REPOUSSÉE PAR UN CHIRURGIEN…

Linda a 42 ans, on devine qu’elle était une belle femme, elle a des cernes sous les yeux, des mains gonflées par la destruction de ses veines suite à de trop nombreuses injections. Linda est une usagère de drogue (UD) ou une ex-UD, elle se présente à la consultation comme une bête honteuse ou plutôt un animal blessé. Son regard était fuyant, elle était toute fermée au fond de son fauteuil.

Habituellement, les patients qui venaient à ma consultation étaient tendus, inquiets mais jamais honteux, ils étaient toujours ouverts, prêts à débattre sur les traitements possibles de l’hépatite C.

J’avais en face de moi Linda qui savait depuis 1996 qu’elle était porteuse d’une hépatite C, elle avait « bénéficié d’une biopsie hépatique » et n’était porteuse que d’une hépatite minime A1F1 et à l’époque on lui avait dit qu’elle ne nécessitait pas un traitement mais qu’il fallait mieux qu’elle s’occupe de sa toxicomanie. Elle avait alors ressenti le sentiment d’être sale, pestiférée et avait enfoui et caché sa maladie pendant presque 20 ans.

Linda souffre d’un syndrome des mains de Popeye. Au fil des injections dans les bras, les veines se sont détruites, empêchant par la même le retour veineux, ce qui explique que le sang s’accumule et fait gonfler les mains d’où le nom de syndrome des mains de Popeye. Il y a quelques mois, elle avait ressenti de plus en plus fréquemment des fourmis dans les doigts et différents examens avaient abouti au diagnostic de syndrome du canal carpien. Elle avait donc été adressée à un chirurgien.

Le chirurgien avait confirmé le diagnostique et la nécessité d’un geste chirurgical de décompression. La date de l’opération était fixée, le rendez-vous était calé auprès d’un anesthésiste. La patiente quittait le chirurgien en lui serrant la main quand elle se rappela : « Docteur, j’ai oublié de vous dire que j’ai une hépatite C, j’espère que ce n’est pas grave ? »

Instantanément, le chirurgien s’emporta : « Vous ne vous rendez pas compte, vous me cachez des choses importantes, et moi je vais vous opérer et prendre le risque de me contaminer et de me retrouver comme vous, vous êtes inconsciente, votre attitude est scandaleuse. »

Linda lui coupa la parole et s’emporta à son tour : « Putain, mais allez vous faire enculer ! J’irai me faire opérer ailleurs, je ne suis pas pestiférée, ça fait 20 ans que j’essaye d’oublier ma maladie et je suis fière de l’avoir presqu’oubliée aujourd’hui, au revoir, mais faites vous dépister quand même car la connerie, ça ne protège pas de l’hépatite C. »

Linda était une rebelle et plutôt que d’essayer à nouveau d’oublier sa maladie elle avait fait le choix de se débarrasser du virus de son hépatite C et instantanément, elle avait pris rendez-vous à ma consultation.

Voilà le chemin qui l’avait amené là, mais aujourd’hui elle était hésitante. Nous avons parlé de tout et de rien pour s’apprivoiser mutuellement, je devais lui redonner confiance dans le corps médical et surtout l’aider à définir le sens que prendrait sa guérison.

Lorsque Linda me racontait son histoire, je fus d’abord écœuré par la réaction du chirurgien puis, en réfléchissant, je me suis dis qu’il lui avait probablement permis d’accéder aux soins alors que s’il lui avait gentiment conseillé de se soigner de son virus, elle ne l’aurait probablement pas fait.

Linda et moi avons alors éclaté de rire décidément, le parcours de soins d’un malade pouvait, parfois, être très atypique.

Pascal Mélin

SALUT PHIL…

Salut Phil et surtout ne sois pas sage au paradis des hépatants mécréants et ne cherche pas à vacciner les anges avant leur entrée en sexualité car ils n’ont pas de sexe.

Phil même au moment de tirer ta révérence à la vie tu as encore trouvé le moyen de faire un pied de nez à la Toussaint.

Tu étais un infirmier de formation mais tu étais aussi un homme, un militant et un citoyen. De longue date, tu revendiquais ton état de co-infecté VIH/VHC. Nous nous étions rencontrés il y a 15 ans, tu étais alors un de nos militants les plus actifs dans les Ardennes. Ce dont je me souviens c’est une de tes déclarations tonitruantes où tu nous avouais il y a déjà 15 ans : « je n’ai plus peur du SIDA car j’ai appris à vivre avec, on m’a donné des traitements et des armes pour arriver à le contrôler ; par contre  mon hépatite C me fait peur et c’est elle qui m’emportera… » Quel triste visionnaire tu faisais, avant tous les autres, tu avais compris que les co-infectés risquaient de mourir de leur foie et non de leur SIDA. Tu avais alors rejoint SOS Hépatites et tu étais à l’initiative du projet de CAARUD dans les Ardennes. Tu avais été mis à disposition par le Centre de Gestion des Ardennes suite à la fermeture du dispensaire de Mouzon où tu étais infirmier, pour aller au plus près de ceux qui étaient le plus loin des soins.

