DOCTEUR J’AI DÉNERVÉ VOS FOIES…

Je me rendais chez mon boucher favori pour aller chercher ma commande. J’avais réservé  2 foies gras frais pour pouvoir me faire plaisir en les cuisinant.

Mais comment entendre cette phrase « Docteur, j’ai dénervé vos foies ».

Cela partait d’un bon sentiment mais je me lançais dans une explication pour faire la démonstration à mon boucher qu’il n’y avait pas de nerfs dans le foie. Combien se sont déjà fait sauter un nerf, mais ce qu’on appelle les nerfs du foie sont en fait les canaux biliaires qui se regroupent pour faire le cholédoque et éliminer la bile. Il est important de les enlever car il donne un gout acide au foie.

Mais il n’y a pas de nerfs dans le foie, seule la capsule de Glisson qui entoure le foie est innervée ainsi que la vésicule biliaire sous le foie et le cholédoque. Ainsi des cailloux dans la vésicule ou le cholédoque donne des douleurs. Elles peuvent également être déclenchées par une augmentation brutale du volume du foie qui vient alors mettre en tension la capsule de Glisson. Par contre le foie n’ayant pas de nerfs, l’apparition d’une tumeur à l’intérieur même de cet organe ne déclenche pas de douleurs ce qui malheureusement  ne donne aucun signe pour un dépistage précoce.

Alors par pitié, ne dites plus que vous achetez des foies dénervés car c’est une erreur anatomique.

Mais le foie gras c’est quand même bon.

Pascal Mélin

LA PAROLE DES MALADES. TÉMOIGNAGES DU FORUM

 

Pendant notre Forum annuel  de nombreux malades adhérents ou non, sont venus nous retrouver pour participer à un événement de démocratie sanitaire directe. Deux femmes ont apporté des témoignages qui m’ont marqué et que je voudrais vous faire partager.

La première prend la parole lors des échanges avec la salle sur l’importance dans la prise en charge des malades atteins d’hépatite C, de poursuivre et d’intensifier le dépistage.

Je travaille aux Hôpitaux de Paris je suis en arrêt de travail depuis 9 mois, on m’a dit de me faire dépister, c’est ce que j’ai fait on m’a alors découvert le virus de l’hépatite C puis on m’a dit il faut faire un bilan, j’étais angoissé mais on m’a rassuré en m’expliquant qu’il y avait des traitements très efficaces. J’ai fait tous les examens et on m’a dit que j’avais la chance d’avoir une hépatite minime, et que cela ne nécessitait pas de traitement car en 2015 on ne traite que les personnes atteintes d’une forme grave !

Alors pourquoi m’avoir dit de me dépister ?

Le dépistage n’a de sens que si on peut proposer d’être actif non ? C’est injuste car je ne me fais pas à l’idée d’être malade et infectée, je me sens sale.  Avant je ne comprenais pas ma fatigue maintenant je suis toujours incomprise mais en plus je suis prisonnière de mon savoir. Vous les professionnels pensez à cela avant de proposer un dépistage.

La deuxième patiente a pris la parole lors du débat sur l’accès au soin et le coût du traitement.

Pour mois les règles du jeux ont changées et c’est inacceptable. En effet, il y a quatre ans puisque j’étais infecté par un génotype 4,  le spécialiste qui me suivait m’a proposé  un traitement par interféron pegylé et ribavirine. J’ai dit oui et j’y ai cru. Car après quelques mois de traitement, le virus était indétectable dans mes prises de sang. Le traitement a duré 1 an et ça n’a pas été une partie de plaisir tous les jours. Mais quelle ne fut pas ma déception lorsque quelques semaines après l’arrêt de mon traitement le virus réapparaissait, faux espoir. Mon spécialiste m’a dit qu’il ne fallait pas baisser les bras et que je devais me faire suivre car de nouvelles molécules plus efficaces arrivaient bientôt. Je l’ai encore écouté et lors de ma dernière visite, en début d’année, il m’a dit que  les nouveaux traitements sont disponibles, ils sont simples, plus de piqures, et ne durent que quelques mois et ont plus de 9 chances sur 10 de vous guérir !

J’étais heureuse et reprenais espoir.

On a réalisé tout le bilan et c’est alors que la sentence est tombée, j’avais  un score de lésion à 2 sur une échelle de 0 à 4  et le traitement était réservé aux personnes en stade 3 ou 4.

Je n’en revenais pas le médecin me disait que je n’étais pas encore éligible mais moi je ressentais que je ne le valais pas, que je ne le méritais pas. C’était trop injuste. On n’osait même me dire que j’avais de la chance que ma maladie ne soit pas plus grave.

