côté du diaphragme et il se met donc à prendre les itinéraires bis… Ainsi, le sang qui ne peut passer dans le foie va faire dilater la veine porte qui arrive au foie, puis le sang arrive à la rate qui bien sûr se met à grossir et donc à détruire les plaquettes (voilà pourquoi les plaquettes sont basses chez le cirrhotiques). Il existe des petits vaisseaux faisant communiquer la rate à la paroi de l’estomac. Les petites routes accueillent donc tout le trafic de l’autoroute fermée, mais pour accueillir tout le monde les vaisseaux doivent se dilater. Puis des parois de l’estomac, le sang remonte par les veines de l’œsophage qui doivent alors se dilater d’où le terme de VARICES OESOPHAGIENNES… Enfin le sang emprunte les veines azygos pour revenir au cœur. Ainsi, l’itinéraire bis a fonctionné, permettant au sang après avoir emprunté les voies de délestage d’arriver à sa destination…
Le problème, c’est que des petites routes ne sont pas faites pour supporter un tel trafic. Alors les veines œsophagiennes se dilatent, mais malheureusement les varices peuvent se rompre provoquant alors une hémorragie digestive.

Même les bouchons sur les autoroutes lors des départs en vacances peuvent être hépatant.

Pascal Mélin

ET SI LES HEPATITES VIRALES ETAIENT DES MALADIES À DECLARATION OBLIGATOIRE ?

La question vous semble absurde ? Mais il faut réfléchir sur le sujet…

Rendre à déclaration obligatoire une maladie n’est pas chose facile, par le passé on se souvient des levées de boucliers de la part des usagers lorsque cela a été évoqué pour le VIH. Mais pour les hépatites virales si c’était les usagers qui le demandaient ? Une maladie peut être proposée à déclaration obligatoire lorsqu’elle est rare ou qu’elle présente des risques: http://www.invs.sante.fr/Espace-professionnels/Maladies-a-declaration-obligatoire/Liste-des-maladies-a-declaration-obligatoire

Dans ces 33 maladies on y trouve des maladies comme les infections ZIKA, le saturnisme de l’enfant, le mésothéliome, mais aussi bon nombre de maladies infectieuses telles que le choléra, le tétanos, l’hépatite A en phase aigüe, l’hépatite B aigüe symptomatique et le VIH etc. La déclaration obligatoire a :

• soit un intérêt de surveillance épidémiologique ;

• soit nécessite des interventions pour contrôler la diffusion.

La déclaration obligatoire du VIH permet d’obtenir des chiffres annuels de l’épidémie et une adaptation en temps réel. Pour l’hépatite C, on se réfère aux dernières grandes enquêtes de 2004, cela fait 12 ans que l’on demande une mise à jour. Pour l’hépatite B, on ne déclare que les hépatites B aiguës symptomatiques (c’est-à-dire 10% des hépatites aiguës). Alors oui, aujourd’hui les malades eux-mêmes pourraient demander l’inscription à la liste des maladies à déclaration obligatoire de l’hépatite B et de l’hépatite C quel qu’en soit le stade !!! On déclare partout que l’arsenal thérapeutique permet d’envisager une éradication des hépatites virales, alors osons nous doter d’une surveillance épidémiologique correcte en demandant l’inscription sur cette liste.

Mais quand j’y pense madame la ministre, vous pourriez nous donner encore un coup de main en déclarant les hépatites virales grande cause nationale en 2017, ou pourquoi pas une pièce de deux euro frappée à l’effigie de la Journée mondiale de lutte contre les hépatites virales le 28 juillet, comme cela a été fait il y a quelque temps pour le Sidaction…

Et vous, vous en pensez quoi ?

Pascal Mélin

PCR… VOUS AVEZ DIT PCR ?

PCREncore une consultation d’urgence, un malade qui rechute de son hépatite C… Ça fait partie de ces consultations qui se rajoutent au quotidien déjà chargé.

Un patient pourtant bien informé a demandé une visite d’urgence, car son hépatite C montrait de nouveau le bout de son nez après 6 ans de guérison…

Monsieur R est là dans la salle d’attente avec deux heures d’avance, il est anxieux ne tient pas en place. Au fur et à mesure que j’appelle les patients sur la liste de consultation pour venir dans le bureau, je constate qu’il bouge de place qu’il essaye de lire les revues de la salle d’attente ou qu’il se frotte les mains pour se calmer.

