Un des thèmes centraux du colloque ATHS 2017 était « Politique de la Drogue ». De nombreux et brillants orateurs venus d’Amérique pour la plupart nous ont fait part de leur inquiétude quant à la « cécité » des gouvernements occidentaux face au désastre de la politique internationale de lutte contre la drogue.
Le grand paradoxe franco-français, c’est de revendiquer l’éclairage du monde par les Lumières de notre langue mais de ne jamais utiliser les mots qu’il faut pour désigner les choses qui dérangent. Camus disait qu’à force de ne pas utiliser les mots qu’il faut on ne finit par dire que des conneries.Ainsi, en Algérie, ce n’était pas la guerre mais un rétablissement de l’ordre ; un viol commis par un puissant (sic) se transforme en troussage de jupon et la mise en examen de certains se mue en enquête publique visant à rétablir l’honneur de la personne concernée.
Victime de la tradition, Amine Benyamina nous explique ainsi qu’il ne peut pas utiliser les mots de « dépénalisation » ni de « légalisation » mais doit utiliser le mot de « régulation » (France5 Allo docteur 12/10/2017 ou 13/10).En gros, la France rajoute le bâillon à la cécité.Pourquoi museler le premier spécialiste du Pays ?Quel principe s’applique dans une telle démarche ?
Le vrai pragmatisme, celui qui devrait ouvrir ses oreilles à la société civile et écouter la parole des spécialistes, n’est qu’un mythe, qu’une illusion de langage pour masquer l’immobilisme larvaire d’une politique immature.Encore une fois, « on sera les derniers », a dit B. Kouchner qui a rajouté en guise de clôture du colloque « que le pire, c’est la politique ».
Alors il nous faut continuer à faire comme si on ne savait pas que ça va être légalisé tout en sachant que ça va l’être mais que ce que l’on dit aujourd’hui ne vaudra plus rien demain. Le diabolique cannabis va très vite devenir, par l’opération d’une alchimie industrielle, l’ami très cher de tout un chacun.Et la liste des vertus va s’allonger, du cannabis pour ci, du cannabis pour ça, en suppositoire ou effervescent, sur place ou à emporter…
Comme on est pas con, on va en fabriquer du synthétique ; il faudrait être stupide pour utiliser un produit facile à produire biologiquement par une agriculture intelligente et qui possède intrinsèquement toutes les vertus que l’on peut en attendre alors que l’on peut en produire du chimique qui rend accroc et dont les bouseux n’auront pas un centime.La démarche est juteuse, pardon, judicieuse, créer un cannabis dangereux qui rapporte pour dire ensuite, « on vous l’avez bien dit que c’était de la merde ».Quant à espérer que les bénéfices soient réinsérer directement pour aider la jeunesse à sortir indemne et aux fatigués de se reposer cela relève de l’onirisme fou.
Éternel retour, ce qui devrait être simple et de bon aloi va se complexifier et devenir péjoratif. La loi sera votée en catimini, un 31 décembre sûrement, quand il n’y aura plus personne, comme un triste réveillon de 1970…Les consommateurs de cannabis et usagers de drogue en général ne pourront s’en prendre qu’à eux-même, toutes les tentatives de fédérer les bonnes volontés pour développer un projet de légalisation positif et créatif ont échoué .
Car quel modèle va t-on nous proposer ?
Une très bonne étude comparative des modèles Uruguayen et du Colorado nous a été présentée afin de mettre en évidence les différences fondamentales entre un modèle instauré par l’État, dans une politique de liberté et de santé publique, et un modèle instauré par référendum et géré par le marché (les allocutions et les débats sont sur youtube)
Et ce n’est pas une surprise, le modèle Uruguayen arrive progressivement à maturité et les résultats sont bons dans tous les domaines tant au niveau de la santé publique que de la violence.
Le modèle Américain quant à lui, si l’expérience reste positive sur certains points, laisse déjà apparaître de nombreuses failles creusées par la loi du marché et le développement du cannabis de synthèse. Nous conseillons à tous de se documenter sur cette nouvelle plaie. On apprend que le cannabis est un composé de nombreuses substances actives qui s’autorégulent et créent un équilibre dans le produit. C’est ce qui lui donne ses vertus et lui confère un taux de dangerosité très faible pour un usage normal.
La création de cannabis de synthèse a brisé cet équilibre. Les apprentis sorciers ont augmenté la teneur de certaines matières actives (THC, CBD, CBN…) et ont dénaturé le produit.
Et c’est parti ! Premières overdoses au cannabis, dépendance, recrudescence de la violence, mésusage… Le rêve américain quoi !On nous a déjà fait le coup avec la bouffe industrielle et son cortège de NASH, ne tombons pas dans le panneau avec le cannabis de synthèse. Ce cannabis de synthèse est déjà disponible sur internet, pas le darknet maisle net normal et livré par la poste.
Il n’est plus question aujourd’hui de se positionner pour ou contre la légalisation car le débat est clos et la législation actuelle n’est plus qu’un écran de fumée. Il est cependant primordial de se positionner sur le concept que l’on veut développer, sur la qualité des produits à autoriser, sur la destination des bénéfices et catalyser l’émulsion de la liberté individuelle avec la santé publique.
Pour cela, il faut rétablir la parole et redonner un sens aux mots et aux choses, sortir des raisonnements algorithmiques pour renouer avec la pleine conscience, débarrassée des à-priori et des enjeux financiers.
C’est l’affaire de tous car les directions qui seront choisies conditionneront demain l’environnement de chacun dont on sait aujourd’hui qu’il est le facteur prédominant des troubles du comportement.