Mais ce n’est jamais une chance d’être malade personne n’a le droit de dire ça !

Ces deux témoignages m’ont  ému  et résument à eux seul le sens de notre engagement. Quelle est la place du désir du malade ? Pourquoi se faire dépister si on ne peut traiter tout le monde? L’annonce de devoir vivre avec son infection est véritablement une double peine (pour ne pas dire une double épine) et nécessite alors un renforcement des compétences et des réseaux d’accompagnement spécifique. Qu’il est dur d’avoir faim devant une vitrine de nourriture et de ne pouvoir manger. Pourquoi les patients en échec d’un premier traitement ne seraient pas prioritaires pour accéder aux nouvelles molécules quelques soit leurs score de fibrose et de lésion ? N’est-ce pas comme cela que ça fonctionne dans d’autres domaines, comme la cancérologie ?

Merci à ces deux personnes qui ont eu le courage de prendre la parole  pour dire MOI …

Ces témoignages ont éclairé nos débats et sont venus nourrir les recommandations que nous ferons et porterons.

Merci.

Pascal Mélin

LES DISCOURS D’OUVERTURE… AVANT LA VIDÉO DU FORUM

PASCALBonjour à tous & bienvenue au 17 ème Forum de SOS hépatites.

Je voudrai d’abord excuser notre Président Michel Bonjour qui est souffrant et ne pourra être des nôtres, nous essayerons de pallier au mieux. Nous sommes accueillis pour deux jours dans les locaux de Médecin du Monde (MDM) pour moi ça n’est pas rien, et je souhaite vivement remercier son Président monsieur Thierry Brigaud (à qui je vais donner la parole) et toute son équipe qui nous a accueilli et nous aidera pendant ces deux jours, avec un remerciement tout particulier aux techniciens .Merci aussi à tous les bénévoles et salarié de SOS hépatites qui ont participer à la réussite, car je n’en doute pas que ce forum sera une réussite . Cette année il prendra une forme particulière car de tous nos débats et nos échanges nous aurons le souci d’établir des recommandations que nous porterons au Ministère de la Santé, mais aussi auprès de nos partenaires comme le Collectif Inter Associatif des Associations de  Santé (CISS), dont nous sommes membres.

Merci MDM de nous accueillir car pour nous, vous êtes l’exemple du lien entre l’exclusion et la maladie et de son nécessaire combat conjoint. Vous êtes aussi les fers de lance des programmes d’échange nord/sud permettant la diffusion du savoir et des soins. Je voudrai puiser mes exemples dans la réalité internationale. Dimanche dernier le 22 mars, on célébrait la journée mondiale de l’eau. Mais savez-vous que presque 2 milliards de personnes n’ont pas accès couramment à de l’eau potable ? Savez-vous que pour cette raison 30% des hépatites (particulièrement la A & la E) sont dues à l’utilisation d’une eau contaminée? Il en est de même pour les seringues quand en France nous évoquons la seringue à usage unique, nos pensées se tournent naturellement vers les usagers de drogue. Mais savez-vous que les seringues sont également réutilisées et mal décontaminées dans des mains de soignants. C’est encore une cause de transmission du VIH, du VHB ou du SIDA. L’OMS estime entre 3 et 5 millions le nombre de personnes qui chaque année contractent l’hépatite C par l’utilisation de seringues mal nettoyées.

chier-dans-de-l-eau-potableL’accès à l’usage unique des seringues à l’échelon planétaire, que l’on soit toxicomane ou soignant, est une lutte commune comme l’est celui de l’accès à l’eau potable ou aux toilettes.

L’actualité c’est aussi le conseil constitutionnel qui, il y a quelque jours, a du se prononcer sur le caractère légal ou non  du principe de vaccination. La France et l’Italie garde des obligations légales de vaccination. Pour la France le DTP (Diphtérie Tétanos Polio) est obligatoire. On savait déjà que les vaccins n’avaient plus le vent en poupe dans l’hexagone, pourtant, pour la première fois on ose remettre en cause le principe même de la vaccination. On a tremblé, mais heureusement le Conseil Constitutionnel a confirmé que les vaccins devaient rester dans la loi. Pourtant l’actualité nous révèle que de nombreux vaccins sont en rupture d’approvisionnement, est- ce acceptable ?

Le défaut de vaccination contre l’hépatite B  en France amènera 6000 enfants à naitre d’une mère porteuse de l’hépatite B. Combien de contaminations y aurait-il ? Est-il acceptable en 2015, alors qu’un vaccin existe depuis 40 ans, de se contaminer simplement en naissant !