Puis arrive la dernière consultation, c’est à lui… Il saute de sa chaise… Arrive dans mon bureau, il s’assoit, jette un tas de résultats biologiques sur le bureau et me déclare : « Cette saloperie de virus est revenu, alors on fait quoi maintenant ? »

Je regarde le bilan aucune charge virale, je lui dis que je ne comprends pas et c’est alors qu’il met le doigt sur la PCR qui est à 25… 25 mg/l ! Tout s’éclaire…

La PCR ou Protéine C Réactive est une protéine dosée en mg/l qui est en fait produite par l’organisme en cas d’inflammation ou d’infection. Et monsieur R avait une bronchite qu’il traînait, ce qui a amené son médecin traitant à lui prescrire un bilan pour faire le point dans lequel figurait bien sur une PCR. Les anglo-saxons l’appellent CRP (C réactive protéine).

La PCR de l’hépatant signifie Polymerase Chain Reaction, c’est-à-dire réaction par polymérisation en chaîne. Pour rendre l’expression compréhensive, le virus dans le sang n’est pas détectable. Il faut l’amplifier, c’est-à-dire faire des photocopies de virus accrochées les unes aux autres pour qu’on puisse enfin compter le nombre de virus. La mesure s’exprime alors en UI/ml… La charge virale ou PCR permet de suivre la maladie dans l’hépatite C, mais cette technique est utilisée pour de nombreuses autres maladies infectieuses.

Monsieur R avait de l’inflammation en lien avec sa bronchite et donc une PCR élevée, mais en aucun cas une rechute de son hépatite C.

UNE PCR PEUT EN CACHER UNE AUTRE…

Pour éviter de telles angoisses par homonymie, on pourrait garder le terme de PCR pour l’infectiologie et préférer CRP plutôt que PCR pour l’inflammation… Apprendre à lire ses analyses c’est bien, être sûr de les comprendre c’est mieux !

Bien sûr les PCR ne sont pas à confondre avec les RCP réunions de concertation disciplinaire… mais c’est une autre histoire…

Pascal Mélin

HEPATITE C GUERIR POUR EVITER LE CANCER…

cover1Le congrès de Barcelone en avril dernier ne nous a pas permis d’évoquer toutes les présentations. Je voudrais revenir sur l’abstract 166 :

Lawitz E, Ruane P, Stedman C, et al. Long-term follow-up of patients with chronic HCV infection following treatment with direct-acting antiviral regimens: maintenance of SVR, persistence of resistance mutations and clinical outcomes. The International Liver Congress, 13-17 April 2016, Barcelona. Abstract 166.

Cette étude était en fait un observatoire commandé par le laboratoire Gilead pour connaître le devenir des patients porteurs d’hépatite C après traitement et guérison virologique par Antiviraux d’Action Direct (AAD). Il s’est déroulé aux USA, en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni et aussi en France. La population comptait 5433 participants dont 63% étaient des hommes avec une cirrhose dans 20% des cas et l’âge moyen était de 54 ans. Ils ont été suivis en moyenne 3 ans.

La réponse virologique est le plus souvent confirmée et durable.

Les rechutes tardives concernaient 0,1% des participants et pour 0,2% on a pu constater des réinfections et ce 8 mois après la guérison. Mais pour 99,7% des patients la guérison était bien définitive.

L’apparition de cancer du foie concernait 23 patients.

8 patients à l’entrée dans l’étude, 6 dans les 24 semaines suivantes l’entrée dans l’étude, 6 cas entre 6 et 12 mois et enfin, 3 patients entre 12 et 18 mois. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une étude portant sur les cirrhoses deux conclusions sont à tirer :

– Premièrement, les cancers surviennent le plus souvent sur un tableau de cirrhose et ils surviennent essentiellement dans les premières semaines de traitement comme si la guérison survenait trop tard, comme si les processus de cancérisation étaient déjà enclenchés…

– Il s’agit là d’un message fort pour les malades car cette étude confirme qu’un traitement le plus précoce possible et le plus loin de la cirrhose aura le plus de chance de voir disparaître les complications. Enfin, les rechutes ou les recontaminations, même si elles doivent être recherchées avec vigilance, restent exceptionnelles. Une telle étude nous incite à être proactifs dans l’accès aux soins et à la guérison virologique.