Tu répétais à qui voulait l’entendre :

« n’ayez pas peur du plaisir, vivre c’est jouir, mais ne vous faites pas mal, le plaisir ne doit jamais pouvoir amputer votre avenir. »

A l’époque, nous ne le comprenions pas très bien, mais toi à travers ton vécu, ta vision de l’autre, ta sensibilité, sans le savoir, tu nous apprenais la Réduction Des Risques. Préventologue inépuisable tu savais trouver les mots qui seraient entendus et retenus. Phil tu étais un hépatant, tous les membres de SOS Hépatites qui avaient pu échanger avec toi en étaient revenus avec un autre regard et de nouvelles questions. Pour supporter le présent, tu poussais le futur. Il y a trois ans lors des Université de Printemps à Sedan tu avais tenu, malgré la maladie qui t’affaiblissait déjà, à être présent. Tu nous avais rappelé que nous devions prendre soin des travailleurs du sexe et nous avions élaboré de nouvelles actions.

Merci Philippe Le Blond, merci Phil, merci l’ami d’avoir été toi et de m’avoir permis de croiser ta route…

Nous ferons vivre tes idées et tes rêves, tu es mort alors que les traitements pour guérir étaient enfin là, nous comprenons et faisons nôtre ton dernier message. Il ne suffit pas d’avoir des traitements qui guérissent pour guérir.

Pascal Mélin

Il Y A QUELQUES MOIS J’AI ÉCRIT ET PUBLIÉ SUR NOTRE BLOG CE TEXTE…

Docteur, j’ai peur de guérir de mon hépatite C…

Voilà la prière pour le moins surprenante que l’infirmière d’éducation thérapeutique et moi avons entendue ce matin lors de la mise en route d’un nouveau traitement.

Patrick a 51 ans, contaminé de longue date par des produits transfusionnels puisqu’il est atteint depuis sa naissance d’une forme d’hémophilie particulière. Il a déjà été traité il y a quelques années par une association interféron ribavirine. Ce premier traitement a été particulièrement mal supporté et responsable d’une rechute et d’un effondrement psycho-social. À l’époque, le patient m’avait déclaré : « C’est drôle et je vais peut-être vous choquer, mais j’en arrive presque à être rassuré de voir revenir le virus, il y a tellement de temps que nous vivons ensemble et que nous nous supportons l’un l’autre ».

À l’époque, j’avais trouvé cette remarque choquante et l’avais mise sur le compte de la déception et de l’échec thérapeutique, le patient avait alors refusé de rencontrer la psychologue de l’équipe. Plusieurs années ce sont passées et nous avons régulièrement suivi sont hépatite C.

Le temps est passé et Patrick continuait de vivre avec son hépatite C, il venait chaque année faire ses contrôles qui confirmaient toujours son état pré-cirrhotique. Il y a quelques mois je lui ai donc parlé des nouvelles séquences thérapeutiques qui nous permettaient d’envisager un nouveau traitement et donc une guérison. Nous refaisions un nouveau bilan et ce matin nous nous retrouvions en salle d’éducation thérapeutique avec l’infirmière pour débuter ce nouveau traitement. C’est à ce moment que Patrick très tendu m’a déclaré : « Docteur j’ai peur de guérir, que serai-je demain si vous me guérissez, il y a si longtemps que je vis avec mon virus, que vais-je devenir sans lui ? Des fois j’ai la sensation que nous nous protégeons mutuellement. Et grâce à lui je suis reconnu dans mon handicap, comment sera la vie après ? »

On ne rappellera jamais assez que si les malades ont fait un travail d’acceptation pour vivre de façon chronique avec un virus, l’arrivée de nouveaux traitements fait émerger l’idée d’une guérison qui peut alors faire peur. Mais n’est-ce pas là le rôle des programmes d’éducation thérapeutique dont nous avons plus que jamais besoin ?

Pascal Mélin

Patrick a pris son traitement pendant trois mois avec succès et disparition de son virus. Bien sûr nous l’avons orienté vers le psychologue de l’équipe pour l’aider à se reconstruire dans cette guérison virologique. Les choses allaient pour le mieux et Patrick prenait doucement la mesure de sa nouvelle vie. Le cap des trois mois était passé et nous lui avions annoncé sa guérison virologique.

Malheureusement, c’est quelques temps plus tard que tout s’est effondré quand  Patrick a fait une hémorragie cérébrale qui devait être gravissime en raison de ses problèmes de coagulation. Et au bout de quelques jours nous apprenions le décès de Patrick malgré tous les efforts de l’équipe de réanimation où il avait été admis.