Que dire de l’accès aux soins de l’hépatite C. En septembre dernier SOS Hépatites associée à d’autres associations à porté dans les locaux de la DGS la réflexion sur l’accès et le coût des nouvelles molécules. Pour autant, en étant plus que jamais capable de guérir d’une maladie chronique, l’hépatite C induit des changements de repères. Il ne faut pas opposer les anciens aux modernes. Les nouveaux malades dépistés en 2015 pourront vivre l’hépatite C comme une maladie aiguë, entre l’annonce et la guérison, il n’y aura plus que quelques mois. Par contre, les anciens informés depuis de nombreuses années vivront forcément différemment leur maladie.

Le rapport d’experts est un progrès, nous l’avions appelé de nos vœux et nous avons largement participé à sa réalisation. Pourtant la première recommandation que nous ferons lors de ce forum, c’est bien de tenir compte des recommandations des experts. L’accès préférentiellement des malades incarcérés n’a pas été retenu tout comme le développement des SCMR (Salle de Consommation à Moindre Risque) qui est pourtant un outil important de contrôle de l’épidémie. Pourtant, seuls les malades les plus graves seront traités cette année et pour contrôler et réguler l’accès au traitement on a inventé les RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire) qui sont décriés par bon nombre de malades et de médecins. Mais ces RCP, sont-elles un garant de l’excellence ou une organisation de la limitation. Les nouveaux traitements : une puissance impuissante. Les fiches de RCP sont critiquables car elles ne résument que l’état  hépatique, abandonnant les informations sur l’éducation thérapeutique, le social et le psychologique : nous ne pouvons être résumé à l’état de nos foies. L’épidémie change et  évolue nous devons accompagner les espaces de prise en soins des patients de demain. Les CSAPA et les CAARUD. Il nous faut des programmes d’éducation et d’accompagnement spécifique, il nous faut aussi développer l’accompagnement de la guérison, faire des programmes qui prendront mieux en compte l’entourage  ou qui seront adapté à l’hépatite B. L’amélioration des résultats des traitements ne peuvent s’associer à la diminution du dépistage, ou à la mise en panne de la vaccination contre l’hépatite B ou bien encore, à l’effondrement des programmes de protection comme la RDR qui plus que jamais doit s’adapter. L’enquête que SOS hépatite avait faite en 2012 montrait bien la difficulté à vacciner dans les CSAPA ou bien encore à s’approprier de nouveaux outils comme les TRODs.

Pendant ces deux jours nous oserons aussi une réflexion économique  n’est-il pas temps de repenser notre système de santé et oser d’autres modes de financement ? Pourrait-on imaginer des coûts de traitement variables en fonction de la maladie, pourrait-on payer le traitement qu’en fonction du degré de fibrose ?

Enfin, il y a deux jours à travers la nouvelle loi de santé le DROIT A L’ OUBLI a enfin été reconnu. C’était une demande que les malades guéris de cancer formulaient depuis longtemps. La possibilité de ne pas être attaquer pour dissimulation lorsqu’après 5 ans de guérisons, ils n’étaient plus obligé de décliner leur passé et payer ainsi des sur taxes. Nous aussi dans l’hépatite C, après guérison virologique, réclamons le droit à l’oubli ! Mais n’oublions pas en cette veille de SIDA action que nous réclamons toujours l’accès à l’assurance pour tous.

Deux jours de travail, d’information et de réflexion, pour émettre les recommandations des malades et les attentes des soignants.

Bon travail, merci à tous soignants, malades, entourage d’être présents.

Pascal Mélin, Vice-Président de SOS hépatites.

 

Thierry BRIGAUD, Président de Médecins du Monde

Portrait-Thierry-Brigaud_largeBonjour à toutes et à tous,

C’est pour Médecins du Monde une fierté et un honneur d’accueillir le 17ème FORUM NATIONAL SOS HEPATITES.

J’aimerais pour commencer vous parler de Tanzanie et de notre programme d’échange de seringues. L’héroïne est bien présente en Afrique. Désormais ce sont des habitants des rues qui s’injectent. Nombreuses sont les personnes co-infectées par le VIH et le VHC. Il nous faut donc réaliser un travail de prévention, un travail de dépistage, un travail d’orientation vers des services qui pourront mettre en route des traitements antiviraux.

En Birmanie, ce sont aussi les usagers de drogue qui sont massivement infectés par le virus de l’hépatite C. Deux travailleurs pairs sont en prison parce qu’ils sont usagers de drogue. Mais en Birmanie, nous continuerons à soigner et à témoigner.

