SUIVI DE CIRRHOSE : IL NOUS FAUT DES RADIOLOGUES HÉPATANTS…
Cette réflexion vient tout droit de ce que j’ai entendu de nombreuses fois, en consultation.
L’annonce d’un état cirrhotique lorsqu’on a une hépatite B ou C, une NASH ou une hémochromatose est toujours difficile à entendre, et la réponse est toujours la même : « Mais, je ne bois pas ! »
Ce diagnostic est toujours aussi violent dans la culture française, le médecin explique, propose d’autres qualificatifs : fibrose mutilante, F4, etc.
Alors que le malade se sent honteux et réfléchit déjà à comment, il pourra parler de sa maladie à son entourage, sans dire qu’il est dans la famille des cirrhotiques… Le plus simple pourrait être le silence…
Alors, quand le médecin pense que la maladie est acceptée, il explique le programme de surveillance et remet une ordonnance pour réalisation régulière d’une échographie et sur l’ordonnance tendue, on peut lire : surveillance d’une cirrhose.
Il faut alors garder ce papier comme une étoile jaune, mais plié et caché au fond d’un portefeuille. Pas étonnant que cette ordonnance se perde ou que certains retardent le moment de réaliser l’examen.
Il faut comprendre que l’on peut être honteux de tendre l’ordonnance à la secrétaire de radiologie et ne pas oser affronter son regard avec la peur au ventre, l’envie de crier « Mais je ne bois pas » et la terreur en prime, de s’entendre annoncer « Il y a un nodule qui pourrait être un cancer ».
Puis, il y a le regard du radiologue pendant le temps de l’examen « Que pense-t-il de moi ? »
Et que va-t-il me dire à la fin ? La dernière fois, il a osé dire « Vous savez ce qu’il vous reste à faire, il faut définitivement arrêter de boire ! ».
Voilà ce que j’ai entendu hier à la consultation, le ras-le-bol d’un malade cirrhotique qui ne veut plus que l’on pense qu’il a un problème d’alcool.
Alors sa demande est simple « Docteur, je voudrais un radiologue compétent, mais qui ne me regarde pas de travers en me racontant n’importe quoi ! »
Cette histoire m’a fait réfléchir. Probablement que l’on ne passe pas assez de temps pour permettre au patient d’accepter sa cirrhose et son suivi.
Il faut pouvoir lui garantir que tous les médecins, infirmières, radiologues, biologistes seront bienveillants avec lui.
Il ne faut plus que la phrase « Ah, vous avez une cirrhose ! », soit suivi par la réponse « Oui, mais moi c’est dû à une hépatite C ».
D’ailleurs, de telles remarques confirment la stigmatisation de l’alcool et de la cirrhose.
Oui, on a eu raison de s’appeler maintenant SOS Hépatites et maladies du foie…
Mais il nous faut des radiologues hépatants, les mentalités et les regards des soignants doivent évoluer, il y a urgence, car c’est un frein au suivi correct des malades cirrhotiques !
Pascal Mélin