Depuis, je me souviens souvent de la déclaration de Patrick : « Docteur, j’ai peur de guérir de mon hépatite C ». Patrick voulait- il nous dire quelque chose ? Comment ne pas faire de psychologie de bas étage ? Quel enseignement devons-nous tirer ? Comment allons-nous modifier notre façon de faire ?

La guérison doit se préparer et s’accompagner et nous ne devons pas violer le malade même pour le guérir. Patrick serait peut-être décédé de toute façon mais cette phrase raisonnera longtemps pour moi : « DOCTEUR, J’AI PEUR DE GUERIR DE MON HEPATITE C. »

Pascal Mélin

ALERTE SUR LES TRAITEMENTS DES CIRRHOSE VIRALES C…

L’alerte a été lancée il y a quelques jours par FDA (Food and Drug Administration) concernant l’utilisation de l’Exviera® et/ou du Viekirax® chez des patients atteints de cirrhose grave.

Les cirrhoses sont classées selon la classification de Child A*, B ou C et actuellement pour les malades ayant des formes graves qui nécessitent une transplantation hépatique, on tente d’éradiquer le virus de l’hépatite C pour simplifier la greffe.

Devant l’amélioration de la puissance thérapeutique, on a traité des patients avec des formes de plus en plus grave Child B ou C. Mais une alerte vient d’être lancée par la FDA. En effet, depuis plusieurs mois, ces nouveaux traitements sont disponibles aux USA et la surveillance de l’accès aux soins a montré que les patients en cirrhose Child B ou C avaient dans un certain nombre de cas présenté une décompensation de leur cirrhose et parfois un décès. Cette mise en garde doit nous rappeler que le traitement des cirrhoses graves est complexe et délicat et ne peut en aucun cas se résumer à l’éradication virale C.

Pascal Mélin

* Cirrhose Child A = cirrhose compensée

Pour en savoir plus :

http://www.afef.asso.fr/rc/org/afef/nws/News/2015/20151025-080808-114/src/nws_fullText/fr/FDA%20Drug%20Safety%20Communication.pdf

15 000 PASSEPORTS EN UN MOIS…

Les migrants ne cessent d’arriver et surtout les migrants originaires de Syrie, l’ambassade de Syrie en Allemagne a régularisé massivement ces réfugiés en leur délivrant des passeports…

Mais ce n’est pas le sujet de ce blog !

Les 15 000 passeports délivrés en un mois se sont ceux de SOS Hépatites, et ce sont des passeports pour la guérison de l’hépatite C. En un mois, le stock est épuisé. Alors ne harcelez pas Véronique sur notre ligne d’écoute il n’y en a plus. Pourtant, nous avions été prévoyants en nous calant sur la recommandation de l’AFEF : 15 000  traitements par an donc 15 000 passeports hépatants.

Mais s’il n’y a déjà plus de passeport, c’est que l’on est probablement en train de dépasser les quotas annuels de traitement. Rassurez-vous, SOS Hépatites va trouver des fonds pour rééditer son passeport et le diffuser le plus largement possible et gratuitement sans exiger une ordonnance validée par une RCP et rédigée par un spécialiste en justifiant au moins d’une fibrose supérieure ou égale à F2 .

Non ! Nous diffuserons notre passeport le plus largement possible car pour nous le premier traitement c’est l’information  et tout le monde malade ou non a le droit à cette information.

Nous allons rééditer notre passeport car notre devise reste :  ACTUA PASS 2

Un traitement pour tous, une guérison pour chacun et un passeport universel.

http://www.soshepatites.org/2015/09/30/consultez-commandez-le-livret-des-nouveaux-traitements-de-l-hepatite-c/

Pascal Mélin

DALLAS BUYERS CLUB À LA SAUCE HÉPATITES…

BLOG DALLAS-BUYERS-CLUB-Affiche-OKAvez-vous déjà vu ce film : DALLAS BUYERS CLUB de Jean-Marc Vallée ?

Sorti en 2013 aux USA, ce film s’inspire de l’histoire vraie de Ron Woodroof en 1985. Ron était un cow-boy homophobe, violent, machiste, et consommateur d’alcool. Il découvre alors qu’il est porteur du VIH et les médecins ne lui donnent plus que quelques mois à vivre. Il est alors mis à la marge de sa propre communauté et va rencontrer les populations que lui-même rejetait auparavant, homosexuels, prostitués, toxicomanes, son meilleur ami est même un transsexuel. Apprenant que de nouveaux médicaments arrivent sur le marché américain il crée le « DALLAS BUYERS CLUB », association de malades visant à faire des achats groupés de traitements à bas coût au Mexique. Les USA compteront jusqu’à 12 clubs de ce type. Bien sur les firmes pharmaceutiques porteront plainte pour importation illégale et les autorités mettront fin à ces clubs. Porté à l’écran plus de 20 ans plus tard ce film rendait hommage à ceux qui exclus du système de soins américain se sont organisés pour avoir accès aux médicaments ! Ben quoi, on est dans le pays de la liberté d’entreprendre ou non ? La France n’a pas connu de tels  phénomènes de résistance et d’organisation de soins parallèles, on se contentait de dénoncer le retard d’accès aux soins et aux traitements mais comme chacun était affilié à la sécurité sociale, il fallait attendre, cela allait arriver.