La question de l’hépatite C est donc centrale pour Médecins du Monde. C’est pour cela que nous avons fait un plaidoyer en faveur des salles de consommation à moindre risque qui, je l’espère, ouvriront prochainement.

Notre campagne sur le prix des antiviraux était aussi une obligation. Le prix, que je dois bien qualifier d’exorbitant, du Sofosbuvir met notre système de protection social en danger en France. Ce prix pourrait demain nous conduire à rationner des soins ou, pire encore, à trier des malades. Vous le savez, constatant que le prix de cette molécule était établit plus sur des considérations financières que sur le cout réel de la recherche médicale, nous avons décidé en dernier recours d’attaquer en justice. Et la justice passera.

Cette campagne est aussi l’occasion d’interpeler nos sociétés sur le mécanisme de fixation du prix des médicaments et de leur remboursement par nos systèmes de protection sociale.

Médecins du Monde résonne aussi avec votre forum. Dans le prochain numéro de la revue Humanitaire consacré à la lutte contre les infections, il y aura tout un article consacré à l’hépatite B. La lutte contre l’hépatite B n’est pas assez prise en compte dans les politiques de santé publique internationales :

Quelles stratégies de vaccination ?

Comment protéger les acteurs de soins dans les pays dits du Sud ?

Donc beaucoup de sujets pour vos deux jours de forum.

Je voudrais vous souhaiter un grand succès dans vos travaux qui seront j’en suis certain fructueux et de parvenir à l’élaboration de recommandations déterminantes.

Et je tiens aussi à vous redire que notre maison vous est ouverte.

 

 

AVEZ-VOUS DES COMPETENCES PSYCHOSOCIALES ?

Le concept a été développé dans les années 1980 en matière d’éducation scolaire. Puis, ce même concept a été adapté aux programmes d’éducation thérapeutique, pour enfin être reconnu par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en 1993 avec la définition suivante : « Les compétences psychosociales sont la capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. C’est l’aptitude d’une personne à maintenir un état de bien-être mental, en adoptant un comportement approprié et positif à l’occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre culture et son environnement. »

Pour être plus précis on considère qu’il y a 10 compétences à acquérir :                                                                                              BLOG COMPETENCES

1/ Savoir résoudre les problèmes.

2/ Savoir prendre des décisions.

3/ Savoir une pensée créative.

4/ Savoir une pensée critique.

5/ Savoir communiquer efficacement.

6/ Être habile dans ses relations interpersonnelles.

7/ Avoir conscience en soi.

8/ Avoir de l’empathie pour les autres.

9/ Savoir gérer son stress.

10/ Savoir gérer ses émotions.

Vous, je ne sais pas, mais moi je ne suis pas certain de les avoir toutes ! Et ce ne sont là que les compétences psychosociales à acquérir pour être un citoyen standard. Ce que l’école a fait avec chacun de nous normalement ! Maintenant, imaginez mettre tout cela à la sauce maladie chronique. Pour être autonome avec une maladie chronique il vous faudra acquérir ces différentes composantes. Qui peut prétendre avoir tout bon ? Je ne suis même pas sûr que les soignants que l’on nous présente en éducation thérapeutique puissent eux-mêmes avoir toutes ces compétences. Être malade ce n’est pas être parfait, d’ailleurs si nous étions parfaits nous ne serions pas malades.

L’éducation thérapeutique c’est prendre une personne dans l’état dans lequel elle se présente et lui  faire acquérir les compétences psychosociales pour accéder aux soins et, éventuellement à une guérison, en lui permettant de trouver des outils ou des leviers extérieurs si elle n’a pas l’ensemble des capacités nécessaires à sa prise en soins. Bon nombre de personnes aujourd’hui sont en déficit de compétences psychosociales et on peut même dire que lorsque l’on n’arrive pas à entrer en communication avec une tierce personne c’est parce que nos compétences psychosociales sont trop différentes. Voilà un débat à porter concernant les patients en échec d’éducation thérapeutique.

Pascal Mélin

NOTRE 17EME FORUM S’EST TENU LES 26 ET 27 MARS DERNIERS À PARIS…

 

… dans les locaux de Médecins Du Monde et il a tenu toutes ses promesses. Plus de 200 personnes étaient présentes, malades, entourage ou professionnels.

Le Forum a été clôturé par Madame Françoise Weber, Directrice adjointe à la DGS, mandatée par la Ministre et le Directeur Général de la Santé.

Durant ce Forum, nos échanges nous ont amenés de nombreuses recommandations mais nous avons souhaités mettre trois  axes plus particulièrement en avant. Ces trois recommandations ont étés remises à Danièle Déclerc-Dulac  Présidente de SOS hépatites Centre Val de Loire  et à Madame Weber. Les voici.