Pascal Mélin

ET DU CON… EDUQUONS…

PASCAL COURTY_EDUQUONS CE N’EST PAS UNE INSULTEPlus que jamais comme le disait mon ami psychiatre et addictologue Pascal Courty : « Éduquons ce n’est pas une insulte ! »

La puissance et l’efficacité des nouveaux traitements contre l’hépatite C ne doit pas amener pour des contraintes budgétaires à faire disparaître les infirmières d’éducation thérapeutique, ni les équipes d’UTEP dans les programmes d’hépatologie. Certains pensent que tout est fini, les malades n’ont plus qu’à prendre leur traitement, plus besoin d’éducation, plus besoin d’infirmière d’accompagnement. Que de dénigrement, réduire les infirmières d’éducation à des labradors de sauvetage, à des chiens pour aveugles, à des saint-bernard avec leur tonnelet et de bons sentiments, que mes amis à quatre pattes ne m’en tiennent pas rigueur. Mais cette vision est d’un négativisme outrancier. La raison même de l’éducation n’est pas d’aider à supporter un traitement parfois très difficile, si vous pensez ça alors vous n’avez rien compris ! L’éducation, c’est avoir appris et mettre en œuvre la capacité à aller à la rencontre de l’autre, à venir se mettre en harmonie en synchronisme avec ses valeurs, ses représentations, ses craintes, ses fantasmes et sa sexualité. Il y a bien une santé à 5 branches : somatique, psychique, sexuelle, relationnelle et professionnelle. Chacune doit être explorée et prise en compte lors d’un programme d’éducation thérapeutique. Évaluer les capacités du malade, l’amener à développer ses propres ressources, à trouver lui-même les réponses et à adapter ses comportements ou son mode de vie. Les malades ne sont pas des animaux de cirque et les infirmières ne sont pas des dresseurs.

J’ai de la peine et de la colère quand je pense à Chantal cette infirmière d’éducation thérapeutique hépatite C, qui vient de prendre sa retraite et dont l’administration à supprimer le poste pour raison budgétaire en justifiant cette décision par les progrès thérapeutiques. Oui, je serai méchant monsieur le directeur, vous n’avez rien compris à l’éducation thérapeutique et ce à quoi les malades aspirent sans toujours en avoir conscience. En colère aussi en pensant à ces infirmières à qui on a dit : « Maintenant que les malades guérissent malheureusement on n’a plus besoin de vous. On va donc vous réaffecter en diabétologie car là il y a du boulot et on ne guérit pas… ». L’hépatite C a permis à l’éducation d’entrée dans le monde de l’hépatologie. Mais par pitié ne perdons pas tout ce que nous venons d’apprendre et de mettre en place, profitons des progrès de l’hépatite C pour développer des programmes d’éducation thérapeutique pour la prise en soins et l’accompagnement des malades atteints d’hépatites ! Et le cancer du foie ne peut-il pas relever de l’éducation thérapeutique ? Et la stéatose, et les NASH, et les cirrhoses, ce sont typiquement des sujets qui nécessitent le développement de programmes spécifiques. On pourrait aussi parler des maladies plus rares comme l’hémochromatose, les cholangites biliaires primitives, les hépatites auto immunes ou médicamenteuses pour lesquelles les malades se sentent souvent seuls et perdus.

Alors convaincu ? Les équipes d’éducation thérapeutique mises en place pour l’hépatite C ne doivent être ni supprimées ni réduites…

Bien au contraire elles doivent être redynamisées et invitées à développer de nouveaux programmes. L’hépatologie est à la rencontre de l’addictologie, des sciences du comportement, de l’infectiologie, de la médecine interne et des maladies du foie. L’éducation thérapeutique y est incontournable, toute autre considération serait une grave erreur…

Plus que jamais éduquons ce n’est pas une insulte !

Pascal Mélin

TEMOIGNAGE VHB DU 23 JUIN…

VACCIN HBLe 23 juin, à la consultation du matin…

Je reçois en urgence une femme de 42 ans d’origine turque chez qui on vient de découvrir une lésion hépatique. Je reprends son IRM et on arrive rapidement à la conclusion qu’il s’agit d’une HPNF : Hyperplasie Nodulaire Focale c’est-à-dire, une tumeur bénigne qui ne nécessite qu’une simple surveillance. La patiente m’avait dit avoir eu 5 grossesses sans autre antécédent en dehors d’une obésité et d’une hypertension.

On allait se quitter quand je lui demande : « Et dans votre famille il n’y a pas de maladie du foie ? »
Elle me répond : « Ah oui, dans la famille on à tous une hépatite B, ma sœur qui vit dans l’est a une cirrhose et prend des médicaments. Moi-même j’ai une hépatite B mais heureusement le virus est endormi. »
– « Et vos enfants ? »
– « À chacun de mes accouchements, mes enfants ont reçu, dès leur naissance, une piqûre et un vaccin mais moi rien puisque mon virus est endormi. »
– « Et votre mari ? Il a été dépisté et vacciné ? »
– « Non, ce n’était pas nécessaire… »

Comme son mari était présent dans la salle d’attente, nous sommes allés au labo faire des bilans sanguins immédiatement et nous nous reverrons dans 3 jours.