Aujourd’hui, c’est l’Australie qui nous donne une leçon de révolte sanitaire avec ces 233 000 personnes atteintes d’hépatite C chronique qui sont pour la plus part dans l’incapacité de payer les montants astronomiques de ces nouveaux traitements vendus 100 000 dollars australiens alors qu’on peut se les procurer pour 2000 dollars en Chine par exemple. Les australiens se sont organisés en créant le  « FixHep C buyers club ». Et ça marche ! Plusieurs traitements ont déjà permis de guérir des malades, c’est ce qu’on peut découvrir sur leur site.

Le vent de la rébellion sanitaire souffle, alors qu’en France on organise la pénurie en validant les prix élevés et en ne traitant que les patients avec des formes sévères.

Nous, malades réclamons un accès au traitement plus large en revoyant le cout à la baisse.

UN TRAITEMENT POUR TOUS, UNE GUERISON POUR CHACUN & UNE PROTECTION UNIVERSELLE…

Bravo à l’Australie, pays où les médecins et les malades se retrouvent ensemble pour contourner l’accès aux soins en organisant une résistance et une rebellion sanitaire, un exemple à suivre et à encourager pour dénoncer en soignant autrement.

Pascal Mélin

UNE RENCONTRE HÉPATANTE…

Le temps des formations est toujours un temps de rencontre riche tant au niveau humain que personnel.

Lors de la dernière formation, il y a quelques jours en Guadeloupe, j’ai rencontré une infirmière qui m’a fait réaliser l’ampleur du travail à accomplir. Comme toujours le programme prévoit de parler de l’hépatite B & de l’hépatite C. Mais à un moment, c’est toujours la question du vaccin qui s’invite. Alors je reprends les études pour réexpliquer qu’il n’y a pas de doute sur le vaccin et que toutes les rumeurs étaient non fondées.

C’est alors qu’une infirmière libérale, vaccinée elle-même, m’expliqua que son fils âgé maintenant d’une vingtaine d’années n’avait pas été vacciné. En effet, dans sa jeunesse la polémique faisait rage et dans le doute elle ne l’a pas fait vacciné. Oui mais voilà, aujourd’hui ce dernier est en âge de croiser le virus par son activité sexuelle et vivant en Guadeloupe, il est trois fois plus exposé qu’en métropole.

Après débats et échanges sur la gravité de la maladie, l’infirmière est repartie convaincue de la nécessité de dépister & vacciner son fils.

Mais chose encore plus importante, elle m’expliquait que dans le cadre de son travail, si une personne lui signifiait son opposition à la vaccination, elle ne répondrait plus : « Je vous comprends« , mais qu’elle se sentait maintenant armée pour expliquer et tenter de convaincre.

Vous n’imaginez pas le poids du doute dans les paroles d’une infirmière auprès de la population.

Nous devons rassurer & expliquer à tous les professionnels de santé l’innocuité du vaccin et faire de tous les soignants des ambassadeurs de la vaccination contre l’hépatite B auprès de la population et ça commence par la Guadeloupe !

Pascal Mélin

LA GUADELOUPE HÉPATANTE…

Les hépatites virales dans leur épidémiologie ont des particularités insulaires. Les hépatites virales en Guadeloupe c’est 8 000 à 10 000 personnes contaminées. Une personne sur deux ignore sa contamination. C’est aussi 30 décès par an dus aux VHB-VHC.

Les dernières études réalisées localement ont trouvé une prévalence de l’hépatite C de 0,7% de la population, c’est-à-dire proche de celle de la métropole. Pourtant, les modes de transmission y sont différents. Ainsi, les personnes contaminées par usage de seringue l’ont essentiellement été en France métropolitaine et ont rapporté leur infection en Guadeloupe. Même si l’usage de drogue est tout aussi répandu en Guadeloupe qu’en métropole l’usage ne se fait pas majoritairement par voie intraveineuse. Par ailleurs, SOS Hépatites Guadeloupe a constaté des pratiques de piercing et de tatouage sauvages réalisées dans de mauvaises conditions d’hygiène qui ont été responsables de contaminations.