1/ Les UTEP et les programmes d’éducation thérapeutique doivent être renforcés et diversifiés.

En ces temps de contraintes budgétaire il serait tentant de supprimer les équipes d’éducation thérapeutique au vu des progrès apportés aux traitements de l’hépatite C, avec plus de 95 % de guérison en 3 mois. Plus que jamais les malades et les soignants demandent que les programmes d’éducation ne se résument pas uniquement à  accompagner le temps du traitement pharmacologique. Il faudrait donc développer des programmes sur trois temps, celui  du  dépistage à l’évaluation, puis de la surveillance ou du traitement et enfin l’après traitement. Il faudrait de plus développer des programmes spécifiques à certaine situation. Programme pour les patients addicts, pour les porteurs de l’hépatite B ou de co-infection, mettre le dépistage de la l’hépatite B chez la femme enceinte au premier trimestre pour pouvoir ensuite  dérouler un programme d’accompagnement. Pour les malades au stade de la cirrhose et enfin  des programmes post-guérison ou pour les usagers de drogue, des programmes d’accompagnement à la non recontamination.

2/ les RCP (Réunion de Concertation Pluridisciplinaire) officialisées depuis fin décembre 2014.

Elles sont décriées car centrées sur les centres de référence. Lors du Forum, il a été rappelé la nécessité d’étendre les lieux de RCP pour mieux mailler le territoire, en restant au plus près des patients, en reconnaissant des centres dans les hôpitaux généraux mais aussi  auprès des spécialistes libéraux. Les RCP devraient pouvoir bénéficier des nouveaux modes de communication telle la visioconférence. Mais il nous semble  fondamental, en cas de transmission de données, que les communications soient sécurisées. On pourrait même réfléchir à un guide méthodologique sur la tenue et l’organisation d’une RCP sous l’égide de l’HAS. Que dire du contenu de la fiche ? Le mode de contamination ne devrait pas figuré, et pourquoi demander la présence d’un professionnel de l’éducation et du travail social alors qu’aucune donnée propre à ces deux champs ne figure sur cette fiche ? Pourquoi n’est-il pas prévu la présence obligatoire d’un addictologue ou d’un psychiatre, pourquoi les professionnels présents ne figurent- ils pas sur la fiche? Pourquoi l’information du patient et son accord ne figurent-t-ils pas? Et pourquoi n’y aurait-il pas  un représentant des usagers dans les RCP? Pourquoi n’est-il pas possible d’étendre les RCP au domaine des infections virales B? Il y a de nombreuses adaptations de ce nouveau dispositif qui semblent pour le moins bâclé à moins qu’il ne s’agisse simplement d’un contrôle budgétaire?

3/ Le droit à l’oubli.

La loi de santé qui est en débat à l’assemblée, reconnait le droit à l’oubli qui vient d’ailleurs  d’être signé à l’Elysée en présence du Président de la République et de nos représentants d’usagers. Ce droit à l’oubli est réclamé par les malades guéris d’un cancer qui sont d’abord déclarés en rémission puis après quelques années sont dits guéris. Mais cette guérison n’est pas toujours sociale ou sociétale. Les patients ne peuvent pas contracter d’assurance ou de prêt bancaire. S’ils ne signalent pas leurs antécédents, ils peuvent alors être accusés de faux et rendre ainsi leur contrats caduques et non avenus. En 2015 le droit à l’oubli permet aux malades, sous certaines conditions, de ne plus signaler leur cancer. Il semble évident que ce progrès doit très rapidement s’appliquer aux patients guéris d’une hépatite C qui n’étaient pas en stade grave. Le droit à l’oubli de l’hépatite C semble évident.

Nous avons élaboré d’autre recommandations lors de ce Forum, mais ces trois axes principaux nous semblent des plaidoyers de la plus haute importance et qui ont le mérite de n’engager que des  décisions politiques sans beaucoup de moyens.

Mais faut-il être économe pour être entendu ?

Pascal Mélin

POUR DES HOMMES FORTS, UN FORUM !

Cette semaine sera celle de notre Forum 2015. Le dernier s’était tenu en novembre 2013 et nous avions décidé de le déplacer au printemps. C’est chose faite.

Mais qu’est-ce qu’un forum ? Etymologiquement, le forum dans la Rome antique, c’est la place du marché où l’on peut se retrouver pour débattre et échanger des idées. C’est toujours ce que font nos hommes politiques avant les élections. Pour nous notre Forum Annuel, c’est un moment d’échange et de partage, un espace de confrontation pour construire ensemble et définir une ligne politique qui émane de tous.