Cette aventure amène des commentaires : lorsqu’une femme enceinte est porteuse de l’hépatite B on la dépiste pendant sa grossesse et on fait en sorte que les enfants ne soient pas contaminés mais, on oublie encore trop souvent de s’occuper de la maman et encore plus du papa.

Plus que toute autre maladie chronique, l’hépatite B est une maladie familiale tout autant qu’une maladie individuelle. Aucun des enfants n’a eu de prise de sang pour vérifier qu’il avait un taux d’anticorps protecteur et n’était pas contaminé. Entre le gynécologue, l’accoucheur, le pédiatre, le médecin traitant, l’hépatologue, il faut bien définir qui s’occupe de qui et de quoi. De telles situations ne devraient plus arriver. Nous devons également faire attention à la portée de nos mots : qualifier un virus d’endormi est dangereux !

Une des pistes pour éviter de telle mésaventure serait de rendre le patient porteur d’une hépatite B chronique acteur du dépistage et de la protection de son entourage… Tiens cela me rappelle une enquête que nous sommes en train de mener ! Vous non ?

Pascal Mélin

MERCI DE PARTICIPER A L’ENQUETE VHB SOS HEPATITES 2016 : http://www.soshepatites.org/2016/04/29/enquete-sos-hepatites-quelle-vaccination-pour-lentourage-des-personnes-vivant-avec-lhepatite-b/

APRÈS LA JOURNÉE DE LA MUSIQUE : LE 22 JUIN LA JOURNÉE DE LA VIE…

DON d'ORGANES TOUS CONCERNESAujourd’hui 22 juin, c’est la Journée du don d’organes ! Nous ne devons pas oublier que toutes les personnes en état de mort cérébrale sont candidates aux prélèvements d’organes, dans 1/3 des cas la famille s’oppose au prélèvement d’organes. Pourtant, l’homme doit prendre conscience qu’il est son propre réservoir de pièces détachées. Mourir en emmenant ses organes avec soi, c’est priver d’autres personnes de pouvoir en bénéficier via la greffe.

En France en 2015, ce sont 5 746 greffes d’organes qui ont été réalisées. Les chiffres progressent mais le nombre de refus reste stable. Il nous faut des 22 juin et des campagnes de communication pour apprendre à dire OUI.

Le Japon n’en a réalisé que 300 alors que 14 000 patients sont en attente. Mais, culturellement au Japon, on ne peut accéder au paradis que si on n’y arrive pas avec tous ses organes. Il faut donc apprendre aux enfants dès leur plus jeune âge à accepter le concept de greffe. C’est pourquoi, il est proposé aux enfants d’envoyer leur peluche cassée pour qu’elle puisse être greffée à partir d’une autre peluche et après quelques jours d’attente, le facteur ramène la peluche greffée, prête à commencer sa deuxième vie.

Allez découvrir cette deuxième vie des peluches greffées au Japon : http://positivr.fr/don-donneur-organes-second-life-toys/

Mais, dans d’autres pays comme en Argentine 8 000 personnes attendent une greffe alors que l’on a enregistré uniquement une centaine de donneurs. En 2016, pour sensibiliser la population deux centres de transplantation se sont lancés dans une campagne de communication intitulée « donors cars ». Les taxis se voient offrir le remplacement gratuit d’une pièce de carrosserie défaillante à condition de laisser des couleurs différentes et de parler de greffe à toutes les personnes qui utiliseront leur taxi. On trouvera même sur le siège arrière une tablette où les gens peuvent gratuitement s’inscrire sur la liste des donneurs d’organes potentiels : http://creapills.com/taxis-greffes-don-organe-20160607

On pourrait aussi évoquer une campagne avec un brin d’humour noir, une agence belge n’hésite pas pour nous obliger à réfléchir : http://www.danstapub.com/la-campagne-la-plus-dingue-pour-sensibiliser-au-don-dorganes/

Mais moi, j’ai un faible pour celle là : https://www.youtube.com/watch?v=pyRJWPWkgtY

Alors dites-le, dites OUI.

Pascal Mélin

GEORGIEN

GEORGIE VHC ACCES UNIVERSELMerci à l’infirmière qui m’a permis de rencontrer un traducteur et qui m’a convaincu d’écrire mon histoire.