Pour l’hépatite B, les choses sont différentes. La prévalence est de 1,7%. La Guadeloupe cumule donc trois fois plus de cas que dans l’hexagone. Pourtant, en 20 ans d’énormes progrès ont étés réalisés : En 1993, une étude portant sur les donneurs de sang retrouvait 3% de personnes infectées alors qu’elles ne seraient plus que 1,5 % aujourd’hui. Pour obtenir de tels résultats il faut rendre hommage aux guadeloupéens en rappelant qu’ils ont gardé un fort attachement à la vaccination contre l’hépatite B sans tenir compte des polémiques infondées qui faisaient rage en métropole.

Il semble pourtant y avoir des signes locaux de recul de la vaccination. Ce n’est pas acceptable face à une épidémie trois fois supérieure à celle de la France métropolitaine !

Pendant cette semaine hépatante SOS Hépatites Guadeloupe n’a pas ménagé ses efforts, soutenue par la fédération nationale mais également par : le Pr Daniel Dhumeaux (venu défendre les propositions de son rapport) et le Dr Eric Saillard membre de SOS hépatites mais surtout médecin hépatologue au CHU de Pointe-à-Pitre et responsable du réseau local. Communication tout azimut sur les radios et les télés, formation conjointe de militants et de professionnels de santé, soirée EPU (enseignements post universitaires) destinés aux médecins généralistes (avec le partenariat de IREPS et de l’ARS). Nous avons également organisé des rencontres politiques avec le Conseil Général, le Conseil Régional et les représentants du CHU et le directeur de l’ARS.

Plusieurs points sont ressortis de ces rencontres :

1. Il faut localement mettre en place une stratégie d’accompagnement de la vaccination contre l’hépatite B tant pour les nourrissons que pour les adolescents (la prévention dans les collèges est de la responsabilité du Conseil Général alors qu’elle incombe au Conseil Régional en lycée). Plusieurs projets ont été évoqués. Des réunions de travail et des dossiers seront prochainement élaborés

2. La disparition des budgets spécifiques. Il ne s’agit pas d’un problème propre et spécifique à la Guadeloupe. SOS Hépatites dénonce ce phénomène depuis plusieurs années. Le ministère de la Santé a mis en place un budget fléché pour les hépatites virales. Il a donc versé cet argent aux ARS qui l’ont transféré aux hôpitaux où il existait une activité de lutte contre les hépatites virales. Mais le docteur Saillard à Point-à-Pitre, comme dans de nombreux CHU ou hôpitaux nous a confirmé qu’aucun euro supplémentaire n’est arrivé à destination des équipes œuvrant contre les hépatites. Ces nouveaux crédits budgétaires ont été absorbés par les dettes des hôpitaux. SOS hépatites a rappelé que cette situation est inacceptable !

En 2015, nous avons besoin que l’ensemble des moyens destinés aux hépatites arrivent sur le terrain pour pouvoir prendre en charge les malades maintenant !

3. Nous avons également dénoncé l’application de l’octroi de mer aux nouveaux traitements.

Mais qu’est-ce que l’octroi de mer ?

Il s’agit en fait d’un vieil impôt datant de 1670. A cette époque de nombreux produits étaient importés. Pour favoriser la production locale et le développement un impôt sous forme de taxe a été mis en place : c’est l’octroi de mer. Il est variable d’une île à l’autre mais en Guadeloupe il représente 2,5% + 8,5% de TVA. Il s’agit bien sûr d’un revenu important pour l’économie locale. TIMBRE ACTUA

Mais cet octroi de mer est particulièrement choquant pour les médicaments onéreux et innovants. Ainsi, dans l’hépatite C avec des traitements à 41 000 € il faudra rajouter 6000 € d’octroi de mer ! Scandaleux pour SOS hépatites et ce d’autant qu’il existe des dérogations dans de nombreuses situations comme l’achat de matériel médical lourd (comme un scanner).

Nous réclamons donc l’exonération des droits de mer pour l’ensemble des vaccins et des nouveaux traitements de l’hépatite C.

ACTUA GUAD 2310Quelle semaine hépatante et que de dossiers à monter mais nous faisons confiance à tous les militants de SOS hépatites Guadeloupe ainsi que Stéphane, Joseph & Eric.

Remerciements aux hépatologues Moana Gélu-Siméon et Eric Saillard du CHU de Pointe-à-Pitre.

Pascal Mélin

 

 

 

 

DES MÉDICAMENTS PLUS EFFICACES, MAIS BEAUCOUP PLUS CHERS. UN REPORTAGE DE LCP DIFFUSÉ LE 21/10/2015 A 12:05

VIDÉO (cliquez ici) : DES MÉDICAMENTS PLUS EFFICACES, MAIS BEAUCOUP PLUS CHERS

Depuis l’arrivée sur le marché de nouvelles générations de médicaments comme les AAD (antiviraux à action directe), les antiviraux font des progrès importants dans le traitement de certaines maladies graves.