Pour la session 2015, nous voulons rassembler les réflexions des malades et des soignants car il nous semble que si les mots et la souffrance sont différents, les revendications sont identiques.

Pour permettre au plus grands nombre de participer à cette construction, deux points essentiels sont à rappeler :

Premièrement, malgré les difficultés financières de notre association nous avons voulu rendre notre Forum le plus accessible possible.

Deuxièmement, ce forum se tiendra dans les locaux de Médecins du Monde avec qui, nous partageons beaucoup de valeurs dont l’accès aux soins pour le plus grand nombre. Nous tenterons de tirer de ces échanges quelques idées fortes qui seront nos recommandations pour l’année à venir.

Nous partageons votre quotidien, ce qui nous motive à défendre vos idées.

Pascal Mélin

ET LES EXPERTS AUSSI…

Ne vous méprenez pas, je ne parle pas des centres experts de l’hépatite C ni même des réunions de concertation multidisciplinaire.

Non ! blog expert 4

Je veux parler de l’épisode 3 de la saison 15 de la série culte « Les Experts ». Dans cet épisode intitulé avec beaucoup d’originalité « Le virus dans le sang », deux inspecteurs arrivent sur une scène de crime face à une victime décédée d’une fièvre ictéro-hemorragique. La scène est mise en quarantaine par le CDC (Centers for Disease Control : Centre de Contrôle des Maladies) qui a été appelé à la rescousse. Bien sûr les deux agents se déshabillent et sortent en combinaisons étanches pour être emmenés en isolement et placés sous surveillance car il n’existe pas de traitement. On apprend alors qu’il s’agit bien d’une fièvre ictèro- hémorragique due à un virus cousin d’Ébola, à savoir le virus ibare ou virus de la fièvre bolivienne ou bien encore le typhus noir. La mortalité de ce virus varie de 5 à 30% et non de 80% comme l’annoncent les experts, mais c’est émotionnellement plus vendeur.

Pourtant, l’histoire de ce virus est intéressante par ses enseignements historiques. Ce virus à ARN de la famille des arena viridae a été observé pour la première fois dans le village de San Joachim en Bolivie (d’où son nom de fièvre bolivienne) et mis en évidence un an après en 1963. On pensait alors que le vecteur de ce virus n’était autre que certains moustiques, on a donc utilisé des quantités massives de DDT et la maladie a disparue confirmant ainsi l’hypothèse. Pourtant, quelques années plus tard, une nouvelle épidémie explosait et permettait alors de comprendre que le vecteur était finalement une souris. Le DDT avait certes tué les moustiques mais il s’était accumulé tout le long de la chaine alimentaire faisant disparaitre les souris et les chats. Ce qui avait induit en erreur les scientifiques. Mais le chat ayant disparu, les souris purent se multiplier rapidement  et faute de prédateur, une nouvelle épidémie apparaissait alors. L’homme pense toujours pouvoir maitriser les choses… Restons humbles.

Même les experts !blog expert 2

Encore une série qui utilise le chiffon rouge des virus pour mettre de l’intrigue et du drame, rassurez-vous les héros ne meurent pas. J’en viendrais presqu’à regretter les séries de mon enfance, les Laurel et Hardy, Fifi Brindacier, Zorro, L’homme qui tombe à pic, La croisière s’amuse, Les mystères de l’Ouest, Les Envahisseurs, Les têtes brulées, Les brigades du tigres ou bien encore les Arsène Lupin. Au fait, si vous avez vu plus de la moitié de ces séries, vous ne devez pas avoir loin de 50 ans ou plus mais avez-vous déjà pensé à vous faire dépister pour l’hépatite B & C ?

Pascal Mélin

HÉPATITE C ET CIRRHOSE : IL FAUT LUTTER CONTRE LE DIABÈTE…

CERCLE BLEU 2C’est la conclusion d’un travail réalisé par l’équipe de l’INSERM 149 de Beaujon. Quand le diagnostic de cirrhose est posé, l’espérance de vie est significativement diminuée par les complications induites, sensibilité aux infections, insuffisance rénale, ascite ou cancer du foie. Mais il semble bien que l’existence d’un diabète associée à une cirrhose augmente significativement les complications induites.

Pour cette étude, 348 patients atteints d’une cirrhose due au virus de l’hépatite C ont été suivis de 2006 à 2008. Lors de l’entrée dans l’étude, les patients ont été analysés selon leur co-infection VIH ou VHB, leur âge, leur poids, la gravité de leur cirrhose et leur consommation d’alcool. Ensuite, pendant 2 ans les patients ont été suivis et surveillés selon l’apparition de complication ou de décès ou encore de greffe. À l’entrée dans l’étude, 30% des malades présentaient déjà un diabète et la moitié de ces patients sont décédés pendant les deux ans de surveillance. L’analyse des données a prouvé que l’existence préalable d’un diabète était un facteur à part entière de décès.