Je suis géorgien et j’ai fui mon pays avec ma femme et mes deux enfants.

Cette décision n’a pas été facile à prendre. Après plusieurs semaines sur les routes nous sommes arrivés en France. Dans le premier foyer où nous avons été accueillis, nous avons rencontré un éducateur, une infirmière et un médecin. On nous a fait réaliser une radio des poumons pour voir si on n’avait pas la tuberculose puis une prise de sang dans un centre gratuit pour voir si nous n’étions pas porteur d’une autre maladie.

Nous pensions être en bonne santé, je ne me suis donc pas opposé. Mais quand on nous a rendu les résultats, on m’a appris que j’avais une hépatite C. J’ai tout de suite demandé une vaccination pour ma femme et mes enfants mais on m’a fait comprendre qu’il n’y avait pas de vaccin.

Pour répondre à mes questions, on m’a envoyé avec un interprète auprès d’un professeur des maladies du foie. Il m’a fait faire plein de bilans et quand je suis retourné à la consultation il m’a expliqué que je ne pouvais pas être traité parce que je n’étais pas assez malade.

J’étais en train de lui expliquer ma difficulté à comprendre quand il m’a déclaré : « Mais si vous voulez être traité vous n’avez qu’à retourner en Géorgie où il a été décidé d’un accès universel aux traitements pour tous les malades. »

Moi j’ai trouvé ça scandaleux et vous devez le faire circuler !

Pascal Mélin

ON A VAINCU ÉBOLA GRÂCE À LA QUARANTAINE… MAIS NOUS LES AVONS ABANDONNÉES…

EBOLA-VIRUSLe monde entier a eu peur de la dernière épidémie de virus Ébola qui a touché les pays pauvres de l’Afrique de l’Ouest. Elle avait débuté en décembre 2013 en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone. C’est en mars 2016 que l’épidémie a été déclarée sous contrôle, après 11 000 morts.

Pendant le temps de cette épidémie les pays riches ont mis en quarantaine tous les pays pauvres de l’Afrique de l’Ouest. Embargo de circulation des biens et des personnes et aussi blocage économique. Pendant ce temps, des équipes médicales ont été envoyées avec des hôpitaux de campagne et des hordes de virologues ou de spécialistes en épidémiologie.

On a même accueilli dans nos pays riches les élus des élus pour les admettre en chambre d’isolement et bénéficier des soins les plus pointus. Même l’ANRS a travaillé sur l’épidémie. Tous nos chercheurs ont travaillé d’arrache-pied pour mettre au point un vaccin contre le virus Ébola et cela a été fait en moins de 1 an. Des nouveaux traitements antipaludéens ont été testés avec une certaine efficacité, tout comme les vaccins, mais la plupart des personnes infectées sont mortes.

Ce qui a permis de contrôler l’épidémie c’est l’obligation d’isolement et de quarantaine dans les régions les plus touchées. Les pays riches se sont félicités et sont vite passés à autre chose, oubliant de tirer les leçons de cette épidémie.

Pourtant aujourd’hui, chacun des pays touché est retourné à ses difficultés sanitaires. On a pu enregistrer une nouvelle épidémie dont personne ne parle en dehors de quelques ONG : des poussées de viols, d’agressions sexuelles et de violences envers des femmes et de toutes jeunes filles, au sein des maisons, engendrant une épidémie de grossesses.

L’histoire nous a appris que c’est souvent le cas après un drame comme une guerre mais là, cette épidémie est toute autre. Les autorités locales sont en grande difficulté pour reconnaître ces crimes survenus dans une ambiance si particulière. Mais nous, pays riches qui avons notre part de responsabilité dans les décisions qui ont été prises, allons-nous encore faire semblant de ne pas être au courant et regarder le foot ? Combien de victimes indirectes d’Ébola faudra-t-il encore ? Entre ces jeunes filles traumatisées, voire orphelines, et les enfants à naître.

Moi, je le dénonce et au nom de la science je demande pardon !

Si vous en avez le courage, regardez un film qui n’a pas eu les autorisations pour passer au cinéma ou sur les chaines télévisuelles : La leçon de e-bola, réalisé par Christian Marazziti. Il sera disponible gratuitement en streaming sur un site dédié à partir du 15 juillet.

La vaccination c’est l’apprentissage de la mémoire, alors face à de telles épidémies n’oublions rien.

Pascal Mélin

Pour en savoir plus : http://www.slate.fr/story/117047/ebola-epidemie-viols