A l’image du virus de l’hépatite C : venu du laboratoire américain Gilead Sciences, le sofosbuvir affiche un taux de guérison de plus de 90% avec des effets secondaires bien moins importants que les traitements actuels. Une efficacité qui a toutefois un coût non négligeable pour l’Assurance maladie : 488 euros le comprimé. Soit 41 000 euros pour un traitement standard de douze semaines.

D’où la nécessité pour les médecins de bien sélectionner les patients susceptibles d’accéder à ce traitement. Notre journaliste Céline Martel a suivi une personne contaminée par l’hépatite C et qui bénéficie de ce nouveau médicament.

 

 

 

SOS HÉPATITES GUADELOUPE SE LANCE DANS LA CO-FORMATION…

Aujourd’hui, 20 octobre 2015, dans le cadre de sa semaine hépatante en Guadeloupe SOS hépatites se lance dans une co-formation. Il s’agit pour nous d’une expérience originale et que nous allons évaluer avec beaucoup de précision. La co-formation est un concept canadien. Les équipes canadiennes impliquées dans l’éducation thérapeutique avaient constaté que les formations destinées aux professionnels de santé étaient totalement différentes de celles réalisées en ciblant les malades ou leur représentant.

Une co-formation consiste donc, dans la même unité de lieu et d’action à former simultanément des malades investis dans une structure associative avec des professionnels de santé (hépatologues, médecins généralistes ou bien encore addictologues et infirmières). Si le formateur est vigilent, les questions des uns trouveront spontanément leurs réponses dans l’expérience des autres. Mais il faut pouvoir aborder le sujet de façon originale afin que tous aient la même base de connaissance et permettre ainsi de travailler ensemble. Les canadiens avaient remarqué que cette formation initiale commune était le socle d’un travail en réseau et pouvait ainsi définir le transdisciplinaire et non le multidisciplinaire.

La différence fondamentale vient de la connaissance de l’autre et du respect de son champ de compétence, en sachant exactement ce qu’il peut apporter dans la prise en charge d‘un malade et d’une situation particulière.

Et vous ne trouvez pas que cette semaine guadeloupéenne est hépatante ?

Pascal Mélin

SOS HÉPATITES GUADELOUPE : UNE SEMAINE HÉPATANTE…

SOS hépatites Guadeloupe débute sa semaine d’action et de communication. Le début a été lancé ce week-end end par la venue en Guadeloupe du Pr Dhumeaux qui sur la chaine de télévision Guadeloupe première ou il a rappelé les nouveaux enjeux de la lutte contre les hépatites virales. L’incidence de l’hépatite C est identique entre la Guadeloupe et la métropole, par contre il existe sur l’ile trois fois plus de cas d’hépatites. L’accès aux nouveaux traitements et la généralisation de la vaccination contre l’hépatite B étaient les sujets évoqués.ACTUA GUADELOUPE 3 ACTUA GUADELOUPE 2Mais SOS hépatites avait également apporté son concours au 6 ème congrès de l’Association Guadeloupéenne de Formation en Hépato-Gastro-Entérologie (AGFHGE). Toute l’équipe du docteur Saillard du CHU de Pointe-à-Pitre était présente pour refaire le point sur les nouveaux traitements mais aussi les anguilluloses malignes propres à la Guadeloupe. Mais elle était soutenue par deux médecins métropolitains venant de Paul Brousse à savoir le Pr Samuel, spécialiste national en transplantation hépatique et le Dr Vibert, chirurgien hépatique. Il avait été demandé à SOS Hépatites de traiter la question « Prise en charge  du VHC dans les populations particulières ». Commençons par nous demander qui sont les populations particulières? Les médecins, les prostitués, les malades de l’alcool, les usagers de drogue, les co-infectés, les hémophiles, les greffés, les prisonniers, les hépatants aux cheveux blancs, les patients porteurs d’une hépatite aigüe, les dialysés.ACTUA GUADELOUPE PM Comment faut-il définir une population particulière ? Est-ce le statut par rapport à un traitement antérieur par interféron et ribavirine : naïf, répondeur ou non répondeur ? Sont-ils des critères de race ? Est-ce par rapport à des comportements : alcool, usage de drogue, prisonnier ? Est-ce par rapport à des critères personnels: âge, sexe, poids, greffé, dialysé, migrant, patients psychiatriques? Est-ce par rapport au stade de la maladie aigüe, minime, cirrhose ou bien encore co-infection ?

Ces différents regards étaient tous liés à l’efficacité et à la tolérance de la thérapie combinée interféron/ribavirine. Mais devant la puissance et la tolérance des nouveaux traitements, je vous propose une classification avec quatre populations particulières.