Le professeur Dominique Valla co-auteur de cette étude déclare : « Si la cirrhose n’est pas encore trop grave mais que le patient est diabétique, ses chances de survie sont réduites par rapport à un non diabétique ».

Cette preuve étant acquise, se pose maintenant la question du dépistage du diabète chez les cirrhotiques et de prouver que la prise en charge correcte et optimale du diabète permettrait une réduction significative des complications et donc de la mortalité.

Ce travail montre à quel point l’entrée dans une cirrhose n’est pas la fin d’une histoire mais le début d’une autre et qu’il faut alors adapter les stratégies de dépistage et de surveillance. Mais cette étude qui portait sur des patients cirrhotiques avec une hépatite C est-elle généralisable à tous les patients atteints de cirrhose ? Voilà une question hépatante mais qui nous amène à dire à tous les cirrhotiques de surveiller de près leur diabète.

Pour en savoir plus : L. Elkrief et coll. Diabetes mellitus is an independent prognostic factor for major liver-related outcomes in patients with cirrhosis and chronic hepatitis C. Hepatology, édition en ligne du 20 mai 2014.

Pascal Mélin

SÉRIES ET VIRUS : AVEC SCORPION ÇA CONTINUE…

Vous avez vu Scorpion, la nouvelle série de la chaine M6 ? À nouveau on injecte du virus car c’est ça qui est vendeur aujourd’hui…

Le deuxième épisode de la saison 1 s’intitule Antivirus. Mais le sujet est pour le moins tiré par les cheveux car il amène la confusion entre virus informatique et virus infectieux… Cela peut sembler particulier mais lors d’un forum de SOS hépatites, il y a deux ans, nous avions fait débattre un spécialiste de la lutte antivirale informatique avec un médecin responsable de lutte antivirale. Outre la proximité de vocabulaire nous avions compris que les concepts étaient proches entre le milieu informatique et la lutte infectieuse.

Dans la série Scorpion, le méchant contamine la fille du gouverneur avec, bien sûr, un virus inconnu qui s’en prend au foie et aux poumons, tuant ses victimes en quelques jours. Comble du raffinement virologique, il contamine également les ordinateurs de ses victimes.

Mais ne vous inquiétez pas, les gentils arrivent à débusquer le méchant, trouver les différents virus & à les neutraliser. À tous les scénaristes qui sont en train d’écrire le scénario des séries de l’année prochaine : contactez SOS Hépatites, nous débordons d’idées à base de virus est c’est pour le moins très tendance.

Scorpion – encore une série pour laquelle on en pince pas !

Pascal Mélin

HÉPATITE C : IL FAUT RESISTER AUX RÉSISTANCES…

cible rouge 2Les nouveaux traitements de l’hépatite C par des Antiviraux d’Action Directe (AAD) permettent de plus en plus souvent de guérir les porteurs de virus de l’hépatite C. Pourtant les rares personnes qui ne peuvent guérir ont acquis le plus souvent des virus résistants. La prochaine étape dans la lutte contre l’hépatite C est probablement l’analyse et la compréhension des mécanismes d’acquisition des résistances par les virus.

C’est ce sujet avant-gardiste qu’a choisi d’étudier l’équipe du Pr Thomas Baumert de l’Unité Strasbourgeoise U1110 de l’INSERM.

Quand une cellule du foie est infectée par le VHC, elle libère de nouvelles particules virales pour contaminer de nouvelles cellules hépatiques : deux voies sont alors possibles.

La plus classique, c’est la libération dans la circulation générale où les virus sont alors exposés aux anticorps neutralisants et aux médicaments présents dans le sang. Le deuxième mode de transmission des virus est la transmission directe de cellule à cellule. L’équipe strasbourgeoise a montré que lorsque des virus sont résistants, c’est la voie de transmission directe de cellule à cellule qui est favorisée car elle permet aux virus d’échapper aux anticorps et aux AAD.

Heureusement, l’équipe du Pr Thomas Baumert a déjà envisagé une parade. Sur chaque cellule, il existe des récepteurs d’entrée ou se fixe le virus pour pénétrer une nouvelle cellule. En effet, une nouvelle classe thérapeutique est en développement les HTEI (pour Host Targeting Entry Inhibitor : inhibiteur d’entrée des récepteurs cellulaires). Il suffirait d’imaginer une combinaison de HTEI & d’AAD (Antiviral d’Action Directe) pour bloquer les deux modes de transmission des virus et donc, de se protéger des résistances.

