BAS LES MASQUES !

Ce mois de février élastique est le traditionnel mois du carnaval un peu partout dans le monde.

Le plus célèbre n’est pas à Rio mais à Venise où il existe depuis plus de 1000 ans. Le peuple profitait alors des derniers jours du carême pour célébrer une fête masquée où les critères d’appartenances sociales disparaissaient pour quelques heures.

La hiérarchie était renversée, toutes les contraintes exercées dans l’année, rejetées pour un moment, l’individu fondu dans le groupe légitimant ainsi ses actions.

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Tout pouvait se dire se faire et se défaire sans signe ni de richesse ni de pauvreté.

Un des masques les plus emblématiques du carnaval de Venise est celui qui évoque un bec d’oiseau : le fameux masque à bec d’oiseau porté par les médecins de la peste au 14ème et au 17ème siècle lors des grandes épidémies et célèbre aussi dans la Commedia Dell’ Arte.

Les « médecins becs » les portaient pour aller au contact des populations pestiférées. À l’époque, on pensait que la peste se transmettait par l’air et au contact de la respiration.

Ces masques avaient donc deux fonctions : d’abord faire peur et tenir les gens éloignés et ensuite, comme ils étaient remplis de mousse d’herbe de fleurs odorantes couvrir les odeurs de la maladie et en limiter ainsi sa propagation.

Quand au moment du carnaval la population voulait exorciser pour oublier et se sentir libre, c’est donc naturellement qu’elle s’est appropriée le masque à bec d’oiseau pour le décliner ensuite vers le masque vénitien que nous connaissons tous.

Pourtant, on a longtemps pensé que cette tenue était un réel bouclier contre la transmission de la peste. Ce n’était pas le masque qui protégeait mais la tenue complète, qui était constituée entre autre d’une tenue de cuir très serrée évitant ainsi les piqures de puces. Mais c’est bien des années plus tard qu’on découvrira que la peste était en réalité transmise par les puces de rat.

Pourquoi je vous raconte cette histoire ? Parce que se termine le mois des carnavals et à l’heure où l’on pense connaître les infections et les épidémies, les hommes luttent contre ce qu’il ne comprennent pas en s’inventant des croyances ou en se créant des coupables.

À l’heure où l’on est prêt à sacrifier l’obligation de vaccination sur l’autel de la liberté individuelle on devrait plutôt se souvenir de nos croyances passées.

La santé ne peut pas être qu’une mascarade et les malades de simples figurants d’un carnaval.

Pascal Mélin