1. Ceux qui ne se savent pas porteurs du VHC et sont donc hors dépistage.

2. Ceux qui se savent porteurs du virus mais qui n’ont pas voulu se traiter ou qui sont en échec de traitement. Il regroupe les peureux et les gueules cassées.

3. Ceux qui ont éradiqué le virus soit spontanément soit après traitement.

4.Ceux à qui on refuse l’accès aux nouveaux traitements.

Reprenons chaque catégorie. Pour ceux qui sont hors dépistage, il faut les amener à se reconnaitre comme ayant eu des risque d’être contaminé. Mais l’acte de se faire dépister n’est pas un acte d’abandon c’est un acte de courage, accepter le principe d’être confronter à un résultat positif qui va changer radicalement votre vie. Se dépister c’est sortir de la piste, aller sur un autre chemin. Aujourd’hui le rapport Dhumeaux préconise un dépistage au cours de la vie pour chaque personne. Les outils de dépistage s’améliorent, les TROD (Test Rapide d’Orientation Diagnostique) permettront d’aller au-devant de toutes les populations pour proposer ces dépistages, mais cela nécessitera l’acquisition d’un savoir être pour accompagner l’annonce des résultats et travailler sur la résistance au dépistage et au changement. Ne devient pas TRODEUR qui veut.

Un nouveau métier mais de nouvelles exigences.

2a. Ceux qui se savent porteurs mais qui n’ont pas voulu se traiter : les craintifs. Il ne faut pas essayer de convaincre mais c’est en informant, en rassurant et en expliquant les choses que le patient pourra alors accepter un changement. Il faut rompre la stigmatisation et l’isolement pour maintenir le patient dans une filière de soins en acceptant de découpler l’état des lieux et du bilan ainsi que du traitement.

2b. Les malades infectés en échec d’un traitement antérieur. Ce sont des véritables gueules cassées qui sont tellement dans l’opposition qu’ils sont parfois perdus de vue. Il faut les rassurer et leur permettre à distance d’accéder à de l’information, il faut prendre le temps d’exorciser les anciens traitements, le laisser se raconter et reprendre un diagnostic éducatif. Mais il faudra surtout retravailler et redéfinir avec lui la guérison. On voit alors qu’il n’y a plus de population particulière. Les prisonniers n’ont plus besoin de levée d’écrou pour aller se faire biopsier et l’accès aux soins leurs est légalement garanti, il s’agit d’un problème d’organisation. Les hémophiles comme les co-infectés sont connus et sont dans des filières de prise en soins il faut les traiter dès maintenant. Les résultats sont équivalents à toute population seuls des problèmes d’interaction médicamenteuse persistent, il faut préparer le temps du traitement. Pour fin 2016 tout co- infecté devra être un mono infecté VIH guéri d’une hépatite, les co-infectés persistant seront des malades mal-traités et donc maltraités. Les femmes jeunes doivent être traitées avant toute grossesse pour éviter la transmission mère/enfant. Les malades de l’alcool peuvent être traités à condition que l’on s’assure d’une prise en charge addictologique cohérente. Les greffés ont des résultats identiques aux autres malades. Quant aux hépatiques à cheveux blancs ils semblent toujours tirer un bénéfice à l’éradication virale. Les seules populations particulières semblent être les chirurgiens, les prostitués et les toxicomanes pour éviter toute diffusion de la maladie. Chez les usagers de drogue la question du coût est particulièrement violente, pourtant les risques de décontamination est faible et se situe a moins de 3% mais surtout que l’usager de drogue tire un bénéfice de ce traitement en terme de qualité de vie et d’accueil sociétal.  

3. Ceux qui ont éradiqué le virus spontanément ou après traitement doivent absolument être accompagnés dans cette guérison virologique. Un syndrome de Lazare semble se rencontrer dans 20 % des cas avec une impossibilité de retrouver sa place tellement le patient avait organisé son schéma de vie autour et par son statut de malade.

Pour conclure il semble qu’aujourd’hui les dernières populations particulières sont les cirrhotiques pour qui la maladie n’est pas uniquement virologique et pour lesquels il faut être vigilant à ce que ces malades ne disparaissent pas du suivi. Un vieil adage médical disait « cirrhose un jour, cirrhose toujours », que l’on pourrait adapter en disant «cirrhose un jour, risque toujours » la personnalisation du suivi et de l’accompagnement est alors fondamentale.

Un traitement pour tous, une guérison pour chacun, et une protection universelle.