Comprendre les résistances c’est se rapprocher encore plus des 100% de guérison. Voilà des idées auxquelles on ne peut être que sensible.

Pascal Mélin

Pour en savoir plus :
Chung RT, Baumert TF (2014) Curing chronic hepatitis C – the arc of a medical triumph. N Engl J Med 370(17):1576-8. doi: 10.1056/NEJMp1400986.
http://www.inserm.fr/actualites/rubriques/actualites-recherche/hepatite-c-lutter-contre-le-virus-et-ses-resistances#

LE PARCOURS D’UNE RÉSILIENCE…

merci papa« MERCI PAPA », un livre de Soad Bogdary publié en octobre 2014 aux Editions du Cherche Midi, dans la collection Documents pour 16,50€.

Le 14 juillet 1979, un parricide éclabousse la Ville de Mantes-la-Jolie. Avec l’aide de sa mère, Farid, l’un des 12 frères et sœurs de l’auteur a poignardé le pécore, car c’est ainsi qu’elle surnomme son père. Ce père était violent, maltraitant, odieux avec sa femme et ses enfants, leurs infligeant tortures et châtiments corporels.

Ce livre est une histoire de vie exceptionnelle, mais il est intéressant à plusieurs titres.

Du côté addictologique, il retrace bien l’expérimentation progressive des produits pour passer de l’usage à la dépendance, mais surtout il nous rappelle que l’usage des produits varie avec le temps et en fonction de la psyché de la personne.

Ainsi, Soad Bogdary relate avoir traversé certains passages de sa vie avec de la drogue & d’autres non. Pour ceux qui n’ont pas connaissance du milieu, cela reflète bien des allers-retours spontanés dans le produit et ses mouvances d’effets. Et que les personnes soient incarcérées ou en liberté.

C’est le formidable récit d’une résilience. Cette résilience si chère à Boris Cyrulnick. En effet, Soad a transformé les traumatismes qu’elle a vécus en une formidable source d’énergie et de détermination. Elle comprend même qu’elle doit cela au pécore à qui elle dit « Merci papa ».

Enfin, dans les dernières pages du livre, menant un combat contre le cancer, elle déclare : « Cela fait six ans que je n’en ai plus que pour 4 mois. »

À lire. Un livre formidable qu’il faut mettre dans sa bibliothèque hépatante !

Pascal Mélin

HÉPATITE B, MIEUX COMPRENDRE LES CONTAMINATIONS

blog paradoxe HBVous êtes de plus en plus nombreux à vous intéresser à l’hépatite B et à nous poser des questions. Les plus curieux nous posent souvent la question suivante : pourquoi si un enfant se contamine de l’hépatite B à la naissance, il passera à la chronicité dans 90% des cas alors qu’à l’âge adulte, ce chiffre n’atteint pas 10% ? À quel âge se fait le changement ?

C’est le paradoxe de l’hépatite B.

Lors de l’accouchement, si le bébé se contamine en naissant d’une mère porteuse du virus, le risque de passage à la chronicité est de 90%  alors qu’en cas de contamination à l’âge adulte, il est de moins de 10% (si vous n’êtes pas vacciné). Pour répondre à cette question, reprenons un texte déjà publié sur le blog en janvier 2013.

Il faut reprendre des travaux publiés en 1993, vous noterez au passage que de tels travaux ne seraient plus éthiques car on ne peut imaginer suivre des enfants nés de mère atteinte d’hépatite B sans les vacciner. Cette équipe a repris tous les cas d’hépatite B aigüe pédiatrique pris en charge et a suivi les enfants en fonction de l’âge au moment de leur contamination. Ils confirment alors que le taux de passage à la chronicité à la naissance est bien de 90% puis de 80 à 6 mois pour atteindre les 50% avant l’âge de 1 an et passé 5 ans, les résultats sont identiques aux chiffres retrouvés chez les adultes  avec 5 à 10% de passage à la chronicité. On peut retenir plusieurs leçons d’une telle étude, premièrement à la naissance le système immunitaire n’est pas opérationnel pour lutter contre une hépatite B, et celui-ci mettra plusieurs années à devenir mature, il est donc préférable de vacciner les nourrissons et c’est là sans doute,  la deuxième leçon à retenir.

DOIGT 3En 2015, avec les moyens de prévention il est inadmissible de laisser sur la planète une femme accouchée sans la dépister au moins par un TROD VHB et il est alors criminel de ne rien faire pour l’enfant en le laissant entré 9 fois sur 10 dans une maladie chronique.

Pascal Mélin