Hépatite C : faire reconnaître sa contamination transfusionnelle c’est long et compliqué !
Dans le droit français actuel, c’est à la victime d’apporter la preuve de sa contamination.
Voici l’histoire d’une patiente sur presque 10 ans : on lui a découvert l’hépatite C sans aucune explication. Oui mais voilà il y a longtemps, elle a subi l’ablation de son utérus dans un établissement chirurgical.
Après de nombreuses tractations, elle finit par avoir accès à son dossier médical (ce qui est juste normal dans la loi) et découvre que pendant son opération, au bloc opératoire (elle était bien sûr endormie), elle a reçu 3 poches de sang.
À l’époque on ne connaissait pas le virus de l’hépatite C mais plus grave lorsqu’elle s’est réveillée personne ne lui a dit qu’elle avait été transfusée ! Cela ne figurait même pas dans le compte rendu opératoire envoyé au médecin traitant. Il est vrai que l’on a l’habitude de dire que le chirurgien opère et que l’anesthésiste endort et transfuse.
La preuve transfusionnelle en main la patiente engage donc une reconnaissance juridique avec demande d’indemnisation. Le dossier aurait pu être simple mais arrivée au procès la patiente découvre avec effroi que la défense de la partie adverse (le centre de transfusion) ne reconnaît pas la preuve en argumentant que la patiente est inconnue du centre de transfusion et que jamais aucune poche de sang n’a été délivrée à son nom !
Après enquête le pot au rose (et au cirrhose) était découvert ! À l’époque, l’établissement était loin du dépôt de sang et pour des actes chirurgicaux réputés hémorragiques des poches de sang étaient commandées de façon préventive. Elles étaient donc délivrées et facturées ! Mais dans de nombreux cas la chirurgie se passait bien, sans encombre et sans besoin de sang. Mais les centres de transfusion ne reprenaient pas les poches car pour eux ils ne savaient pas comment ces dernières avaient été conservées. Ils proposaient la destruction pure et simple des poches. Et c’est là qu’arrive le problème ! Connaissant les difficultés d’obtenir des poches, certains établissements les conservaient quelques jours dans de bonnes conditions et les utilisaient auprès d’autres patients qui étaient compatibles ! Voilà ce qui était arrivé à notre pauvre malade. Madame X avait été transfusée avec des poches délivrées et fléchées pour madame Y. Elle avait donc attrapé l’hépatite C par une poche qui ne lui était pas destinée initialement.
Madame X a eu gain de cause et a pu faire valoir ses droits. Mais on voit là, la limite de la traçabilité qu’on nous oppose maintenant. Qu’est-ce qui est délivré, pour qui et est-on bien sûr que ce soit la bonne personne qui a reçu l’administration ?
Le pire c’est qu’on croyait bien faire, pas de gaspillage ! Aujourd’hui, madame X est guérie et reconnue dans ses droits. Mais que de souffrances !
Pascal Mélin