Pascal Mélin

Diaporama de Pascal Mélin : « PRISE EN CHARGE DU VHC DANS LES POPULATIONS PARTICULIERES »

NOUVEAUX TRAITEMENTS PAS D’EFFETS SECONDAIRES ? OU SI PEU ! ARYTHMIE; EXTRA SYSTOLES; TENSION…

Lors du dernier congrès de l’Association Française pour l’Etude du Foie (AFEF), qui s’est tenu mi-octobre à Toulouse, c’est le message que le Docteur Hélène Fontaine de l’hôpital Cochin  a porté. Le nouveau traitement par antiviraux d’action direct permettent maintenant de guérir la plus  part des patients. Les études ont montré  que seuls 3% des patients arrêtaient leur traitement pour un effet secondaire et dans 2% pour effet secondaire grave. Les agences de sécurités des médicaments américaines et françaises ont été alertées sur des cas de  bradycardie (ralentissement du rythme cardiaque). L’équipe de Cochin présentait donc en séance plénière ses résultats à propos de 415 patients atteints d’hépatite C traité entre le premier janvier  et le 31 décembre 2014.

Dans cette étude 5 cas d’arythmies sévères ont été observées soit 1,2% et toujours dans les premiers jours de traitement. Il y avait 2 femmes et 3 hommes. Deux patients étaient co-infectés et trois avaient des troubles du rythme préalable, un seul patient était préalablement traité par cordarone. Les patients avaient différentes thérapies combinées mais leur point commun était d’être tous traité par sofosbuvir. Trois patients ont dus avoir recours à la pose d’un pace-maker qui n’a été rendu nécessaire que le temps du traitement. Il semblerait que le sofosbuvir puisse avoir une toxicité cardiaque bien que celle-ci n’ait pas encore été démontrée et encore moins expliquée.

BLOG ARYTHMIE 3La position de SOS hépatites face à cette alerte. Les malades ayant des antécédents cardiologiques doivent être vigilants et il est fortement conseillé de faire le point avec son médecin spécialiste et son cardiologue. Les dépressions et les anémies, bien que fréquentes, ne nous ont pas arrêté lors des traitements interféron/ ribavirine ne nous ont pas arrêté alors nous apprendrons à anticiper et à mieux connaitre les 1,2 % de troubles du rythme qui pourraient être liés à l’utilisation du sofosbuvir. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain.

Ne changeons pas de rythme, mais restons vigilants, un traitement pour tous une guérison pour chacun.

Pascal   Mélin

 

 Arythmies cardiaques chez les patients ayant une hépatite chronique C et traités par une combinaison thérapeutique incluant du sofosbuvir

Publié le 13 octobre 2015

Anaïs VALLET-PICHARD

AFEF 2015 – D’après Fontaine H et al., communication orale 17, actualisée

Les anti-viraux directs (AVD) permettent d’augmenter les chances de réponse virologique au traitement avec une tolérance améliorée par rapport aux traitements avec de l’interféron. La tolérance de ces combinaisons est excellente avec 3 % d’arrêt de traitement pour effets indésirables et moins de 2 % d’effets indésirables graves. Mais des cas de bradycardie et de troubles de conduction ont été décrits avec l’association sofosbuvir (SOF) et amiodarone, qui ont fait l’objet d’un signalement à la FDA (Food and Drug Administration) et à l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé). Le but de ce travail était d’analyser de façon prospective l’incidence des arythmies et des troubles de la conduction dans la cohorte de patients traités dans l’unité d’Hépatologie de l’hôpital Cochin (Paris). Parmi les 415 patients, traités entre le 1er janvier et le 31 décembre 2014,  5 cas d’arythmies sévères ont été observés (incidence de 1,2 %) dans les premiers jours de traitement, dont 3 troubles de la conduction (2 formes syncopales). Il s’agissait de 2 femmes et 3 hommes, âge médian de 58 ans (50-75), dont 2 co-infectés par le VIH et 3 ayant des antécédents de troubles du rythme cardiaque. Un seul des 5 patients était traité par amiodarone. Trois patients étaient traités par SOF + daclatasvir (DCV), 1 patient par SOF + DCV + ribavirine (RBV) et 1 patient par SOF + siméprévir (SMV) relayé par SOF + RBV. Dans ce dernier cas, le traitement par SOF + SMV a été interrompu au premier épisode d’arythmie, qui a récidivé après reprise d’un traitement par SOF + RBV sous forme d’un épisode syncopal. Les épisodes d’arythmies, leur traitement et l’évolution virologique sont résumés dans le tableau. Les 3 patients ayant un trouble de conduction ont été traités par implantation d’un pace-maker. La lecture de l’enregistrement des pace-maker à distance de l’arrêt du traitement a montré que le rythme cardiaque ne dépendait plus de la stimulation du pace-maker chez ces 3 patients suggérant une relation entre arythmie et exposition au SOF  Le SOF pourrait avoir une toxicité cardiaque, avec ou sans amiodarone, dont le mécanisme reste à identifier et dont la fréquence reste rare. Ceci pourrait suggérer une prise en charge particulière chez les patients ayant des antécédents de troubles du rythme cardiaque et/ou de la conduction mais le bilan pré-thérapeutique et les modalités de surveillance restent à définir.